"Le Hamas rejette la trêve pour se renforcer politiquement"

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Par Euronews
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Les bombes ont donc repris sur Gaza, avec leur cohorte de morts. Le Hamas a rejeté le cessez-le-feu proposé par l’Egypte, et qu’Israel avait accepté.

La “fin de l’agression contre le peuple palestinien”, l’arrêt du blocus de Gaza, l’ouverture du poste frontalier de Rafah avec l’Egypte et la libération des prisonniers réarrêtés. Ce sont les conditions qu’impose le Hamas.

Un mouvement qui suscite, à son image, la division de la population palestinienne. Diminué, divisé, notamment entre sa branche militaire et sa branche politique, mais aussi au sein même de sa branche militaire, le Hamas semble décidé à aller au bout de sa logique.

“Que l’occupation israélienne annonce unilatéralement mettre fin aux combats ne signifie rien pour nous. Ce qui lui est demandé, ce n’est pas la fin des combats, mais la fin de l’injustice imposée aux Palestiniens de la Bande de Gaza”, a affirmé ce porte-parole du Hamas, Sami Abu Zuhri .

Défendre la population, occuper le terrain, avant que d’autres mouvements présents dans la Bande de Gaza ne prennent le dessus. Le Hamas s’est toujours appuyé sur cette stratégie. Se rendre indispensable, seul résistant à l’ennemi, seul capable de défendre les intérêts des Palestiniens face à l’occupation israélienne.

Une stratégie qui fonctionnait mieux quand le Hamas avait des appuis qu’il a perdus. Depuis l’accession au pouvoir en Egypte du général Al-Sissi, les relations avec l’ex- puissance protectrice sont plus que tendues. L’Egypte a accepté cette semaine de rouvrir les points de passage, seulement pour apporter de l’aide à la population.

Isolé diplomatiquement, le Hamas a encore un pouvoir de frappe. Des missiles et des roquettes, en provenance d’Iran ou de Syrie. Leur portée a surpris les Israéliens. Si, dans une offensive entre les deux parties, il est évident que le Hamas serait perdant face à l’armée israélienne, son pouvoir de nuisance n’est pas mort.

Reste qu’Israel n’est pas forcément prêt à une intervention de grande ampleur, qui outre les victimes civiles, et pourrait voir surgir sur le terrain des groupes plus radicaux. Dans ce contexte, le Hamas n’a sans doute rien à perdre.

Mais quelle sont les motivations du Hamas ? Laurence Alexandrowicz en a parlé avec Hasni Abidi, spécialiste du monde arabe et directeur du CERMAM (Centre d‘études et de recherches sur le monde arabe et méditerranéen) à Genève, et chargé de cours à l’Université de Genève.

Laurence Alexandrowicz : “Plus de 200 morts en une semaine, des destructions terribles, le Hamas a-t-il intérêt à relancer une nouvelle guerre ? Quelles sont ses motivations ?”

Hasni Abidi : “les motivations du Hamas c’est tirer profit de l’escalade aujourd’hui qui est une escalade bien sûr des deux côtés, du côté des plus extrémistes, et évidemment il pense avoir des gains en politique très importants. La non-acceptation de la proposition de paix est beaucoup plus importante et avantageuse pour le Hamas que d’accepter l’initiative de paix. Il va se renforcer sur le plan politique et il essaye de lever entièrement le blocus et surtout il va mettre à mal son partenaire, l’Autorité palestinienne. “ Laurence Alexandrowicz : “La nuit dernière les maisons de quatre dignitaires du Hamas ont été détruites par les Israéliens. Cela fait une semaine que Tsahal pilonne la bande de Gaza, et les tirs de roquettes ne cessent pas. D’où le Hamas tire-t-il sa capacité de résistance ?” Hasni Abidi : “L‘équilibre des forces aujourd’hui bien entendu est en faveur d’Israël mais le Hamas a surpris tout le monde y compris les militaires israéliens. Je pense que le Hamas préparait son coup depuis plusieurs années. On pense que les deux dernières années, et notamment aussi après le départ de l’Egyptien Morsi, le Hamas s’est dit que la situation internationale ne lui est pas favorable parce qu’il perd tous ses alliés et qu’il fallait absolument qu’il prépare le moment difficile, la confrontation avec Israël. Bien sûr il a gardé des liens importants avec ses anciens parrains comme par exemple l’Iran.” Laurence Alexandrowicz : “Parlons donc des soutiens du Hamas : avec la situation qui évolue en Syrie ou en Irak, les islamistes du Hamas sont-ils plus forts ?” Hasni Abidi : “Vous savez, les jihadistes palestiniens, Jihad islamique ou Hamas, sont une émanation nationale, et leur lutte est nationale. Il est très difficile d’avoir des liens avec la mouvance jihadiste internationale notamment avec ce qui se passe en Syrie et en Irak. Cependant les performances de l’Etat islamique en Irak donnent des idées, surtout au Jihad islamique. Comme ils pensent que les Etats arabes aujourd’hui sont faibles et que ces Etats ne peuvent rien faire pour leur cause, il fallait absolument se mobiliser.” Laurence Alexandrowicz : “Un député du Hamas, à propos d’une possible opération terrestre de Tsahal, a dit récemment cette phrase “Les résistants en rêvent, Gaza sera leur cimetière”. Est-ce qu’après tous ces morts, ces blessés et ces destructions les Gazaouis soutiennent toujours la position du Hamas ? “ Hasni Abidi : “Il y a une volonté de la part de la majorité des Gazaouis d’en finir, et d’arracher un cessez-le-feu durable, et surtout avec les conditions connues : au moins l’ouverture des terminaux, et la fin du blocus, sans oublier la libération des prisonniers. Deuxième élément, les Gazaouis ne peuvent pas aller très loin, parce qu’on sait que le Hamas est non seulement un parti politique mais aussi une organisation militaire, une structure économique, et la vie quotidienne des Gazaouis est conditionnée par ce mouvement-là, après le retrait de l’Autorité palestinienne. C’est pourquoi il y a presque une fusion malgré tout entre les Gazaouis et le Hamas par défaut parce qu’il n’y a pas d’autre perspective… et surtout quand le seul point de passage avec l’Egypte est fermé, il devient très difficile pour les Gazaouis de se rebeller contre le Hamas.”

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