Elections: les artistes pour une Tunisie nouvelle et moderne

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Par Euronews
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Le 23 octobre, la Tunisie vote pour la première fois depuis la chute de Zine El-Abidine Ben Ali. Les Tunisiens vont élire une Assemblée constituante. Nous en parlons avec Fadhel Jaïbi et Jalila Baccar, artistes très présents sur la scène politique tunisienne, qui ont participé activement à la révolution.

Manuela Scarpellini, euronews
Comment avez-vous vécu la révolution en tant qu’artiste et Tunisien ?

Fadhel Jaïbi, metteur en scène
Ce n’est pas pour tirer la couverture, comme on dit, mais on était un petit peu aux premières loges pendant les derniers jours avant la chute de Ben Ali. Vous savez, cette révolution a été accompagnée principalement par un grand nombre d’avocats, d’artistes et d’intellectuels et certains syndicalistes dans ses premiers balbutiements. Et nous avons été très fortement malmenés par la police politique dans l’avenue principale de Tunis, en face du théâtre municipal où nous devions faire un espèce de rassemblement éphémère.

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Habitué au parti unique, comment la Tunisie pourra-t-elle choisir maintenant entre 63 listes et une multitude de programmes souvent semblables ?

Fadhel Jaïbi
C’est une bonne question ! Parce que je pense qu’il n’est pas question de partis politique. Pour moi, il est davantage question d’une Assemblée constituante qui va déterminer la loi fondamentale de ce pays et va orienter pour des années, peut-être des décennies, ou même un siècle. Il s’agit de déterminer le modèle de société des Tunisiens.

Depuis le début, nous avons appelé de nos vœux et appelons encore à une république démocratique c’est-à-dire parlementaire et laïque, qui prenne la culture comme fondement de son existence. Nous allons nous activer au maximum à travers les élections mais aussi pendant toute la période pendant laquelle cette Constitution va être élaborée, de sorte que nos idées, les idées de beaucoup de Tunisiens qui veulent faire barrage aux islamistes et qui proposent un autre modèle de société, soient entendues.

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Si après le vote il y avait une poussée islamiste, est ce qu’il y aurait, selon vous, moins de liberté pour la culture et la liberté d’expression ?

Fadhel Jaïbi
Ça serait la pire des choses. Ce serait passer de 56 ans d’interdits à une période indéterminée de tabous et de sacré qui va s’opposer à tout ce que nous pourrons entreprendre pour mettre en place une Tunisie nouvelle et moderne.
Nous ferons tout pour que les forces démocratiques en Tunisie prennent leurs responsabilités pour défendre l’avenir démocratique et moderne de ce pays. Il y a plusieurs familles démocratiques qui se font concurrence d’une manière plus ou moins légitime mais qui, le moment venu, devront assumer leur rôle.

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Vous êtes actuellement en tournée en Europe: est ce que vous allez rentrer pour voter ?

Fadhel Jaïbi
Oui, nous allons rentrer en Tunisie, nous interrompons notre tournée. C‘était prévu depuis un moment.

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Pourquoi n’avez-vous pas accepté le Ministère de la culture que le gouvernement vous a proposé ?

Jalila Baccar, auteur et actrice

C‘était le premier gouvernement parce qu’il y en a eu trois. Le premier, c’est à dire celui du 15 janvier, comprenait encore des éléments du RCD (ancien parti de Ben Ali) dans le gouvernement.

Et puis parce que de toute façon le poste de ministre ne m’intéresse pas du tout, ce n’est pas mon travail. Je suis très bien là où je suis, sur les planches.

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Quelle est la place des femmes dans ces élections ?

Jalila Baccar
Quelle est la place des femmes d’abord dans la révolution ? Sans elles, rien n’aurait pu se faire. Si la révolution, et ce qu’on appelle le “printemps arabe”, a commencé en Tunisie, je pense que c’est aussi grâce à la place des femmes dans ce pays.

Pour les élections, elles sont omniprésentes et très actives dans les partis mais aussi et surtout dans les associations. Des très jeunes femmes ont constitué des associations pour inciter et aider toutes celles qui n’ont pas accès à l’information. Toutes ces filles, ces jeunes femmes, sont allées vers elles pour leur faire comprendre le sens de ces élections. Et puis vous savez, nous avons voté la parité pour les listes. Bien sûr qu’il n’y aura pas de parité dans cette Constitution mais il y aura quand même un 20% ou 30% des femmes, j’espère.

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Quelles sont les priorités du pays après le vote?

Jalila Baccar
La justice sociale principalement. Cette révolution s’est faite aussi parce qu’il y avait une telle injustice entre les citoyens mais aussi entre les régions et qu’il fallait rééquilibrer tout ça. Et ensuite : défendre les libertés d’expression, de création, de culte. Et insister toujours pour qu’il y ait cette justice, cette égalité entre hommes et femmes.

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