Les minorités religieuses d'Irak, "une mosaïque à protéger"

Les minorités religieuses d'Irak, "une mosaïque à protéger"
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Par Euronews
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Soutenir les Chrétiens d’Irak était l’objectif d’un repas irakien organisé dans les jardins de l’archevêché de Lyon, en France, mais aussi une occasion pour les quelque 850 personnes présentes, de célébrer le lancement du jumelage des diocèses de Lyon et de Mossoul.

Des Irakiennes installées en France depuis quelques années ont préparé ce repas, mais malgré la joie et la chaleur du moment, elles n’oublient pas ce que vivent leurs familles restées en Irak.

“Mes belles-sœurs et leurs enfants ont été chassés du village de Batala. Ils ont passé un mois dans la rue, sur le trottoir, avant de trouver une solution pour entrer à Kirkouk”, raconte Carine.

L’association Fraternité en Irak était présente à cette soirée de soutien. De retour d’Erbil, son président tire la sonnette d’alarme. Il craint qu‘à la crise humanitaire, s’ajoute une crise sanitaire.

“Dans le plus grand camp d’Erbil, lorsque nous sommes arrivés, il n’y avait que quatre douches pour 700 familles, donc l’enjeu a été très vite de construire des douches dans ce camp parce qu’il y avait déjà des cas de gale qui commençaient à se développer. L’action humanitaire, c’est aussi de faire en sorte que ces personnes ne vivent pas un hiver dans la tente par zéro degré avec des flots de pluies qui vont les inonder”, explique Faraj-Benoît Camurat au micro de Fabien Farge.

Près de 200 Chrétiens d’Irak ont été rapatriés en France depuis le mois d’août. Six familles ont été accueillies à Lyon. Le Curé de la paroisse chaldéenne de la ville est en contact permanent avec ces réfugiés. Il raconte leur état d’esprit à leur arrivée.

“Ils étaient tristes parce qu’ils ont tout abandonné, parce qu’ils ont tout perdu d’un seul coup et également parce qu’ils ont senti une certaine trahison de la part de leurs voisins qui ont marqué leur maison pour dire qu’ils sont chrétiens. Quand ils sont arrivés, ils étaient sous le choc parce qu’ils arrivent, dépouillés de tout, dans la panique, dans la peur et leur seul objectif est de retrouver le calme et la paix ici. Ensuite, de régulariser leur séjour et là, c’est une immense affaire et du coup, j’ai l’impression qu’ils sortent d’un problème, le départ et après le danger, etc. Pour entrer dans un autre problème, qui est administratif, c’est un cercle infernal”, dit le père Muhannad Al-Tawil.

Temps fort de cette soirée, un cadeau du Cardinal Barbarin au Patriarche des Chaldéen, les Catholiques d’Irak: les clefs d’une ambulance neuve destinée à un quartier chrétien d’Erbil, où sont soignés gratuitement 400 à 600 réfugiés chaque jour.

Entretien avec Mgr Louis Raphaël Sako 1er, Patriarche des Chaldéens.

Il vit à Bagdad, mais a fait escale à Lyon pour participer à ce dîner irakien avant de se rendre à Rome afin d’assister au Synode sur la famille. Nous avons rencontré Monseigneur Sako. Le patriarche des Chaldéens revient sur la situation en Irak.

Mgr Louis Raphaël Sako 1er:
“Moi je vis sur place et je vois les gens, leur souffrance et aussi leur peur comme leurs espoirs. Et je crois qu’il est très important de sensibiliser l’opinion publique sur le sort de ces Chrétiens, là mais pas seulement Chrétiens, les autres minorités aussi. Leur existence, leur présence est très importante pour toute la population locale, mais aussi pour le monde entier, c’est une mosaïque, il faut la garder”.

Raphaële Tavernier, euronews:
L’Onu dénonce une “palette stupéfiante de violations des droits de l’homme” en Irak. Vous le confirmez?

Mgr Louis Raphaël Sako 1er:
“Oui, tout à fait. Il n’y a pas d’ordre, c’est-à-dire que l’armée irakienne ne contrôle pas la moitié du pays. Ce n’est pas une armée professionnelle, même à Bagdad, nous avons des problèmes avec les milices, pas seulement les Chrétiens, mais aussi les autres. Il y a des enlèvements, il y a aussi des menaces. Il faut aider le gouvernement irakien à se former et aussi former une armée irakienne professionnelle pour qu’elle puisse protéger tous les citoyens”.

euronews:
Barack Obama a dit qu’il faudrait minimum trois ans pour régler la situation en Irak et en Syrie, pensez-vous que donner une date était nécessaire?

Mgr Louis Raphaël Sako 1er:
“Les discours des chefs politiques, doivent être équilibrés et non pas piégés. D’abord, il a dit “l’intelligence américaine n’a pas su la force et le poids de l’Etat islamique”. Alors que les Américains ont des satellites, ils contrôlent un peu tout. Et puis il a dit que ça allait durer trois ans. Donc c’est un double message, un faux message. C’est dire à l’Etat islamique, vous avez trois ans, vous avez le temps de vous réorganiser, d’avoir plus de militants et aussi plus de possibilités de vendre le pétrole, etc. Et c’est dire aux déplacés, il faut vous débrouiller, vous ne pouvez pas retourner chez vous, immédiatement ou à court terme. Trois ans, les gens vont partir. Ils seront désespérés. Ils n’auront pas de patience. Il valait mieux ne rien dire et continuer à bombarder au lieu de dire ces choses-là. Cela décourage la population et encourage ISIL, Daesh”

euronews:
Justement, vous l’avez dit, vous êtes favorable à une intervention terrestre, pensez-vous que c’est la solution?

Mgr Louis Raphaël Sako 1er:
“Aujourd’hui, avec ces militants là, il n’y a qu’une force militaire qui peut les chasser, donc pas seulement des bombardements. Mais je crois qu’il faut des troupes au sol avec l’aide ou la collaboration de l’armée irakienne ou de l’armée kurde”.

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