Masaya, nouvel épicentre des violences au Nicaragua

Masaya, nouvel épicentre des violences au Nicaragua
Par AFP
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Dans les rues de Masaya, de jeunes Nicaraguayens aux visages masqués par des cagoules et armés de mortiers artisanaux montent la garde derrière de multiples barricades, prêts à en découdre avec les hommes du président Daniel Ortega. Dans cette ville située à une trentaine de kilomètres au sud de la capitale Managua, les habitants affrontent jour et nuit les forces de l'ordre accompagnées de civils armés chargés de réprimer la vague de protestation lancée contre M. Ortega depuis fin avril dans tout le pays. Ces derniers jours, cette ville de 100.000 habitants sise sur les contreforts du volcan Masaya est devenue un véritable champ de bataille, théâtre de pillages, d'incendies et d'offensives des forces anti-émeutes qui ont fait au moins 10 morts depuis une semaine. Dans l'ensemble du pays, les violences ont déjà fait 121 tués et 1.300 blessés, selon un dernier bilan de l'ONG Centre nicaraguayen des droits de l'homme (Cenidh). A Masaya, tous les habitants semblent impliqués dans la logistique organisée autour des affrontements et des nombreuses barricades composées de troncs d'arbres, de meubles, de pavés et de ferraille. Beaucoup, comme ce jeune de 14 ans qui vient en aide aux infirmiers volontaires pour évacuer les blessés, ont mis leur vie en suspens pour se mêler à la lutte. "Normalement, les enfants n'ont pas leur place ici", concède-t-il au moment où des détonations retentissent du côté d'un commissariat voisin. Mais "on est tous dans la lutte. Le travail, le collège, tout ça est à l'arrêt", déclare-t-il sous couvert de l'anonymat. "Les gens de Masaya sont des combattants", clame Elias Mendoza, père de famille de 27 ans en ajustant son mortier derrière une barricade. "S'il le faut, on ira jusqu'à la guerre". - Cité symbole - Ce n'est pas la première fois que Masaya se trouve au centre d'une bataille décisive pour le pays. Ramona Garcia, 83 ans, se souvient de l'époque où elle alimentait des barricades similaires dans les années 1970, lorsque la ville avait pris fait et cause pour M. Ortega, alors en rébellion contre le régime du dictateur Anastasio Somoza. Masaya avait d'ailleurs joué un rôle crucial dans ce conflit en permettant aux guérilléros d'y trouver refuge après leur retraite de Managua le 27 juin 1979, jour désormais férié dans le pays. "A l'époque on combattait comme maintenant, apportant eau et nourriture sur les barricades", raconte cette femme menue au visage brun plissé. "Mais (Somoza) n'était pas comme celui-ci, il n'a pas tué autant de gens", clame-t-elle au sujet de celui qui, à 72 ans, domine la politique de ce petit pays d'Amérique centrale depuis la victoire des sandinistes en 1979. Masaya est aussi le berceau d'Augusto Sandino, dont la révolte contre l'occupation américaine dans les années 1920 a inspiré la guérilla d'Ortega. Mais aujourd'hui les habitants de Masaya fustigent Ortega, sa police et les milices à sa solde, accusés de pillages à répétition et d'avoir incendié à deux reprises son marché artisanal, source de revenus vitale pour beaucoup d'entre eux. - Les nerfs à vif - Sous la menace constante de franc-tireurs postés dans les commissariats, les habitants de Masaya vivent aussi dans la crainte de se trouver entre deux groupes de combattants. Zeneyda del Rosario, 34 ans, a déjà perdu son fils de 17 ans dans un échange de coups de feu. Depuis elle peine à trouver le sommeil, guettant les coups de cloche qui annoncent les offensives des forces de l'ordre. Zeneyda est terrifiée à l'idée de perdre son autre fils, de 14 ans. "Mes nefs sont constamment à vif à cause de tout ça", confie-t-elle. "Je n'en peux plus des +boum+ et des tirs de mortiers". Non loin de là, dans un hôpital de campagne improvisé à l'église San Miguel, un médecin de 51 ans se dit également hanté par le défilé des victimes, qu'il peine à soigner faute de matériel et de médicaments. "On ressent une forme d'impuissance en tant que médecin. On n'a pas l’équipement nécessaire. C'est un poste médical improvisé (...) et nos patients meurent souvent dans nos mains parce qu'on n'a pas ce qu'il faut pour les sauver. C'est très, très difficile. En fait c'est horrible", avoue-t-il. Pour couper l'afflux de renforts de policiers, l'opposition a barré mercredi la route entre Managua et Masaya, devenue "une cible de la dictature", selon l'ex-guérillera et dissidente du sandinisme au pouvoir, Monica Baltodano.

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