Uber : des VTC 100% féminins en réponse aux agressions sexuelles

Uber : des VTC 100% féminins en réponse aux agressions sexuelles
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Par Thomas Seymat
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Les témoignages de femmes victimes d'agressions lors d'un trajet réservé sur une plateforme de VTC par les conducteurs se multiplient dans l'Hexagone. Plusieurs entreprises proposent des véhicules exclusivement conduits par des femmes.

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Marlène Schiappa rencontre ce jeudi 12 décembre les dirigeants d’Uber pour “rendre des comptes” face à la "situation très préoccupante" des agressions sexuelles. La secrétaire d'Etat française chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes a indiqué que "lors de cette réunion, nous allons prendre au cas par cas les histoires qui [nous] sont remontées et parler, au global, de ce qui est mis en place pour les femmes qui utilisent Uber".

En France, Uber n'a pas communiqué de chiffre sur cette question, contrairement aux Etats-Unis où la firme a reconnu plusieurs milliers de cas en l'espace de deux ans. Mais les témoignages de jeunes femmes victimes d’agressions dans l'Hexagone, relayés par le hashtag #ubercestover ("Uber c’est terminé"), sont devenus viraux sur les réseaux sociaux.

Des entrepreneuses et des clientes n’ont pas attendu une réaction des pouvoirs publics ou des grandes plateformes de VTC, comme Uber, Bolt et Lyft, pour réagir. Leur alternative : des applications qui mettent en relation une clientèle avec des taxis ou des voitures de transport avec chauffeur exclusivement conduits par des femmes.

C’est le cas de Ladies Drivers, pour l’instant uniquement disponible en région PACA, dans le sud de la France. Cette application a été lancée et est dirigée par Laura Guido. Contactée par Euronews, elle explique : "Nous comptons aujourd'hui plus de 100 chauffeurs partenaires sur la plateforme, la plupart étant concentrée dans le Sud". Elle-même ancienne conductrice, l’idée lui est venue alors qu’elle passait l’examen VTC il y a 3 ans. "Je me suis vite rendue compte que nous étions seulement 3 ou 4 femmes sur plus de 100 candidats", nous confie-t-elle.

Etre transportée rassurée et en sécurité

Pour elle, la question de la sécurité est primordiale, prenant l'exemple "des problèmes dans les VTC ou les transports publics". Laura Guido poursuit : "J'ai eu l'idée de créer Ladies Drivers pour répondre à un vrai besoin de sécurité et pour féminiser le secteur du VTC"

C'est la même motivation derrière Femmeauvolant, lancée par Smahane Bouchlaghem en 2015 dans la région parisienne. A son lancement, "ce projet répondait à une véritable demande : beaucoup de mes amies lorsqu’elles rentraient tard le soir se disaient plus rassurées d’être véhiculées par une femme." Elle est aujourd'hui "affectée par les nombreux témoignages des femmes victimes de harcèlement sexuel" qui émergent. 

Sa plateforme, pionnière en France, compte aujourd'hui 200 conductrices - VTC ou taxis - dans la capitale et, à moindre échelle, dans plusieurs villes françaises. Elle est aussi de plus en plus utilisée par des familles et des pères isolés d'après la dirigeante et fondatrice, "p_reuve qu'ils ressentent, eux aussi, ce besoin d’assurance_."

Pour Laura Guido de Ladies Drivers, la médiatisation des agressions sexuelles par des conducteurs Uber illustre l’existence d’un vrai besoin – et aussi d’un marché. "Depuis le #Ubercestover nous avons reçu plus de 1000 messages. Certaines personnes nous ont suppliées d'ouvrir dans leur ville. C'est horrible à lire, et motivant à la fois. Nous allons faire en sorte de mobiliser le plus de chauffeurs femmes possible pour ouvrir très rapidement dans d’autres villes de France", assure-t-elle. "Nous ne faisons pas l’apologie du sexisme, nous répondant uniquement à un besoin existant", conclue Laura Guido.

La concurrence avec Uber reste rude

Ce secteur des voitures de transport avec chauffeuses connaît un essor certain avec ces entreprises, mais aussi Womendrive ou Kolett.

La concurrence s'accroît avec l'expansion du marché et certains services 100% féminin ont eu du mal à se faire une place. C'est le cas de l’application Simone Drive Her. Lancée fin janvier 2018 sur Android et iOs, elle proposait de mettre en relation clientes (et clients masculins) et taxis conduits, eux, exclusivement par des femmes. Limitée elle-aussi à une zone géographique, l’Île de France, Simone Drive Her mettait en avant le côté convivial et rassurant de la conductrice. Cette application avait reçu un écho positif dans la presse généraliste et féminine. Mais elle n’a pas trouvé le succès escompté et a dû cesser son activité après un peu moins d’un an d’existence. "J'ai fermé l'entreprise en début d'année 2019" nous explique Julia Paly, son ex-présidente et fondatrice, "faute d'activité". Simone Drive Her avait recruté "50 partenaires chauffeurs", contre les 300 espérées fin 2020. L'application avait également fédéré un millier de clients, selon les informations disponibles sur le profil Linkedin de Julia Paly.

Près de 6 000 agressions sexuelles dans des véhicules Uber en deux ans aux Etats-Unis

Le gouvernement français a ainsi souhaité rencontrer des représentants d'Uber après la publication par la compagnie, le 5 décembre dernier, d'un rapport sur la sécurité. Dans ce document sont ainsi référencées (page 59) 5 981 agressions sexuelles (attouchements, tentatives d'agression, viols) qui ont été rapportées par des utilisateurs ou des conducteurs Uber, ainsi que des tiers, entre 2017 et 2018 aux Etats-Unis. La compagnie américaine a précisé que cela ne représentait que "0,00002% des courses". Uber a ajouté : "bien que rares, ces signalements représentent tous une personne qui a partagé une expérience très douloureuse. Même un seul signalement serait un signalement de trop".

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