Pourquoi ces 13 eurodéputés ont-ils voté contre la résolution sur l'invasion de l'Ukraine ?

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Par Orlando CrowcroftEuronews
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A une très large majorité le Parlement européen a dénoncé la guerre déclenchée par la Russie. Les parlementaires opposés à cette résolution expliquent leur choix.

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C’était un moment inhabituel au Parlement européen. Même derrière un écran le président ukrainien a réussi mardi à émouvoir l’hémicycle. Assis à une table en tenue militaire, Volodymyr Zelensky appelait les 27 à montrer leur soutien à son pays envahi par la Russie. Il demandait aussi au Parlement d'accorder le statut de candidat à Kyiv.

Son intervention a entrainé plusieurs ovations des élus qui arboraient les couleurs de l’Ukraine : le bleu et le jaune. Après son discours et un débat avec les différents responsables, les parlementaires se sont prononcés à une très large majorité, 637 en faveur, pour réclamer la fin de la guerre et pour condamner l’invasion déclenchée par le président russe Vladimir Poutine.

Toutefois 13 élus ont décidé de s’opposer à cette résolution non contraignante. Parmi eux Mick Wallace (GUE). L’élu de gauche radicale précise à Euronews qu’une "grande partie de la résolution est importante et nécessaire". L’Irlandais ajoute que le texte "condamne à juste titre l'agression russe et appelle à un soutien humanitaire pour l'Ukraine et les réfugiés ukrainiens. Ce sont des termes que nous soutenons de tout cœur."

Mais une grande partie de la résolution ne convient pas aux yeux de Mick Wallace comme l’appel au renforcement de la présence militaire de l'OTAN ou l’augmentation des dépenses en matière de défense ou encore le remplacement du pétrole russe par du pétrole américain extrait par fracturation hydraulique.

Ne pas entrer dans le cercle de l'escalade

"Nous avons cherché à retirer ces éléments de la résolution, mais la majorité du Parlement européen a voté pour les conserver. On nous demande maintenant de voter sur le texte dans son ensemble, qui inclut ces dispositions. Nous sommes opposés à la guerre, et nous sommes opposés à cette résolution", explique Mick Wallace.

Six autres membres de la gauche radicale ont également voté contre : Clare Daly, Özlem Demirel, Sandra Pereira, João Pimenta Lopes, Martin Schirdewan, Miguel Urban Crespo.

Toutefois il ne s'agissait pas de la position prise par l’ensemble de la Gauche unie (GUE). La co-présidente du groupe, la Française Manon Aubry, a soutenu la résolution.

Elle explique à Euronews que six amendements ont "considérablement amélioré le texte", notamment en ajoutant l'appel à un cessez-le-feu immédiat, à une plus grande implication des Nations Unies et de l'OSCE et à accueillir les réfugiés.

"J'ai cosigné le texte initial et voté le texte final en tant que co-présidente du groupe car je voulais envoyer un message politique clair dénonçant l'agression irresponsable de Poutine et pour soutenir le peuple ukrainien", ajoute-t-elle.

Virginia Mayo/AP
Intervention du président ukrainien devant le Parlement européenVirginia Mayo/AP

"D'autres délégations ont décidé de s'abstenir ou de voter contre le texte parce qu'elles voulaient insister sur le risque d'une guerre mondiale sur le continent si l'UE entre dans le cercle vicieux de l'escalade militaire", poursuit Manon Aubry.

Pour l’Irlandaise Clare Daly ce document "ne fera qu'aggraver la situation" car il appelle à augmenter la fourniture d'armes à l'Ukraine.

"La seule façon de mettre fin au conflit est de recourir aux pourparlers de paix et à la négociation. Envoyer davantage d'armes dans la situation ne fait que mettre de l'huile sur le feu", a déclaré Clare Daly à Euronews.

"Il est vraiment regrettable que l'OTAN, les Etats-Unis et l'UE ne soutiennent pas l'idée d'un accord de paix négocié au niveau international. C'est la seule solution. Ironiquement, il n’y a que les Chinois qui mettent cette idée en avant maintenant, mais c'est la seule solution."

L'eurodéputée allemande Özlem Demirel accuse la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, d'utiliser cette situation pour faire avancer un agenda plus large : transformer l'UE "en une union militaire tangible et puissante."

"Je pense qu'il est cynique d'abuser de la souffrance des Ukrainiens pour quelque chose comme ça. Les peuples d'Ukraine, d'Europe et du monde veulent vivre dans la paix et la sécurité sociale", insiste Özlem Demirel.

Miguel Urban Crespo précise que s’il "condamne totalement l'invasion de l'Ukraine par Poutine", la résolution ne fait qu'aggraver la situation. "Face à deux géants qui mettent sur la table de plus en plus d'armes, de missiles et qui commencent à menacer avec des armes nucléaires, la seule issue est d'exiger de prendre toutes les voies de la paix. Sinon, cela ne mènera qu'à la mort et à la destruction" explique-t-il.

Virginia Mayo/AP
Les drapeaux ukrainiens flottent aux côtés des drapeaux européensVirginia Mayo/AP

C’est par l’intermédiaire d’un porte-parole de la délégation allemande Die Linke que Martin Schirdewan s’est expliqué. La formation condamne l’invasion de la Russie car c’est une "violation flagrante du droit international", mais elle s’oppose à l'envoi d'armes à l'Ukraine.

"La livraison prévue d'équipements létaux à l'armée ukrainienne pour un montant de 450 millions d'euros signifie en fin de compte la rupture définitive avec la position commune des directives de l'UE sur les exportations d'armes, qui interdisent les exportations d'armes vers les zones de guerre et de crise. Ces exportations d'armes constituent une violation du tabou de la politique étrangère européenne", justifie Martin Schirdewan.

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Une guerre impérialiste

Certains opposants à la résolution développent un autre argumentaire.

Dans une déclaration, les eurodéputés (non-inscrits) Kostas Papadakis et Lefteris Nikolaou-Alavanos précisent que le Parti communiste grec (KKE) condamne "la guerre impérialiste qui est le résultat de la compétition impérialiste pour les sphères d'influence et les ressources productrices de richesses".

Le texte prend "la direction dangereuse de l'escalade de la compétition impérialiste avec des équipements militaires et des sanctions de l'UE et de l'OTAN", ajoutent-ils.

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