L'armée birmane réprime de plus en plus durement les protestations

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Par Euronews avec AFP
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Trois manifestants opposés au coup d'Etat en Birmanie ont été tués vendredi soir à Rangoun pendant que, dans tout le pays, des centaines de personnes bravaient le couvre-feu lors de veillées à la mémoire des dizaines de morts tombés depuis que l'armée a pris le pouvoir.

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Trois manifestants opposés au coup d'Etat en Birmanie ont été tués vendredi soir à Rangoun pendant que, dans tout le pays, des centaines de personnes bravaient le couvre-feu lors de veillées à la mémoire des dizaines de morts tombés depuis que l'armée a pris le pouvoir.

L'armée réprime de plus en plus durement les protestations quotidiennes contre la prise du pouvoir par une junte militaire qui a renversé le 1er février le gouvernement civil d'Aung San Suu Kyi. La répression a fait au moins 70 morts, selon des experts de l'ONU.

"Il y a de plus en plus de preuves" que l'armée et ses plus hauts dirigeants "commettent probablement des crimes contre l'humanité, y compris des meurtres, des disparitions forcées, des persécutions, des tortures et des incarcérations en violation des règles fondamentales du droit international", a accusé jeudi devant le Conseil des droits de l'homme à Genève Thomas Andrews, le principal expert indépendant mandaté par les Nations unies sur ce dossier.

Des centaines de milliers de personnes continuent néanmoins de se rassembler dans tout le pays pour réclamer le retour de la démocratie et la libération de la prix Nobel de la paix. Elle n'a plus été vue en public depuis son arrestation lors du putsch et doit être présentée à un tribunal lundi.

La répression se voit en plein jour contre les manifestations mais la nuit, les forces de sécurité patrouillent les rues et procèdent à des arrestations, selon des témoins.

Des images vidéo partagées vendredi soir sur les réseaux sociaux montrent des policiers attrapant en pleine rue trois habitants du quartier de Thaketa à Rangoun, capitale économique du pays. Ils les frappent à la tête puis les emmènent.

"Ils les battent sans raison", déclare la personne qui filme ces images, vérifiées par l'AFP.

Des habitants se sont alors rendus au commissariat pour protester et des tirs ont ensuite pu être entendus dans le quartier, notamment par un reporter de l'AFP.

Deux tués par balle

"Les forces de sécurité ont arrêté trois jeunes hommes et, alors que nous les suivions pour les récupérer, nous ont fondu dessus", raconte samedi un habitant sous couvert de l'anonymat. Selon lui, "deux ont été tués - l'un d'une balle dans la tête et l'autre d'un tir entré dans la joue vers le cou" et les habitants ont dû attendre que la police cesse de tirer pour aller chercher les corps.

Des images authentifiées par l'AFP montrent les cadavres des deux hommes, tous deux partisans de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) d'Aung San Suu Kyi, reposant à leur domicile, parsemés des pétales de fleurs déposés par leurs proches endeuillés.

Les médias birmans indépendants Democratic Voice of Burma (DVB) et Khit Thit Media ont confirmé ces décès.

"Tout le monde disait de ne pas sortir et rester à la maison", confie l'épouse de Si Thy, l'un des deux hommes tués âgé de 37 ans. "Mais lui disait qu'il devait sortir à cause des trois jeunes arrêtés au commissariat". En pleurs, elle ajoute : "nous avons longuement attendu son retour".

A Hlaing, autre quartier de Rangoun, les habitants sont sortis pour protester contre la présence de policiers et soldats.

"Les habitants ne voulaient pas qu'ils viennent dans le quartier pendant la nuit pour arrêter des gens", raconte à l'AFP l'un d'eux qui souhaite garder l'anonymat. "Nous voulions les faire partir".

Les habitants ont lancé des cocktails Molotov contre les forces de sécurité, "les policiers et les soldats ont utilisé des grenades étourdissantes pour nous disperser" et "quatre personnes ont été blessées".

Son récit est confirmé par un autre témoin. Des images circulant sur les réseaux sociaux, authentifiées par l'AFP, montrent des habitants s'abritant derrière des voitures pendant que retentissent des explosions avant d'aller chercher un homme en sang blessé par un tir à la tête.

Il s'agissait d'Aung Paing Oo, 18 ans, dont le frère Wai Lin Kyaw a confirmé la mort après des heures d'agonie durant la nuit. "Les médecins n'ont pas pu faire grand chose pour lui parce que sa tête avait éclaté", dit-il en sanglotant à l'AFP.

"Honorer les héros"

En soirée, des centaines de personnes se sont auparavant rassemblées dans tout le pays pour des veillées, ignorant le couvre-feu commençant à 20h00.

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A Rangoun, près du carrefour de Hledan devenu depuis des semaines un lieu de rendez-vous des manifestants, des protestataires se sont assis pour prier à la mémoire de ceux tués depuis le 1er février, avec des portraits de Suu Kyi et des bougies. Parmi eux, Thinzar Shunlei Yi explique à l'AFP vouloir "briser le couvre-feu et honorer les héros qui sont tombés".

Samedi matin à Rangoun, une foule de gens avec trois doigts levés en signe de résistance a accompagné jusqu'au crématorium le corps de Chit Min Thu, tué jeudi. "La révolution doit gagner", a lancé son épouse en larmes devant la foule scandant "que ton âme repose en paix".

Mardi, un membre de la LND, Zaw Myat Linn, est mort au cours d'un interrogatoire après son interpellation, selon l'Association d'assistance aux prisonniers politiques (AAPP).

Samedi, les médias étatiques ont assuré qu'il était décédé après avoir "sauté" depuis une maison, mettant sévèrement en garde ceux qui donneraient une autre version.

La junte nie toute implication dans la mort de civils.

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Washington a annoncé vendredi offrir une protection temporaire pour 18 mois aux Birmans résidant aux Etats-Unis.

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