Joe Biden s'apprête à reconnaître le génocide arménien selon plusieurs médias américains

À gauche, Joe Biden à Washington le 22 avril 2021 lors du sommet sur le climat ; à droite,  Recep Tayyip Erdogan à Ankara après une réunion ministérielle le 14 décembre 2020
À gauche, Joe Biden à Washington le 22 avril 2021 lors du sommet sur le climat ; à droite, Recep Tayyip Erdogan à Ankara après une réunion ministérielle le 14 décembre 2020 Tous droits réservés AP Photo
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Par Stephane HamalianEuronews avec AFP
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Selon plusieurs médias américains, Joe Biden s'apprête à reconnaître le génocide arménien ce samedi, au risque de détériorer des relations déjà tendues avec le président Erdogan.

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Joe Biden s'apprête à reconnaître officiellement le génocide arménien, au risque d'une détérioration des relations déjà tendues avec le président Recep Tayyip Erdogan, qui a d'ores et déjà mis en garde ceux qui propagent un "mensonge".

Le président démocrate devrait faire cette annonce le 24 avril, date qui marque le début des massacres d'Arméniens par l'Empire ottoman en 1915, pendant la Première Guerre mondiale, selon le New York Times et le Wall Street Journal qui ont été les premiers à annoncer la nouvelle mercredi soir.

"J'ai appris que le président Biden avait l'intention de faire reconnaître par les États-Unis le génocide arménien, devenant le premier président américain à le faire", a confirmé jeudi le chef de la majorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer.

"C'est une excellente nouvelle. C'est une décision qui a mis longtemps à venir et que j'ai appelé plusieurs présidents des deux partis à prendre", a-t-il ajouté.

La porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki n'a pas démenti. "Ce sujet intéresse beaucoup, mais je ne vais pas parler avant le président et je n'ai rien d'autre à apporter", s'est-elle contenté de dire.

Le génocide arménien est reconnu par une trentaine de pays et la communauté des historiens. Selon les estimations, entre 1,2 million et 1,5 million d'Arméniens ont été tués pendant la Première Guerre mondiale par les troupes de l'Empire ottoman, alors allié à l'Allemagne et à l'Autriche-Hongrie. Mais Ankara refuse toujours l'utilisation du terme "génocide" et récuse toute velléité d'extermination, évoquant des massacres réciproques sur fond de guerre civile et de famine ayant fait des centaines de milliers de morts dans les deux camps.

Malgré des années de pressions de la communauté arménienne aux États-Unis, aucun président américain ne s'est encore risqué à fâcher Ankara, allié historique de Washington et membre de l'Otan.

Hier les Arméniens, aujourd'hui les Ouïghours

Mais pendant sa campagne électorale, Joe Biden avait promis qu'il le ferait. "Nous ne devons jamais oublier ni rester silencieux sur cette horrible et systématique campagne d'extermination", soulignait-il le 24 avril 2020 dans un communiqué. "Si nous ne reconnaissons pas pleinement le génocide, si nous ne le commémorons pas, si nous ne l'enseignons pas, les mots «plus jamais» ne veulent plus rien dire", ajoutait-il.

L'élu démocrate Adam Schiff a exhorté mercredi M. Biden à tenir sa promesse, rappelant les accusations de génocide contre les Ouïghours en Chine. "C'est une question très contemporaine", a-t-il dit à une chaîne locale de Los Angeles, où vit une importante communauté arménienne. "Et si nous ne reconnaissons pas un génocide qui s'est produit il y a un siècle, qu'est-ce que ça montre de notre volonté de nous opposer au génocide qui se produit aujourd'hui ?"

Le Congrès américain a déjà reconnu le génocide arménien en décembre 2019, un texte qui avait été défendu par des parlementaires des deux bords mais qui avait été bloqué à plusieurs reprises par des alliés républicains de Donald Trump.

M. Trump a qualifié le massacre des Arméniens en 1915 d"une des pires atrocités de masse du XXe siècle", se gardant d'employer le terme de "génocide".

L'annonce de M. Biden n'aura pas de portée légale, mais elle ne peut qu'aggraver les tensions avec une Turquie que le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a qualifiée de "soi-disant partenaire stratégique" qui "par de nombreux aspects ne se comporte pas comme un allié".

Mise en garde de la Turquie

Sans citer les Etats-Unis, le président turc Recep Tayyip Erdogan a adressé une mise en garde voilée à ce sujet jeudi. Lors d'une réunion avec des conseillers jeudi, M. Erdogan "a indiqué qu'il continuerait de défendre la vérité contre ceux qui soutiennent le mensonge du soi-disant génocide arménien (...) à des fins politiques", a déclaré le président turc.

Les sujets de friction entre les deux dirigeants sont nombreux.

Le mois dernier, le président américain s'est dit "profondément déçu" du retrait annoncé par la Turquie d'une convention du Conseil de l'Europe sur la protection des femmes. Quelques jours plus tôt, Erdogan avait jugé "inacceptables" les propos de M. Biden qualifiant Vladimir Poutine de "tueur", et louant la réponse pleine de "classe" du président russe pour lequel il ne cache pas son admiration.

Autre sujet de tension, celui de l'achat par Ankara de missiles russes S-400, que Washington juge incompatibles avec les systèmes de défense de l'Otan. Les Etats-Unis ont exclu la Turquie du programme de fabrication du chasseur furtif de dernière génération F-35 et l'administration Biden "poursuit le processus d'exclusion" d'Ankara, a indiqué mercredi à l'AFP Jessica Maxwell, une porte-parole du Pentagone.

"En tant que partenaires, en tant qu'alliés, lorsque nous avons des désaccords nous le pointons du doigt, nous en discutons et nous ne les éludons pas", a expliqué jeudi le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price.

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