Bülent Arınç : "La nouvelle constitution s'adressera à tous les citoyens, indépendamment de leur religion ou ethnie"

Bülent Arınç : "La nouvelle constitution s'adressera à tous les citoyens, indépendamment de leur religion ou ethnie"
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Par Euronews
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Alors que le campagne électorale bat son plein en Turquie, Euronews s’est entretenu avec les principales figures du scrutin historique de dimanche.

L‘élection du 12 Juin ne devrait pas conduire à de profonds changements au sein du gouvernement mais elle a tout de même valeur de test pour l’AKP, le Parti de l’actuel premier ministre qui entend doter le pays d’une constitution civile.

Rencontre d’abord avec Bülent Arınç, vice-premier ministre et homme fort de l’AKP.

Euronews : La Turquie se prépare à rédiger une constitution civile, après des décennies. C’est sans doute ce qui rend cette élection plus importante. Pourquoi au juste ?

Bülent Arınç : Nous avons tenté de rédiger une constitution après l‘élection de 2007. Mais il ne nous a pas été possible de le faire. Toutefois, une série d’amendements constitutionnels adoptés au Parlement en 2010 ont fait l’objet d’un référendum qui a été soutenu par la majorité. Après cela, nous avons réalisé que nous avions besoin d’une nouvelle constitution et qu’il était impossible de poursuivre avec l’actuelle. Nous avons clarifié les choses après le référendum de l’an dernier. A cette époque, nous avions demandé à chaque parti de se réunir pour rédiger une constitution démocratique. Les principales caractéristiques de la nouvelle constitution, c’est qu’elle sera plus transparente, plus brève et qu’elle contiendra moins d’articles. Jusqu‘à présent, il s’agissait d’une constitution étatiste et autocrate produite par l‘élite en place en Turquie. Nous allons maintenant en écrire une orientée vers les gens. Elle sera libre de toute idéologie. Elle s’adressera à toutes les personnes, indépendamment de leur religion et ethnie.

Euronews : Vous parlez d’une constitution plurielle. Quelles seraient les conséquences pour l’AKP si cela n’aboutissait pas ?

Bülent Arınç : Ce n’est pas seulement notre problème. Ce que nous pensons c’est que dans la mesure où notre démocratie évolue de plus en plus, nous estimons qu’il est indispensable de nous débarrasser de l’actuelle constitution qui procède d’un coup d‘état militaire. Mais nous ne sommes pas disposés à le faire seuls. Nous ferons de notre mieux pour parvenir à un consensus sur cette question. Ce processus peut prendre un ou deux ans, mais à la fin nous aurons besoin d’un minimum de 330 voix pour mettre cette question en référendum. Un pays qui négocie actuellement avec l’UE pour une pleine adhésion ne devrait pas mettre en avant une constitution forgé par les militaires.

Euronews : Le processus de négociation de la Turquie avec l’UE est au point mort en raison notamment de pays sceptiques comme la France et l’Allemagne opposées à son adhésion. Quel genre de mesures prendrez-vous pour accélérer ce processus?

Bülent Arınç : En ce qui concerne le processus d’adhésion à l’UE, nous remplirons toutes les conditions que nous nous sommes engagés à respecter. C’est une erreur de prétendre que nous avons été lents. Sur les 27 membre de l’UE, seuls la France et l’Allemagne s’y opposent et nous sommes aux prises avec ce refus. La Turquie n’a aucun problème avec les 25 autres membres. Ils soutiennent notre demande d’adhésion. La politique intérieure qui prévaut en France et en Allemagne joue un rôle important dans cette opposition à l’adhésion turque. Et ils continuent d’insister sur cette voie car ils estiment que la Turquie risquerait d’augmenter son influence si elle devenait un membre à part entière de l’UE. Nous devons donc attendre de voir l‘évolution politique dans ces pays.

Le CHP, principal parti d’opposition pourrait lui aussi sortir renforcé du scrutin. Son leader, Kemal Kılıçdaroğlu critique notamment la politique étrangère de l’AKP.

Euronews : A quel type de réformes constitutionnelles penserez-vous une fois l‘élection terminée ?

Kemal Kılıçdaroğlu : Nous prévoyons un certain nombre de dispositions pour la réforme constitutionnelle. Nous avons un plan pour rendre les universités autonomes et limiter l’immunité des députés au parlement. Les normes de l’UE seront adoptées. Finis aussi les privilèges réservés aux tribunaux spéciaux. Nous mettons aussi en avant la liberté de la presse. Les médias doivent être libres et indépendants. La pression sur les médias doit être réduite. Il existe également des dispositions concernant les ministres d‘état faisant l’objet de procédures judiciaires. Ces dispositions devraient aussi être en conformité avec la législation de l’UE. Il ya de nombreux articles inclus dans la Constitution du 12 Septembre 1980, après le coup d‘état militaire. Ils doivent être retirés et remplacés par des articles plus conformes.

Euronews : La Turquie a été plutôt lente au cours des deux dernières années, sur le processus d’adhésion à l’UE. Qu’en pensez-vous ?

Kemal Kılıçdaroğlu : Nous considérons que le processus d’adhésion à l’UE est une chance de moderniser le pays. Le second leader de notre parti, Ismet Inonu, a lancé le processus en 1963 en ratifiant un accord d’association entre la Turquie et la CEE. Nous voulons que ce processus soit accéléré et qu’il conduise à l’adhésion à part entière. Le processus peut prendre du temps, mais il est clair que nous voulons adopter les réformes de l’UE.

Euronews : La Turquie semble se distinguer de plus en plus sur la scène internationale et en termes de politique étrangère. Vous êtes d’accord ?

Kemal Kılıçdaroğlu : L’accord de réconciliation entre le Hamas et le Fatah, deux groupes rivaux en Palestine, signé en Egypte, démontre que l’influence de la Turquie à la fois dans la région et sur ​​la scène mondiale n’a pas augmenté, mais bien au contraire diminué. Et puis les relations avec Israël se sont détériorées. Le gouvernement a bien tenté de normaliser les relations avec l’Arménie, mais a ensuite pris du recul et la Turquie s’est alors mise à l‘écart du monde occidental. La politique étrangère turque a suscité de vives inquiétudes à travers le monde et soulevé certaines interrogations sur les possibles nouvelles orientations du pays, de l’Europe vers l’Orient.

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