Accessibilité et handicap : premières avancées dans l'UE

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Par Efi Koutsokosta, Fanny Gauret, Dawid Krawczyk & Selina Schicker
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L'Union européenne a adopté des règles communes en matière d'accessibilité pour les personnes porteuses de handicap. Mais est-ce suffisant ? Nous avons recueilli le point de vue des premiers intéressés à Bruxelles, Varsovie et Hanovre.

Après dix ans de négociations, l'Union européenne a adopté le premier cadre législatif établissant des exigences communes : c'est ce que l'on appelle l'Acte européen sur l'accessibilité.

L'accessibilité est un prérequis pour exercer de manière égalitaire d'autres droits fondamentaux : l'accès au lieu de travail, à l'éducation, aux services publics, la liberté de circulation ou encore les loisirs. Aujourd'hui, 120 millions d'Européens sont porteurs de handicap, notamment du fait du vieillissement de la population dans son ensemble.

Chaque pays européen avait déjà sa propre législation en matière d'accessibilité, mais aujourd'hui, il faut compter avec une directive européenne : l'Acte législatif européen dédié à ce sujet.

Ce texte qui s'applique au marché intérieur des produits et services vise à supprimer les obstacles créés par des règles divergentes à l'échelon des États. Il concerne les smartphones, tablettes et ordinateurs, les distributeurs de billets et tickets, les télévisions et programmes télévisés, les services bancaires, les livres électroniques le commerce en ligne et les applications mobiles.

Les États membres ont jusqu'en 2022 pour appliquer cette directive : ce qui veut dire l'intégrer à leur législation.

Les associations de défense des droits des personnes handicapées voient dans l'adoption de cet Acte européen, une avancée historique.

Pour autant, c'est un processus long et les personnes porteuses de handicap que nous avons rencontrées en Pologne, Allemagne et Belgique nous ont dit qu'il reste encore beaucoup à faire pour leur garantir une accessibilité et des opportunités égalitaires.

Varsovie remporte un prix européen de l'accessibilité

Varsovie, huitième plus grande ville d'Europe, a été reconstruite après la Seconde guerre mondiale sans tenir compte de l'accessibilité pour tous. Mais les choses ont changé ces dernières décennies avec son développement rapide.

Konrad Rychlewski est développeur informatique et malvoyant. Même si des obstacles demeurent à travers la ville, il se réjouit de l'adaptation des transports publics.

"Il y a le métro, le nouveau tram, de nouveaux équipements au niveau des stations de tram et de métro," énumère-t-il. "La sécurité, c'est le premier avantage," poursuit-il, "l'augmentation du nombre de feux de signalisation dotés d'un signal sonore et le fait de pouvoir me déplacer de manière autonome et librement font que ma qualité de vie est quasiment équivalente à celle de n'importe quel citoyen."

Mais Konrad Rychlewski attend encore une amélioration des revêtements des trottoirs et une diminution de la place de la voiture.

Autre habitante de Varsovie, Katarzyna Bierzanowska est interprète à son compte. Pour elle, l'accessibilité est synonyme de meilleure intégration sociale.

"Pour moi, c'est vraiment plus facile d'accepter des missions parce que désormais, des conférences sont accessibles," se félicite-t-elle. "Cela me permet aussi d'être plus active en tant que militante, en tant que formatrice et simplement en tant que personne parce que comme ça, je peux voir mes amis dans différents endroits," dit-elle.

Nous retrouvons Konrad Rychlewski chez lui. Grâce à la technologie comme les logiciels lecteurs d'écran, il peut travailler, faire des achats et s'occuper de ses tâches financières et administratives de manière autonome. "Grâce à l'écosystème en ligne et à la plateforme internet de notre administration, on peut gérer la majeure partie - et peut-être la totalité - de notre vie quotidienne par nous-mêmes : c'est vraiment un grand progrès," estime-t-il.

L'accessibilité est un domaine dans lequel la ville dépense de plus en plus - pour un montant qui représente aujourd'hui des centaines de milliers d'euros chaque année - : elle adapte son système de transports, ses espaces publics et ses lieux culturels par exemple.

Malgré les efforts qu'il lui reste à faire, Varsovie a remporté le prix européen "Access City Award" 2020.

"C'est vraiment le fruit d'un gros travail mené sur trois décennies," assure Pawel Rabiej, maire-adjoint de Varsovie. "Toutes les constructions neuves de Varsovie doivent remplir les normes et être conçues de manière à ce qu'il n'y ait plus d'obstacles," précise-t-il.

"Nous voulons que Varsovie soit une ville pour tous et cela s'applique aussi aux personnes handicapées : nous voulons qu'elles puissent profiter intégralement du potentiel de Varsovie," insiste-t-il.

"À Bruxelles, je ne peux prendre le métro comme je veux"

À Bruxelles où nous rencontrons Nadia Hadad. Elle fait partie du conseil d'administration du Forum européen des personnes handicapées, une organisation qui défend leurs droits.

Nadia qui est tétraplégique travaille comme ingénieur. "L'Acte européen sur l'accessibilité qui est entré en vigueur a fait beaucoup pour le marché numérique, donc beaucoup pour les services en ligne," reconnaît-elle avant de tempérer : "Mais malheureusement, il manque encore des exigences concernant l'environnement bâti, les transports publics, les espaces publics et les distributeurs automatiques de billets."

"On ne voit pas beaucoup de progrès parce que l'infrastructure n'est pas si accessible, je ne peux pas prendre le métro comme je veux," regrette-t-elle. "Aujourd'hui, dans la capitale de Bruxelles, j'ai besoin que deux personnes m'accompagnent pour installer une rampe devant moi pour que je puisse accéder au métro et ces personnes doivent rester avec moi jusqu'à la station où je veux descendre pour à nouveau m'installer la rampe pour sortir," raconte-t-elle.

"Une honte qu'un pays comme l'Allemagne ne regarde pas la situation du marché de l'emploi pour les personnes handicapées"

Direction l'Allemagne et plus précisément Hanovre. Nous avons rendez-vous avec la première et unique femme handicapée à avoir été élue au Parlement européen : Katrin Langensiepen.

"Il y a très peu d'opportunités d'emploi pour les personnes porteuses de handicap," déplore-t-elle. "Souvent, les entreprises préfèrent payer la taxe compensatoire - la pénalité qui leur est appliquée - plutôt que de former ou d'embaucher une personne handicapée," assure-t-elle.

Les résolutions et législations existent au niveau européen, mais il en va aussi de l'engagement des États en la matière selon Katrin Langensiepen.

"Je trouve que c'est une honte," lance-t-elle, "pour un pays industrialisé riche ou alors, très prospère comme l'Allemagne qui dit être confronté à une pénurie de main-d'œuvre qualifiée et avoir une série de défis à relever sans regarder quelle est la situation du marché de l'emploi pour les personnes handicapées, pour les femmes porteuses de handicap."

Dans toute l'Europe, les personnes porteuses de handicap continuent de militer pour un quotidien sans obstacles.

Elles rappellent qu'au-delà des décisions politiques, lutter contre les préjugés, l'exclusion et le manque de visibilité dont ils font l'objet est l'affaire de tous.

Video editor • Sebastien Leroy

Sources additionnelles • Production : Fanny Gauret ; cameramen Bruxelles : Pierre Holland, Hanovre : Stefan Schroeder, Varsovie : Adrian Gniewkowski ; motion design : NEWIC

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