La Marianne en pleurs du 13 novembre : rencontre avec son auteur lyonnais

La Marianne en pleurs du 13 novembre : rencontre avec son auteur lyonnais
Par Euronews
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Son dessin, une Marianne en larmes « bleu,blanc,rouge », réalisé dès le lendemain des attentats du 13 novembre dernier à Paris et Saint-Denis, a rapidement connu le succès sur les réseaux sociaux Facebook et Twitter. Il est devenu l’un des symboles de l’hommage des jeunes Français aux 130 victimes. C’est pour cela qu’Euronews a souhaité rencontrer Benjamin Régnier.

Benjamin Régnier :
J’ai 21 ans, je suis en BTS design de mode à l’école Bellecour, une école d’art à Lyon. J’ai fait une année de remise à niveau parce que je sortais d’un bac ES. C’était assez intense parce qu’on doit apprendre en un an ce que font les élèves en art appliqué. J’ai aussi fait un stage de trois mois au Pérou, durant l’été 2014, et de deux mois et demi, durant l’été 2015, dans l’entreprise Noé Bernacelli.
Après mon BTS, j’aimerais faire un an de stage à l’étranger, pour ensuite reprendre un master, mais certainement pas en France . Peut-être en Suisse… J’aimerais aussi aller à Londres, mais c’est un peu chaud. C’est très cher !.

L’horreur en guise de muse

euronews :
Avez-vous été touché personnellement par les attentats ?

Benjamin Régnier :
En fait, le soir des attentats, une copine est venue à la maison. Elle m’a demandé si j’avais vu ce qui se passait, et je lui ai répondu que non, je ne savais pas de quoi elle parlait. Elle m’a donc expliqué et on a directement mis les infos. On était atterrés ; j’ai tout de suite envoyé des SMS à tous mes potes parisiens, heureusement tout le monde allait bien. Mais ça fait quand même un gros choc ; il y a eu des pertes lourdes. Evidemment, ça touche la France, c’est quand même notre pays, on se dit que ça peut frapper n‘importe où…

euronews :
Quand avez-vous avez eu l’idée du dessin ?

Benjamin Régnier :
J’étais avec ma copine ; on est resté pratiquement toute la nuit devant les infos. Le lendemain matin, quand elle est partie, je voulais faire un truc pour représenter un peu ce que je ressentais, et donc naturellement, j’ai fait un dessin. C’est un dessin que j’ai fait au Colorex, c’est de l’encre aquarelle, sur du papier aquarelle. J’ai voulu représenter un visage de femme, allégorie de la France, en pleurs face aux événements tragiques. C’est ce que je ressentais, et je me suis dit que beaucoup de gens pouvaient ressentir la même chose ».

euronews :
Pourquoi une Marianne « bleu-blanc-rouge » ?

Benjamin Régnier :
J’ai pensé tout de suite à faire un portrait de femme en pleurs aux couleurs de la France, je me suis lancé et j’ai juste posé mon idée sur le papier. J’ai juste voulu mettre mes sentiments sur le papier ».

euronews :
Comment votre dessin s’est-il propagé ?

Benjamin Régnier :
En fait, je l’ai posté sur ma page Facebook. Ma sœur l’a vu, et elle m’a dit de l’envoyer au journal Le Monde parce qu’il publiait des dessins d’amateurs.

Cinq minutes plus tard, ils ont répondu en demandant s’ils pouvaient le publier, et une fois que ça a été fait, en deux minutes, il y avait plus de 400 likes ; ça n’a pas cessé d’augmenter. Ça s’est arrêté autour de 320 000 (323 636 likes exactement) . C’est surtout les partages qui étaient énormes (214 488 partages). Ma sœur a bien répertorié tout ça (rires). J’ai pu voir à quel point ça s’était propagé ».

euronews :
D’autres médias l’ont repris partout à travers le monde…

Benjamin Régnier :
Oui , après on l’a retrouvé dans des diaporamas de différents journaux en France, comme à l’international. Au Venezuela, en Italie, un peu partout en Europe, et dans d’autres pays du monde.

euronews :
Avez-vous senti un changement de comportement autour de vous, les jours suivants ?

Benjamin Régnier :
Non, je ne dirais pas que ça a changé quoi que ce soit. Evidemment, mes potes ont trouvé que c’était super pour moi, que j’ai bien réussi à calibrer les émotions que tout le monde ressentait, et s’ils ont ressenti un peu, entre guillemets, de fierté pour moi, et bien, tant mieux. Je ne sais pas si on peut parler de notoriété, parce que ça a fait un gros bruit, mais ce n’est pas comme si j’étais devenu une star. Ce n’était pas le but recherché, donc ça n’a pas changé grand-chose.

euronews :
Avez-vous été beaucoup sollicité ?

Benjamin Régnier :
Oui, pas mal. D’abord par des journaux, ensuite des radios, et enfin par la télé. Ça fait un drôle d’effet quand tu vois ta tête dans le journal ou à la télé. Bon après, c’est un peu répétitif, mais c’était une bonne expérience. Ça permet de voir des choses que je ne connaissais pas du tout ».

euronews :
Cela peut-il vous servir de tremplin ?

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Benjamin Régnier :
Non, pas du tout. Je ne l’ai pas du tout fait dans le but d’une recherche de célébrité, ou d’une recherche mercantile. C’est une démarche personnelle, le dessin a été diffusé mais je ne compte pas m’en servir pour autre chose. Je poste des dessins sur Instagram. Après, mon but c’est de devenir designer de mode, pas de m’orienter sur des illustrations. Si elles font plaisir à ceux qui les voient, tant mieux, mais je n’en ferai pas mon métier ».

euronews :
Ce dessin ne vous a donc pas fait changer de plan de carrière ?

Benjamin Régnier :
Non. D’autant plus que malgré tout, le design de mode, c’est aussi ça, avoir une idée à partir d’une situation, la communiquer, et faire ressentir aux gens au travers du vêtement un événement, une ambiance. Je reste sur le design de mode malgré tout.

euronews :
Votre dessin est-il une fierté, ou devient-il pesant à la longue ?

Benjamin Régnier :
Non, ce n’est pas comme si ça faisait des années que ça dure non plus, donc je ne dirais pas que ça devient lourd. Ça me fait plaisir d’avoir pu toucher les gens, et qu’il y ait des gens qui me soutiennent dans cette démarche, qui m’envoient des supers messages.

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euronews :
Vous avez reçu des messages d’inconnus ?

Benjamin Régnier :
Oui, il y a eu pas mal de messages d’inconnus sur les réseaux sociaux, qui me disaient qu’ils trouvaient mon dessin magnifique, que c’est exactement ce qu’ils ressentaient, que le dessin représentait bien les événements, qu’ils avaient bien compris sa sensibilité… C’est plaisant de se dire que j’ai pu toucher autant de personnes.

euronews :
Vous n’avez rien gagné pour ce dessin ?

Benjamin Régnier :
Rien du tout !.

euronews :
Etes-vous gêné par le fait que votre dessin ait pu être partagé parfois sans votre signature, qu’il y ait pu y avoir des utilisations sans que vous le sachiez ?

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Benjamin Régnier :
Au niveau financier, pas du tout. Je n’ai pas du tout fait ça pour avoir de l’argent ! On m’a demandé si je pouvais le faire imprimer, le vendre, en faire des reproductions… J’ai répondu que non, ça ne m’intéressait pas de faire ça parce que je trouvais ça déplacé. La démarche de base, était d’en faire un hommage aux victimes et aux familles, et ça aurait été vraiment déplacé d’en tirer profit.

euronews :
Mais vous avez quand même reçu des propositions de merchandising …

Benjamin Régnier :
Oui, j’ai eu des gens qui voulaient acheter le dessin ou des reproductions. Mais, non, je ne veux pas faire ça.

euronews :
Avez-vous vu des produits dérivés avec votre dessin ?

Benjamin Régnier :
Non, je n’en ai pas vu. Ce qui m’embêterait, c’est qu’on ne me demande pas l’autorisation. Ça m’ennuierait que quelqu’un en tire profit sans mon autorisation, qu’il y ait un usage mercantile alors que ce n’est absolument pas le but.

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