L'enfant juif et le "gosse de nazi" : une amitié réparatrice

Le sculpteur et dessinateur Koenraad Tinel (à gauche) et l''avocat et pianiste belge à la retraite Simon Gronowski (à droite) pose lors d'une interview le 24 février 2020
Le sculpteur et dessinateur Koenraad Tinel (à gauche) et l''avocat et pianiste belge à la retraite Simon Gronowski (à droite) pose lors d'une interview le 24 février 2020 Tous droits réservés Kenzo Tribouillard / AFP
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Par Laurence Alexandrowicz
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Depuis 8 ans ils sont amis. Le juif Simon Gronowski et le fils de nazi Koenraad Tinel ont souffert pendant la Seconde guerre mondiale : mais chacun dans un camp opposé. A 86 et 88 ans, ils délivrent un message de paix et de pardon.

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Leur amitié improbable a été couronnée cette semaine. Deux octogénaires belges ont reçu les titres de Docteur honoris causa des Universités libres de Bruxelles.

S'épaulant mutuellement, Simon Gronowski, 88 ans, et Koenraad Tinel, 86 ans, ont des destins liés, et pourtant si différents : Simon, le Juif, est un survivant de la Shoah. Koenraad se dit "gosse de nazi".

"Tu es plus qu'un ami pour moi, tu es mon frère", dit Simon.

"Je le sais. On s'appelle frères", lui répond Koenraad.

Dans l'atelier de Koenraad, sculpteur et dessinateur, les deux hommes racontent cette guerre à laquelle ils ne comprenaient rien ; ils avaient 9 et 11 ans.

Simon a eu la vie sauve, grâce à sa mère qui l'a poussé du train en route pour Auschwitz. Koenraad a choisi le dessin pour se décharger du fardeau de la collaboration.

"On s'est rencontré, je lui ai tendu la main, je lui dis 'Monsieur quand j'ai lu votre histoire [NDLR : L'enfant du 20e convoi, 2002] j'ai pleuré', alors il m'a répondu 'les enfants des nazis ne sont pas coupables' et c'était un très beau message pour moi, parce que ma famille était coupable, mais pas moi, explique Koenraad Tinel. Et ça m'a fait un énorme plaisir."

Le père de Koenraad n'a jamais éprouvé le moindre remord. Le frère de l'artiste, lui aussi engagé chez les nazis, a en revanche demandé pardon à Simon sur son lit de mort. Simon l'a pris dans ses bras, il avait rencontré cet homme dans une caserne belge avant le départ pour Auschwitz.

"J'ai quitté cette caserne de malheur pour me retrouver entre deux haies de militaires en armes casqués, avec fusils, son frère était là-dedans, c'était son rôle, raconte Simon Gronowski. Et il m'a conduit avec ces soldats dans le wagon de la mort. Et lui [NDLR : il montre Koenraad] demande à me voir, voilà, j'ai accepté. Et ça m'a fait beaucoup de bien."

Simon et Koenraad sont amis depuis huit ans. Dans leurs yeux brille l'intelligence, celle du coeur, et de l'esprit. Deux hommes qui sont un symbole de paix.

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