Les "camps de rééducation" en Chine au coeur d'un procès au Kazakhstan

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Une Chinoise jugée au Kazakhstan pour entrée illégale dans le pays a révélé l'existence de camps où des milliers de Kazakhs chinois seraient détenus, un sujet sensible pour les relations entre Astana et Pékin. De nationalité chinoise et d'ethnie kazakhe, Saïragoul Saouïtbaï, 41 ans, a voulu rejoindre au Kazakhstan son mari et ses deux enfants. Elle été arrêtée un mois et demi après avoir traversé illégalement la frontière. Mais son procès dans la ville kazakhe de Jarkent, près de la frontière avec la région chinoise du Xinjiang, a suscité l'attention pour d'autres raisons: Mme Saouïtbaï a affirmé avoir été détenue dans un "camp de rééducation" en Chine avec d'autres prisonniers d'ethnie kazakhe. "En Chine, ils appellent cela un camp politique. En réalité, c'est une prison dans les montagnes", a déclaré au tribunal Mme Saoutbaï, en affirmant que plus de 2.500 prisonniers d'ethnie kazakhe se trouvaient avec elle dans le camp où elle a été détenue. "Le fait que j'en parle dans une audience publique signifie que je suis en train de révéler des secrets d'Etat", a-t-elle ajouté, demandant aux autorités du Kazakhstan de ne pas l'expulser vers la Chine. - Répression chinoise - Depuis plusieurs années, le Xianjiang -- où les Ouïghours, musulmans turcophones, constituent la principale ethnie -- est le théâtre de violences dénoncées par Pékin comme des actes "terroristes" imputés à des mouvements séparatistes et islamistes. Contrairement aux Ouïghours, les personnes d'ethnie kazakhe, qui sont 1,5 million à vivre au Xinjiang, ont longtemps circulé librement entre la Chine et le Kazakhstan. En 1991, lors de l'indépendance de ce pays d'Asie centrale à la suite de la chute de l'URSS, 200.000 d'entre eux ont échangé leur nationalité chinoise contre un passeport kazakh. Cette relative liberté a disparu lorsque un responsable chinois connu pour sa politique de contrôle et de surveillance au Tibet a été placé en 2016 à la tête de la région autonome du Xianjiang, où il a lancé des programmes de rééducation pour les musulmans avec à la clé des arrestations massives. Fin 2016, les autorités chinoises ont confisqué aux ressortissants musulmans leurs passeports, une mesure inédite dans le pays, qui les oblige à faire une demande officielle pour quitter le territoire. Comme de nombreux autres personnes issues de l'ethnie kazakhe, Saïragoul Saouïtbaï a alors été séparée de son mari et de ses deux enfants qui, installés au Kazakhstan, ont obtenu il y a un an la nationalité kazakhe. Le passeport de Mme Saouïtbaï ayant été confisqué, traverser la frontière illégalement était la seule solution pour les revoir, a assuré à la cour son avocat, Abzal Kouspanov. "Nous ne disons pas qu'elle n'a pas commis un délit en passant la frontière avec de faux documents (...) Ce que nous disons, c'est: ne la remettez pas à la Chine. Si vous la renvoyez, cette personne va tout simplement disparaître", a déclaré M. Kouspanov. - Pression de Pékin - Ce procès a suscité au Kazakhstan une vague d'indignation concernant la situation des personnes d'ethnie kazakhe au Xianjiang, et provoqué l'embarras d'Astana. Riche en hydrocarbures, le Kazakhstan est un partenaire-clé de la Chine dans la région, notamment dans le cadre d'un gigantesque projet destiné à améliorer les routes commerciales entre l'Europe et l'Asie. Les investissements chinois au Kazakhstan pourraient se chiffrer en milliards d'euros. Dans ces conditions, critiquer Pékin est pour Astana un exercice délicat. Sous pression de l'opinion publique, le ministère kazakh des Affaires étrangères a néanmoins appelé à un "examen objectif et juste" de la détention de citoyens kazakhs au Xianjiang. De son côté, Pékin n'a pas commenté le cas de Saïragoul Saouïtbaï et les diplomates chinois venus assister à son procès ont refusé de répondre aux questions des journalistes. Pour Serkjan Mambetaline, un militant politique proche de l'opposition, cette affaire est un test "de la maturité des relations entre la Chine et le Kazakhstan". Peu importe la pression de Pékin pour qu'Astana extrade Saïragoul Saouïtbaï, estime ce militant: si le Kazakhstan remet un membre de sa diaspora à la Chine, "les gens diront que le gouvernement ne peut pas protéger son propre peuple".

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