Turquie : quels défis pour le prochain président?

Turquie : quels défis pour le prochain président?
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Par Euronews
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Les 10 et 24 août, les Turcs sont appelés aux urnes pour élire pour la première fois leur président au suffrage universel direct. Ces élections peuvent signifier un tournant historique pour le pays en entraînant des changements importants du système actuel.

Le nouveau président devra faire face à de nombreux défis. En matière de politique intérieure, la situation économique est plutôt bonne. Le principal problème à résoudre reste la question kurde.

En matière de politique étrangère, la Turquie connaît une situation redoutable à ses frontières avec les crises syrienne et irakienne. Elle accueille désormais plus d’un million de réfugiés syriens.

“La Turquie a des problèmes profonds depuis de nombreuses années, qui ne peuvent être laissés irrésolus. Par exemple, la question kurde, le problème des Alawites, des minorités”, estime l‘éditorialiste du journal Sabah, Mahmut Övur.

Après avoir largement remporté les élections municipales, le 30 mars dernier, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdoğan s’apprête désormais à endosser le costume de président de la République.

Face à lui, deux candidats : Ekmeleddin Ihsanoğlu, son principal adversaire désigné par le CHP et le MHP, ainsi que le candidat kurde, Selahattin Demirtaş. Mais face au grand favori, peu de suspense entoure l’issue du scrutin présidentiel.

Si Erdogan est élu, une période de transition attend la Turquie, considère Mahmut Övur : “un président élu par le peuple sonnera la transition vers un régime semi-présidentiel. A mon avis, le rôle du premier ministre sera modifié en conséquence, même s’il n’y a aucun amendement constitutionnel à cet effet.”

L’opposition turque a du mal à faire face au pouvoir actuel. Au cours des 12 dernières années, les partis d’opposition ont perdu 8 élections consécutives.

“Le principal problème, constate Mahmut Övur, c’est que l’opposition ne réussit pas à être force de proposition. En fait, elle aurait dû produire des alternatives. Les deux principaux partis d’opposition ont fini par proposer un candidat commun, qu’ils appellent un “candidat parapluie”.

Ce candidat du rassemblement, c’est Ekmeleddin Ihsanoğlu, ancien président de l’Organisation de la coopération islamique. D’après les sondages, il a très peu de chances de dépasser 40 % des voix.

“Ces élections présidentielles devraient de toutes façons marquer un tournant pour la Turquie. La vie politique de ce pays va être très animée, à la fois dans l’opposition, et du côté du gouvernement”, conclut notre correspondant à Istanbul, Bora Bayraktar.

Adil Gür est politologue à l’institut de sondage A & G Research à Istanbul. Melis Ozoglu l’a interrogé depuis Lyon.

Melis Ozoglu, euronews :
Deux candidats, le premier ministre Recep Tayyip Erdogan, et le candidat du parti pro-kurde HDP Selahattin Demirtas, sont des hommes politiques connus. Le troisième, Ekmeleddin Ihsanoglu, candidat d’union de dix partis d’opposition, les turcs ne le connaissent pas bien. Est-ce un désavantage pour lui?

Adil Gür :
Les dernières enquêtes montrent que 80 – 90 % de la population connaît Ihsanoglu. Mais le fait de connaître son nom ne signifie pas qu’il est connu politiquement. Pour cela, il faut que les gens connaissent les positions du candidat sur les politiques à mener et sur les problèmes majeurs de la Turquie. Par exemple : que pense t-il du problème kurde? Ou bien, quel est son avis sur la politique étrangère de la Turquie. C’est important que tout cela soit connu par la population. Et là, malheureusement, M. Ihsanoglu, même si l’on connaît son nom, reste désavantagé par rapport à Erdogan et Demirtas.

euronews :
Dans cette élection, on ne vote pas pour des partis, mais pour des candidats. Pensez-vous que les électeurs voteront pour le candidat de leur parti, ou y aura t-il beaucoup de voix perdues ?

Adil Gür :
On voit dans nos enquêtes qu’aux dernières élections municipales, 97 % des électeurs qui ont voté pour l’AKP votent pour Erdogan; 98 % de ceux qui ont voté pour le HDP pro-kurde votent aussi pour Demirtas. Et il y a un autre candidat, qui lui, a obtenu le soutien de plus de 10 partis politiques, Ihsanoglu. Mais il ne semble pas possible que les votes venant de tous ces partis se portent sur un seul nom. La volatilité des votes est bien plus probable ici que pour les deux autres. En résumé, la base électorale de l’AKP et celle du HDP soutiendront leurs candidats respectifs. Les pertes de votes s’effectueront plutôt dans le camp du candidat d’union.

euronews :
Si la barre des 50 % n’est pas atteinte dès le premier tour, le parti de Demirtas hors jeu, les électeurs de ce dernier devraient se reporter vers qui?

Adil Gür :
En Turquie, ceux qui votent pour Demirtas sont des électeurs d’origine kurde. Au cours des dernières élections depuis 8 -10 ans en Turquie, uniquement deux partis ont obtenu les votes des kurdes : l’AKP et le HDP. Par conséquent, une grande partie des électeurs du HDP va voter pour Erdogan. Mais je ne pense pas qu’il y aura un deuxième tour, l‘élection sera pliée au premier tour.

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