C’est à chaque fois la même histoire… Chaque fait divers mettant en scène un meurtre par balle déclenche aux Etats-Unis un débat sur le contrôle de
PUBLICITÉC’est à chaque fois la même histoire… Chaque fait divers mettant en scène un meurtre par balle déclenche aux Etats-Unis un débat sur le contrôle de la vente des armes à feu. Opposant les pour et les anti. Un clivage qui va au-delà de celui entre Démocrates et Républicains.
Le président Obama a essayé, en vain, de proposer une nouvelle loi sur le contrôle des armes après le massacre de plusieurs enfants et de leurs professeurs à la Sandy Hook Elementary School en décembre 2012. Il a lancé un appel au Congrès à la suite de l’assassinat de deux journalistes, en août 2015, en Virginie, en soulignant que le nombre de morts dans des affaires de ce type est “largement supérieur à celui des victimes du terrorisme aux Etats-Unis.”
A la suite de la tuerie de Charleston en juin 2015 – neuf paroissiens noirs exécutés par un partisan de la “suprématie blanche” dans une église épiscopale méthodiste -, l’ex-secrétaire d’Etat et candidate à la primaire démocrate Hillary Clinton a promis qu’elle “s’attaquerait au problème”. Tout en reconnaissant qu’il s’agit là d’une “question très politique et difficile en Amérique”. Illustration, le gouverneur démocrate de Virginie, Terry McAuliffe, a lui aussi déploré l’abondance d’armes à feu dans le pays… alors que son Etat est l’un des plus laxistes en matière de contrôle.
Voici quelques éléments à prendre en considération pour mieux comprendre ce sujet :
- Quelle est la base juridique pour la possession d’armes ?
Selon le Deuxième Amendement de la Constitution américaine de 1791, “Une milice bien organisée (est) nécessaire à la sécurité d’un État libre, le droit du peuple à détenir et à porter des armes ne sera pas transgressé.”
Le fait que l’environnement du 18è siècle (quand des habitants vivant dans des endroits reculés se défendaient contre les Indiens, les soldats Britanniques ou les bandits de grand chemin) puisse encore aujourd’hui servir de modèle pour réglementer l’utilisation moderne des armes à feu par les citoyens a été longuement débattu aux Etats-Unis. Mais il a fallu attendre 2008 pour que la Cour suprême, dans le procès “District of Columbia vs Heller”, précise pour la première fois que le Deuxième Amendement protège le droit individuel à détenir et porter des armes à feu. Ainsi, les juges ont inversé des interprétations antérieures de la Constitution. En 1876, la Cour suprême avait statué que “Le droit de porter des armes n’est pas accordé par la Constitution”. En 1939, elle avait estimé que le gouvernement fédéral et les Etats pourraient limiter les types d’armes s’il y a une “milice bien réglementée”.
- Les citoyens peuvent-ils porter leurs armes ouvertement… comme dans un western ?
Oui et non, les lois variant d’un Etat à l’autre. La Cour suprême n’a pas statué sur le fait que le Deuxième Amendement donne ou pas le droit de porter des armes en public pour l’autodéfense. Des cours d’appel fédérales ont rendu des décisions contradictoires sur ce point. Par exemple, la Cour d’appel de Chicago a statué en ces termes en 2012 : “La Cour suprême a décidé que l’amendement confère le droit de porter des armes d’autodéfense, ce qui est aussi important à l’extérieur de la maison qu‘à l’intérieur. » Mais celle de Denver s’est prononcée de manière différente en 2013 : “A la lumière de la pratique étendue de notre nation de restreindre la liberté des citoyens de porter des armes à feu d’une manière cachée, nous estimons que cette décision ne relève pas du champ d’application du Deuxième Amendement. “
La pratique de l’“open carry”, quand les propriétaires d’armes à feu portent ouvertement des armes alors qu’ils vaquent à leurs occupations quotidiennes, a augmenté aux États-Unis au cours des dernières années. Ses partisans mettent en avant le fait que les criminels cachent habituellement leurs armes, contrairement donc aux citoyens respectueux des lois, qui afficheraient fièrement leurs pistolets.
- Combien d’armes à feu en circulation aux Etats-Unis ?
Ce qui semble être une question simple ne l’est en réalité pas. Il n’existe pas de registre national des armes, donc impossible d’en connaître le nombre exact.
Il y a en revanche des estimations. Selon Small Arms, la principale source d’information publique internationale sur les armes à feu, basée à Genève, les États-Unis ont la population civile la mieux armée dans le monde (270 millions d’armes à feu). Avec moins de 5% de la population mondiale, les Etats-Unis possèdent ainsi 35% à 50% des armes détenues par les civils dans le monde. Cela représente une moyenne de 89 armes pour 100 habitants, loin devant le Yémen (55) ou la Suisse (46).
Certains types d’armes à feu ne nécessitent pas d’inscription. Celles qui doivent être déclarées sont les mitraillettes, fusils et carabines à canon de moins de 18 pouces, et silencieux. Le Bureau des Alcools, Tabacs, Armes et Explosifs (ATF), qui gère ces enregistrements, annonce plus de trois millions d’armes déclarées. Mais combien sont détenues illégalement…
- Chaque Américain détient-il une arme ?
Non, la plupart des Américains ne possèdent pas d’arme. Selon l’Enquête sociale générale (ESG) de 2014, menée tous les deux ans depuis 1972, la possession d’armes est même à son niveau le plus bas, comme en 2010. Seuls 32% des Américains possèdent une arme à feu ou vivent avec quelqu’un qui en a une. Dans les années 70 et au début des années 80, c‘était 50%…
Ce sondage a aussi révélé que 22% des Américains possèdent personnellement une arme à feu, contre 31% en 1985. Le pourcentage d’hommes concernés est tombé de 50% en 1980
à 35% en 2014, tandis que le nombre de femmes concernées est demeuré relativement stable depuis 1980, pour atteindre 12% en 2014.
Bien que les achats d’armes à feu aient augmenté, selon les données du FBI, elles sont détenues par moins d’individus. En d’autres termes, le propriétaire en a plusieurs.
- Pourquoi des informations précises sur les armes à feu sont-elles si difficiles à obtenir ?
En 1996, la National Rifle Association (NRA), autrement dit, le lobby pro-armes, a fait pression sur le député Républicain de l’Arkansas Jay Dickey pour inclure des dispositions budgétaires empêchant les Centres de contrôle des maladies (CDC) de réclamer plus de contrôle sur les armes à feu. Deux millions six cent mille dollars ont ainsi été supprimés du budget des CDC, soit le montant exact qu’ils avaient consacré à la recherche sur les armes à feu l’année précédente…
L’interdiction a ensuite été étendue à toutes les recherches financées par le ministère de la Santé et des Services sociaux (DHHS). Selon les scientifiques travaillant sur cette question, la recherche est de plus en plus difficile, le nombre d‘études a été réduit et cela a même découragé les chercheurs de parler de la violence armée dans les conférences médicales et scientifiques.
En 2013, quelques mois après le massacre à la Sandy Hook Elementary School, le président
Obama avait demandé au Congrès d’inscrire dix millions de dollars dans les prévisions budgétaires 2014 et 2015 pour la recherche, le financement et la prévention des violences par armes à feu. La chambre des représentants, à majorité républicaine, a dit non.