La Pologne affirme ses choix de politique de sécurité

La Pologne affirme ses choix de politique de sécurité
Par Ewa Dwernicki
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Une histoire tragique, rythmée par des invasions et des partages, une géographie qui fait d’elle un espace vulnérable, une position régionale inconfortable entre deux puissances voisines, voici trois raisons pour lesquelles les questions de sécurité dominent les préoccupations politiques de la Pologne.

Depuis la fin de la guerre froide et la transition démocratique en 1989, le pays a opté pour une étroite coopération avec l’OTAN et l’Union européenne. Dans le contexte de la crise ukrainienne et des tensions à son sujet avec la Russie, la Pologne cherche aujourd’hui toujours plus de garanties concrètes de la part de ses partenaires tout en misant sur une certaine autonomie défensive.

Moderniser et restructurer pour renforcer ses capacités défensives

La Pologne est le plus grand pays d’Europe centrale aussi bien du point de vue de sa superficie qu’au niveau démographique. En termes d’effectifs, elle dispose de la sixième armée de l’Union européenne et de la huitième de l’OTAN. Elle est aussi l’un des rares pays européens dont les dépenses militaires ont augmenté lors de la dernière crise financière. La volonté de modernisation et de restructuration de ses forces armées ainsi que le développement de l’industrie nationale de défense soulignent que les capacités défensives du pays sont l’un des piliers de sa politique de sécurité. Dans ce but, la Pologne a prévu de renouveler ses matériels de combat ainsi que de se doter d’un système antimissile autonome qui complètera le bouclier américain dont la mise en place en Pologne est prévu pour 2018.

Cultiver l’atlantisme

L’Alliance atlantique est considérée par la Pologne comme le principal garant extérieur de sa sécurité. Membre de l’organisation depuis 1999, le pays reste attaché à l’idée que la défense collective est toujours sa mission prioritaire. Elle participe d’ailleurs activement aux structures politiques et militaires de l’Alliance ainsi qu’à ses opérations de gestion de crise. Malgré le désengagement des Etats-Unis en Europe centrale depuis le début de l’ère Obama, ces derniers continuent à jouer un rôle important pour l’équilibre de la région en évitant à la Pologne d’assumer toute seule l’impasse représentée par sa position entre l’Allemagne et la Russie. Face à la nouvelle menace russe potentielle, apparue avec la crise ukrainienne, la Pologne est d’autant plus en faveur du stationnement des forces armées de l’OTAN sur son territoire de manière permanente.

Participer à la construction d’une défense européenne

Cet atlantisme polonais, toujours actif, s’accompagne depuis quelques années du renforcement des liens avec l’Union européenne considérée comme l’autre garant principal de la sécurité du pays. C’est ainsi que lors de sa présidence du Conseil de l’UE, au second semestre 2011, la Pologne a fait de la relance de la PSDC (Politique européenne de sécurité et de défense commune) l’un de ses objectifs prioritaires en préparant un ambitieux programme la concernant. C’est pourquoi les militaires polonais participent aux groupements tactiques de l’UE ainsi qu’à ses missions en Europe et en Afrique. La Pologne a également choisi de se prononcer pour une coopération étroite entre ces groupements tactiques et la Force de réaction rapide de l’OTAN.
La relation privilégiée que la Pologne entretient avec l’Allemagne fait également partie de son nouvel activisme au sein de l’Union européenne. Les investissements allemands en Pologne ont pour elle une grande valeur aussi bien économique que stratégique. L’interdépendance des deux économies a le mérite de sceller leurs sorts en les obligeant à regarder dans la même direction.

Garder le leadership dans la région

Sensible aux évolutions régionales, la Pologne joue souvent le rôle de leader de l’intégration communautaire pour ses voisins orientaux. L’Ukraine et la Biélorussie occupent une place spéciale dans sa politique de sécurité. Elles constituent à la fois une zone tampon avec la Russie et une source potentielle d’instabilité à ses frontières. Œuvrer pour leur intégration dans les structures européennes et atlantiques revient à vouloir garantir sa sécurité à long terme.

En ce qui concerne l’état de ses relations avec la Russie, leur normalisation à la fin des années 2000, caractérisée par des gestes symboliques ayant pour but de surmonter les blessures du passé, a vite été anéantie par la réélection de V.Poutine en 2012 et surtout par la crise ukrainienne au printemps 2014. Le 19 mars 2014, le lendemain de l’annexion de la Crimée par la Russie, le Premier ministre polonais Donald Tusk a réaffirmé que la Pologne n’acceptait pas la politique agressive de Moscou à l’égard de l’Ukraine. Dans le m^me temps, il a tout de même souligné que le maintient de bonnes relations avec son voisin russe était l’un des fondements de la sécurité dans le région.

En mai 2013, le Bureau de la sécurité nationale a publié Le Livre blanc sur la sécurité nationale de la République de Pologne. Ses auteurs, pour qui les futurs défis de sécurité pour la Pologne concernaient avant tout des menaces non militaires, telles que l’instabilité financière ou la crise démographique, préconisent pour elle une stratégie qui consisterait à trouver l’équilibre entre internationalisation et autonomie dans le domaine de sécurité. Le choix fait par les dirigeants polonais d’appuyer la sécurité du pays sur les trois piliers qui sont l’OTAN, l’Union européenne et la modernisation de l’armée polonaise, semble confirmer l’opinion des experts. Par ailleurs, étant donné la situation de crise en Ukraine et la menace militaire qui en découle, il n’est pas exclu que le soutien à ce pays devienne un jour le quatrième pilier de la sécurité polonaise.

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