Maldives : l'archipel sera-t-il sous les eaux en 2100 ?

Les 200 îles habitées des Maldives pourraient être submergées d'ici 2100, selon les experts du changement climatique.
Les 200 îles habitées des Maldives pourraient être submergées d'ici 2100, selon les experts du changement climatique. Tous droits réservés Getty Images
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Par Ben Anthony HortonAlixan Lavorel
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L'inaction climatique pourrait signifier une "condamnation à mort" pour les nations insulaires comme celle des Maldives.

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Les Maldives sont un paradis tropical aux plages d'un blanc immaculé et aux récifs coralliens spectaculaires, mais elles pourraient disparaître d'ici la fin du siècle.

C'est le verdict du ministre de l'environnement du pays, Aminath Shauna, qui affirme que si des mesures urgentes ne sont pas prises pour enrayer la crise climatique, l'archipel de l'océan Indien, composé de plus de 1 000 îles, pourrait être totalement submergé d'ici à 2100.

"Le changement climatique est réel et nous sommes le pays le plus vulnérable au monde", déclare Shauna. "Il n'y a pas de terres situées sur les hauteurs. Il n'y a que nous, nos îles et la mer."

Se battre pour survivre à la crise climatique, tout en dépendant d'un secteur qui y contribue.

En effet, le pays se trouve à une altitude moyenne de seulement un mètre au-dessus du niveau de la mer, ce qui fait que l'élévation des océans et les conditions météorologiques imprévisibles constituent une menace imminente pour la vie sur ces atolls coralliens.

Si la survie même des Maldives dépend de la limitation des effets du changement climatique, la majorité des 540 000 habitants du pays font du tourisme leur principale source de revenus.

L'industrie du voyage produit environ 8 % des émissions annuelles de CO2 dans le monde, un chiffre qui devrait augmenter de 4 % chaque année.

C'est ce qui explique le paradoxe auquel sont confrontés les habitants des Maldives d'aujourd'hui : se battre pour survivre à la crise climatique, tout en dépendant d'un secteur qui y contribue.

James Ellsmoor, directeur général d'Island Innovation, un réseau mondial qui contribue au changement durable dans les communautés insulaires, explique : "Si le tourisme n'est pas le revenu national, d'où vient-il?"

"Si tout le monde s'accorde à dire que c'est un problème de dépendre du tourisme, il n'y a pourtant pas assez d'alternatives viables. Je pense que ces endroits se tournent vers l'intérieur et voient ce qu'ils peuvent faire pour réduire l'impact du tourisme, dont ils dépendent si fortement."

Une crise existentielle

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Les hôteliers adoptent des méthodes plus écologiques pour accueillir leurs clients.Getty Images

Alors que l'avenir des Maldives est en jeu, il n'est pas étonnant que certains hôteliers adoptent des moyens plus écologiques pour accueillir leurs clients.

"Il y a 36 ans, Villa Hotels Resorts a été fondé avec une idée de durabilité en tête", explique Khadheeja Sana, porte-parole du resort des Maldives.

"Aujourd'hui, nous sommes très fiers de montrer la voie en maintenant et en promouvant la durabilité, la conservation et la préservation."

L'une des solutions écologiques proposées aux visiteurs de la station est le restaurant "Zero" - une initiative de la ferme à la fourchette qui promet des kilomètres alimentaires négligeables à chaque repas.

"Les clients peuvent choisir des produits biologiques provenant de nos fermes locales, les faire préparer par un chef professionnel et les déguster immédiatement", explique Ibrahim Aleef, hôte de l'île.

"Nous choisissons également à la main certains ingrédients dans ces fermes, comme la laitue, le fruit de la passion et bien d'autres encore."

Juste au coin du jardin, une usine d'embouteillage recycle les récipients en verre pour les utiliser dans le complexe de vacances.

"Nous préparons plus de 2 000 bouteilles pour les distribuer dans nos chambres et nos installations", ajoute Aleef. "En faisant cela, nous réduisons considérablement le besoin de bouteilles en plastique sur l'île".

Ces bouteilles sont ensuite remplies d'eau de pluie purifiée, un processus qui permet de produire de l'eau potable pour les clients et les habitants.

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Le corail se meurt

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Plus de 60 % des coraux des Maldives ont déjà été blanchis.Getty Images

Des mesures comme celles-ci offrent des solutions pratiques pour compenser les émissions de CO2 de l'île. Mais pour de nombreux habitants, la question demeure : est-ce vraiment suffisant ?

Outre l'élévation du niveau de la mer, l'augmentation de la température des océans a également un impact sur la vie de la nation insulaire.

Les Maldives comptent environ 2 500 récifs coralliens, ce qui en fait l'écosystème dominant de l'archipel.

Lorsque la température des océans augmente, les algues symbiotiques du corail deviennent blanches, un processus appelé blanchiment. Ce phénomène peut avoir des conséquences désastreuses pour la vitalité de l'ensemble du récif.

Selon un rapport du Guardian, plus de 60 % des coraux des Maldives ont déjà été blanchis.

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Les Maldives consacrent actuellement 50 % de leur budget national aux efforts d'adaptation au changement climatique.

"En tant qu'habitant, je suis inquiet pour la santé de nos récifs et de la vie marine", déclare Ismail Hisham, un résident de l'atoll de Baa.

"Je suis très fier de la beauté de notre corail, mais en même temps, nous devrions le protéger pour les générations à venir."

Ce sentiment est partagé par les experts, qui travaillent dur pour conserver le huitième plus grand écosystème de récifs coralliens au monde.

"Ce que nous espérons réaliser, c'est d'essayer de préserver autant de biodiversité que possible", explique Aya M Rahil, biologiste marin au Coral Institute des Maldives.

"Nous voulons essayer de restaurer les zones que nous ne pouvons pas protéger et nous espérons être en mesure de maintenir la biodiversité à l'avenir également."

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Les Maldives consacrent actuellement 50 % de leur budget national aux efforts d'adaptation au changement climatique, comme la construction de digues pour protéger les récifs coralliens.

Rien qu'en 2019, 1,7 million de personnes ont visité l'archipel, contribuant à plus de 56 % du produit intérieur brut (PIB) de la nation.

Mais la pandémie de coronavirus a entraîné de graves conséquences économiques, décimant l'industrie du tourisme et réduisant l'économie de plus d'un tiers.

"Le grand problème de ces deux dernières années était qu'une si grande partie du revenu national dépendait du tourisme", explique James Ellsmoor.

"Avec une telle quantité de revenu national provenant du tourisme, il n'y avait plus d'argent pour répondre à la crise climatique."

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Les Maldives pourraient-elles tout perdre ?

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L'archipel de l'océan Indien, qui compte plus de 1 000 îles, pourrait être submergé d'ici 2100.Getty Images

Aujourd'hui, la nation tente de rajeunir son industrie primaire, tout en continuant à encourager une approche plus durable des voyages et du tourisme.

"Dans dix ans, notre vision est de voir un monde où les gens et la nature vivent en parfait équilibre et en harmonie", déclare Khadheeja Sana.

"Un monde où les gens apprennent à respecter mère nature. Un monde où nos enfants verront des meilleures Maldives. Je veux que mes enfants jouent sur les mêmes plages, profitent des mêmes jardins tropicaux où j'ai grandi. C'est mon rêve."

Mais si l'optimisme est de mise, la réalité de la crise climatique en cours parle d'elle-même.

L'accord de Paris de 2015 sur le climat visait à limiter la hausse des températures mondiales à plus de 1,5 degré Celsius par rapport aux niveaux enregistrés à la fin du XIXe siècle.

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Mais un rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat affirme que le monde est en passe de dépasser cet objectif d'ici à 2030 - bien plus tôt que prévu initialement.

"C'est une question existentielle pour nous et ce dont nous avons besoin, c'est que la température reste inférieure à 1,5 degré Celsius", déclare Rahill.

"Même à deux degrés Celsius, les prévisions indiquent que 99 % des coraux mourront dans le monde. Pour les Maldives, cela signifie que nous perdons nos moyens de subsistance, nous perdons notre sécurité physique, nous perdons nos terres, nous perdons tout."

Comme de nombreux citoyens, Rahil pense que l'avenir de son pays ne repose pas sur le tourisme durable - mais sur les dirigeants mondiaux qui ont le pouvoir d'instaurer le changement.

"Mon espoir est que les dirigeants fassent des changements drastiques dès maintenant et prennent cela comme une situation d'urgence, car cela ne va pas seulement nous affecter - cela va affecter le monde entier. C'est une question de vie ou de mort."

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Article traduit de l'anglais

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