La Turquie à "un carrefour important" de son avenir européen

La Turquie à "un carrefour important" de son avenir européen
Par Euronews
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Les Turcs sont appelés aux urnes ce dimanche.

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Les Turcs sont appelés aux urnes ce dimanche. Près de 55 millions d‘électeurs vont se prononcer par référendum sur une révision de la constitution. Le texte prévoit de renforcer les compétences du président, qui rassemblerait alors l’essentiel du pouvoir exécutif, mais qui pourrait aussi se mêler au pouvoir judiciaire. Cette campagne référendaire a aussi provoqué une crise diplomatique entre Ankara et l’Union européenne. Après le refus de l’Allemagne et des Pays-Bas d’autoriser des meetings en faveur du “oui”, le président turc a évoqué des “pratiques nazies”. Les remarques de Recep Tayyip Erdogan ont provoqué une vague d’indignation au sein de l’Union européenne. Euronews a interrogé Marc Pierini, chercheur au Carnegie Europe.

Euronews:
“Les propos du président turc marquent-ils un point de non retour entre les deux partenaires ?”

Marc Pierini:
“C’est un pont qui a été détruit, mais qui a été détruit au niveau personnel, c’est à dire entre le président turc et ses homologues du Conseil européen. Je ne pense pas que la relation économique, financière, investissement, technologique, éducation avec la Turquie doive en souffrir, sauf si la Turquie choisissait de se couper totalement de l’Europe. Mais ce n’est pas ce qu’elle fait. La Turquie dit soigneusement que la relation économique doit continuer. Donc en fait on arrive non pas à un point de non-retour mais à un carrefour important. C’est à dire est-ce que le projet politique de la Turquie s’alignant sur des normes européennes fait encore un sens pour le pouvoir turc? A mon avis il n’en fait plus du tout.”

Euronews:
“Quelles seront les conséquences si Recep Tayyip Erdogan l’emporte lors de ce référendum?”

Marc Pierini:
“Alors, première conséquence c’est: pas de conséquence. C’est à dire le président est élu au suffrage universel depuis août 2014, 52%, il reste président jusqu‘à l‘élection de 2019. Deuxièmement le Parlement a été élu au 1er novembre 2015. L’AKP a une majorité et il la garde. Donc du point de vue du fonctionnement de l’État il n’y pas de conséquence directe, que ce soit “oui” ou que ce soit “non”. Ceci étant, si c’est “oui” on va tomber d’un système autoritaire de fait à un système autoritaire de droit, à une présidence absolue sans contre-pouvoir. Si c’est “non” c’est un camouflet pour le président mais en même temps le président a tous les pouvoirs aujourd’hui et il a l‘état d’urgence en plus”.

Euronews:
“Quel est l’enjeu pour l’Union européenne au lendemain du référendum?”

Marc Pierini:
“L’enjeu pour l’Union européenne c’est d’abord, avant et après le référendum, que la Turquie est un pays déstabilisé aujourd’hui, déstabilisé par un coup, un coup d’État manqué certes, mais on a bien vu que la purge a été extraordinairement large. Donc on n’est plus du tout dans la norme européenne. On y est déjà plus aujourd’hui alors forcément si le “oui” l’emporte on y sera encore moins. Et donc je crois qu’on va tout simplement, sauf autre accident, revenir à une relation beaucoup plus simple: la modernisation de l’Union douanière, et puis après probablement la coopération anti-terroriste, la coopération sur la Syrie vu la situation nouvelle qui se présente maintenant, la continuation de l’accord sur les réfugiés et ce genre de chose.”

Euronews:
“Qu’est-ce qui va advenir de la candidature d’adhésion de la Turquie au lendemain du référendum?”

Marc Pierini:
“Depuis la purge extensive qui a suivi le coup d’État, l‘état de droit en Turquie s’est effondré de telle façon que les critères politiques ne sont pas remplis. Donc la candidature flotte dans des eaux mortes et elle ne va pas très loin. Si on a un régime autocratique sans contre-pouvoirs qui se met en place juridiquement, la candidature est morte pour de bon. Ce qui est clair dans la situation actuelle c’est que les normes européennes, politiques surtout, sont en contradiction avec la conception du pouvoir qu’a le président turc. Et il le dit tous les jours. Et donc, ou on la déclare formellement morte ou on garde la négociation d’adhésion pour le principe en attendant des jours meilleurs”.

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