Les Iraniennes de retour dans les stades de football

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Par Nathan Joubioux avec AFP
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Jeudi, 3 600 supportrices ont pu assister au match de football entre l'Iran et le Cambodge. Une première depuis 40 ans dans un pays leur ayant interdit l'entrée des stades "pour leur propre sécurité".

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Ce sont les visages heureux et épanouis des Iraniennes qui sont venus jeudi au stade Azadi, à Téhéran. Pour la première fois depuis 40 ans, les femmes ont pu soutenir l'équipe nationale de football masculine, lors du match de qualification pour la Coupe du monde entre l'Iran et le Cambodge.

Après la révolution islamique de 1979, les Iraniennes se sont vu refuser l'accès aux stades pour les compétitions de football, officiellement "pour les protéger de la grossièreté masculine".

Tickets à la main, les Iraniennes n’ont pas boudé leur plaisir, agitant drapeaux vert-blanc-rouge – les couleurs nationales – et immortalisant ce moment sur leur téléphone. Avant d’entrer dans l’enceinte du stade, les réactions étaient déjà nombreuses. "Nous sommes si heureuses et enthousiastes parce que nous n’avons pas pu voir ce rectangle vert depuis des lustres" explique Nastaran, sourire aux lèvres.

Officiellement, elles étaient 3 600. Mais selon un journaliste de l’AFP, 4 500 femmes ont pu entrer dans le stade. Anahita insiste sur ce point : "Je pense que c’est de la discrimination. Ils auraient dû réserver plus de sièges aux femmes, même si certains sont restés vides". A l'intérieur, les femmes ont été tenues à l’écart des hommes. Seulement 6 000 hommes sont venus assister à la rencontre, dans un stade pouvant accueillir jusqu’à 90 000 personnes.

Auparavant, les femmes devaient se déguiser en homme pour pouvoir assister à une rencontre. En septembre dernier, une fan, Sahar Khodayari, voulant assister à une rencontre de l’Esteghlal Téhéran Football Club, son club favori, s'est faite arrêter par les autorités. Craignant la prison à vie, elle avait préféré s’immoler. _"Trop de mauvaises choses se sont produites ; des filles sont venues ici et ont été arrêtées", _tient à rappeler Ayeh, une supportrice, drapeau sur le dos.

Toutes accusent la fédération iranienne d’avoir cédé à la pression de la FIFA, après que l’instance dirigeante du football mondial a menacé l’Iran d’exclusion de compétitions internationales. Mais les responsables iraniens insistent sur le fait que la décision d’admettre ces supportrices dans le stade a été prise sur la base des demandes des femmes, et non de pressions extérieures.

Dans un communiqué, la FIFA a qualifié cette soirée de "pas en avant très positif". "La FIFA regarde désormais plus que jamais vers un avenir où TOUTES les filles et femmes souhaitant assister à des matchs de football en Iran seront libres de le faire" ajoute le texte. Mais Téhéran n’a pas, jusqu’à présent, annoncé que les femmes pourront assister à l’avenir aux matchs du championnat ou à d’autres rencontres internationales en Iran.

Malheureusement, certaines personnes veulent faire le lien entre l'événement d'aujourd'hui et les pressions étrangères. Cette question avait déjà fait l'objet de discussions lors de réunions. Beaucoup de monde, dont certaines personnes religieuses, avaient des préoccupations, alors nous voulions les rassurer avec un plan.
Ali Rabi'ei
Porte-parole du gouvernement iranien

Jeudi, elles ont pu assister à la large victoire de leur équipe nationale, 14 à 0 sur celle du Cambodge. Mais l’enthousiasme aura clairement été de leur côté durant toute la partie. Elles se sont montrées bien plus bruyantes, colorées, motivées et festives que leurs homologues masculins.

Jugeant insupportable le quota imposé par les autorités, une campagne sur Twitter appelle à accorder davantage de sièges aux femmes avec le hasthag #WakeUpFifa ("Fifa, réveille-toi"). Amnesty International a qualifié pour sa part de "coup publicitaire cynique" la décision de n'autoriser qu'un "nombre symbolique de femmes" pouvant assister à Iran-Cambodge.

Sur Twitter, Ali Rabi’ei s’est malgré tout enthousiasmé : "Calme, discipliné, heureux, excité, sûr, égalitaire et élégant. Ainsi est le stade Azadi aujourd’hui avec la présence des filles et des femmes de notre nation !". A l’instar du président Hassan Rohani, le porte-parole du gouvernement est partisan de l’ouverture des stades aux femmes, mais se confronte aux ultra-conservateurs qui combattent farouchement cette mesure.

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