Felix Sosso : "Les étudiants sont dans une précarité structurelle"

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Par Valérie Gauriat
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Felix Sosso est le porte-parole de la Fédération des Associations et Groupements Etudiants (FAGE) de France. Au micro de Valérie Gauriat, il fait le point sur l’aggravation de la précarité des étudiants, et préconise une réforme en profondeur des dispositifs d’aide aux étudiants.

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Felix Sosso est le porte-parole de la Fédération des Associations et Groupements Etudiants (FAGE) de France. Au micro de Valérie Gauriat, il fait le point sur l’aggravation de la précarité des étudiants, et préconise une réforme en profondeur des dispositifs d’aide aux étudiants.

Felix Sosso :

« La crise n'a fait qu'exacerber une grosse problématique de précarité qui était déjà présente auparavant. Ce qu'on a observé pendant la crise, c'est qu'il y a un nouveau public qu'on a, nous, rencontré dans les épiceries sociales lors des distributions, et qui est plutôt des étudiants de classe moyenne ou des étudiants qui ont perdu leur job à cause des confinements successifs.

Et c'est un public qui est resté précaire après la crise sanitaire, et en l'occurrence en début d'année, on est face à une très forte inflation sur les produits alimentaires et sur l'énergie, ce qui met beaucoup d'étudiants en difficulté alors qu'ils étaient déjà auparavant. Et on est face à une situation de précarité structurelle, structurelle qui est vraiment visible, et qui s'accentue, avec une inflation qui n'est pas suivie par une augmentation des minimas sociaux ou même des bourses pour les étudiants et une conjoncture qui devient de plus en plus difficile.

Valerie Gauriat :

On a une idée de ce que ça représente ? Les étudiants qui sont sous le seuil de pauvreté aujourd'hui ?

Felix Sosso :

« Aujourd'hui, on a 20 % des étudiants qui vivent sous le seuil de pauvreté, ce qui est un chiffre assez alarmant. Si on peut donner un autre chiffre pour suivre un peu l'évolution du coût de la vie pour un étudiant cette année, comme tous les ans d'ailleurs, la FAGE édite un indicateur du coût de la rentrée et on a eu une augmentation début septembre, sachant que c'est plus actuellement, du coût de la rentrée pour étudiants de 16,38 %.

Ce qui signifie qu'un étudiant va débourser presque 10 % de plus par rapport à l'année dernière sur ses finances pour pouvoir étudier dans de bonnes conditions. Ce qui nous apparaît aussi assez alarmant, puisque 10 %, ça représente, sur un budget étudiant, en fait la partie qui est déjà généralement contrainte, c'est à dire l'alimentation, c'est à dire qu'on a des jeunes, des étudiants qui vont sauter des repas, qui vont renoncer à se chauffer l'hiver pour pouvoir continuer à étudier et vivre dans des conditions qui ne sont plus bonnes, de fait.

Valerie Gauriat :

« Le gouvernement a pris un certain nombre de mesures. Il y a eu l'annonce d'une enveloppe de 10 millions supplémentaire d'aide qui va être débloquée. Il y a eu d'autres, d'autres aides qui ont été, qui ont été débloqués en automne. Ce n'est pas suffisant? »

Felix Sosso :

« On va pouvoir saluer l'action du gouvernement sur certains points. Mais on ne va pas non plus féliciter l'inaction sur l'ensemble de ce qui concerne les plus des réformes structurelles. En l'occurrence, on a un empilement de mesures palliatives qui n'ont jamais eu et qui n’ont pas de toute façon vocation à résoudre la précarité étudiante. Effectivement on a eu l'élargissement du ticket Restaurant Universitaire à 1 €. Encore faut-il rappeler qu'avec l'augmentation de la fréquentation des restaurants universitaires depuis le début d'année, qui a augmenté de presque 20 %, le service à l'étudiant est dégradé et les étudiants les plus précaires s'en trouvent le plus lésés, finalement. On a eu une revalorisation de 4 % des bourses qui n'atteint même pas le seuil de l'inflation.

Donc il va falloir qu'on se réveille un petit peu et qu'on considère qu'il va falloir prendre des mesures plus systémiques. Repenser le système d'aide sociale à l'étudiant. Au niveau du logement aussi, il va y avoir des choses à entreprendre puisque le logement actuellement, c'est 50 % des dépenses d'un étudiant. Et avec une inflation sur le marché locatif, il va falloir qu'on réfléchisse à des solutions plus pérennes que des petites revalorisations par ci par là, qui n'ont, encore une fois je répète, jamais, jamais eu vocation à résoudre le problème dans son ensemble.

Cette aide de 10 millions dont il est question, c'est une aide qui a vocation à être utilisée par les associations étudiantes pour faire de la distribution alimentaire. Il faut quand même rappeler que ce n'est pas le rôle des associations étudiantes de solutionner la précarité étudiante et que ça ne doit pas reposer sur leurs seules épaules.

On a des bénévoles, des étudiants qui sont engagés, qui mettent en danger leurs études en péril, leur avenir, pour solutionner un problème qui devrait être pris en main par les pouvoirs publics. »

Valerie Gauriat :

Quelles sont les propositions concrètes que vous pouvez faire?

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Felix Sosso :

Nous, on appelle à une réforme structurelle du système d'aide sociale étudiant, le système de bourses. C'est déjà une promesse pendant le premier quinquennat d'Emmanuel Macron. Elle a été réitérée en amont de sa réélection. En fait cette réforme, il faut qu'elle se calque sur les besoins de l'étudiant, les revenus des étudiants et pas sur la situation familiale qui est généralement un mauvais indicateur de ce qui est vécu par l'étudiant.

Il faut aussi qu'on adapte l'aide en fonction de la région. Pour les étudiants, les besoins des étudiants à Paris ne sont pas les mêmes que ceux d'un étudiant à Bordeaux, par exemple. Et au-delà de ça, il ne faut pas qu'on ait un système par paliers qui va faire que pour une différence de 100 € de revenus, on a une différence de 100 € par mois de bourses entre les deux étudiants/étudiantes. Et plus largement, en fait, il faut élargir le plateau parce qu'on n'a pas suffisamment d'étudiants qui peuvent bénéficier des bourses sur critères sociales.

Les revenus des aides sont beaucoup trop, trop faibles. Ce qu'il faudrait penser, c'est un seuil à partir duquel on estime que les étudiants ne peuvent pas vivre dans de bonnes conditions. Alors, il y a le seuil de pauvreté, qui est un indicateur assez critiquable mais qui pourrait être une bonne base déjà.

Considérer qu’au-dessous de ce seuil-là, on ne peut pas étudier dans les bonnes conditions. L'idée, c'est de venir combler avec ce système de bourses là, en fonction des aides et des pensions déjà existantes et déjà dans les recettes mensuelles de l'étudiant, combler avec un système de bourses universelles qui permettrait à chaque jeune de pouvoir s'émanciper et de vivre dans les bonnes conditions et de faire ses propres choix sans dépendre non plus des aides familiales ou de devoir se salarier de manière contrainte, puisque ça aussi, c'est un vrai souci. Au-delà de 12 h par semaine, on sait que cela a impact sur les études, c'est un des premiers facteurs de décrochage scolaire. Il ne faut pas qu'on ait de contraints ni de dépendance aux choix familiaux.

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