Comment l'UE aide-t-elle les réfugiés ukrainiens à accéder au marché du travail ?

En partenariat avec The European Commission
Natalia Voznyuk, réfugiée ukrainienne hébergée et travaillant dans un hôtel en Autriche, juin 2022
Natalia Voznyuk, réfugiée ukrainienne hébergée et travaillant dans un hôtel en Autriche, juin 2022 Tous droits réservés euronews
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Par Naomi Lloyd
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Les réfugiés ukrainiens ont le droit de vivre et de travailler dans l'UE pour une période pouvant aller jusqu'à trois ans, mais ils rencontrent d’importantes difficultés dans la recherche d'un emploi. Comment l'UE aide ces personnes à trouver un travail ?

Depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, plus de 7 millions d'Ukrainiens ont fui leur pays, mais on estime également que 2 millions d'entre eux sont rentrés chez eux.

La majorité des personnes ayant dû fuir la guerre sont des femmes, dont certaines ont la charge d'enfants en bas âge. Les réfugiés ukrainiens ont le droit de vivre et de travailler au sein de l'UE pour une période pouvant aller jusqu'à trois ans, mais ils rencontrent d’importantes difficultés dans la recherche d'un emploi : ils ne parlent pas toujours la langue, ils doivent s'occuper de leurs enfants, leurs qualifications ne sont pas forcément reconnues et ils peuvent souffrir de graves traumatismes liés à la guerre.

Pour cet épisode de Real Economy nous sommes allés en Autriche, à la rencontre de deux Ukrainiennes qui nous expliquent leur parcours pour trouver du travail.

Nous verrons également les solutions apportées par l'Union européenne pour aider les réfugiés ukrainiens entrés sur le territoire européen et ce que représente cet afflux de réfugiés pour le marché du travail et l'économie européenne ?

Les actions concrètes de l'UE dans l'intégration des réfugiés ukrainiens

L'UE soutient les réfugiés ukrainiens dans leur recherche d'un emploi en leur proposant des cours de langue et des formations. Elle a également publié un guide en ukrainien à l'intention des nouveaux arrivants sur les modalités d'accès au marché du travail.

  • L'Europass

La Commission européenne fournit aux pays des indications sur la manière d'aider les employeurs européens à comprendre et à reconnaître les compétences et les qualifications ukrainiennes.

Elle a aussi traduit en ukrainien l'Europass, qui est un outil permettant aux utilisateurs de créer un CV utilisable dans toute l'Europe.

  • L'outil européen de profilage des compétences

La Commission européenne encourage également tous les États membres à utiliser l'outil européen de profilage des compétences des ressortissants de pays tiers. Cet instrument permet de recenser les compétences, les qualifications et l'expérience professionnelle des réfugiés, des migrants et des ressortissants de pays tiers qui séjournent dans l'UE.

Il fournit également des conseils personnalisés sur les étapes ultérieures, notamment sur la manière de faire reconnaître leurs diplômes et sur les possibilités de formation complémentaire et d'aide à l'emploi. Il fera bientôt partie de la plateforme Europass.

L’Union va également lancer "le réservoir de talents européen", la première plateforme qui permet de faire correspondre les compétences des réfugiés ukrainiens aux offres d'emploi.

  • le réseau européen des services publics de l'emploi

Les services publics de l'emploi (SPE) jouent un rôle essentiel dans la mise en relation des compétences des Ukrainiens nouvellement arrivés avec les besoins du marché du travail. Dans certains pays, les SPE sont désormais présents dans les centres pour réfugiés afin de proposer leur aide et leur expertise.

Le réseau des services publics de l'emploi (SPE) de l'UE comprend les 27 pays membres de l'UE, ainsi que la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein et la Commission européenne.

L'objectif est de permettre aux services publics de l'emploi de chaque pays de partager les meilleures pratiques et de confronter leurs idées et expériences.

Le réseau européen des SPE a exprimé publiquement sa solidarité avec les Ukrainiens et son engagement à soutenir ceux qui fuient la guerre. Les États membres comme l'Allemagne, l'Autriche et la Suède ont partagé leurs expériences des crises de réfugiés précédentes.

Comment l'Autriche accompagne les réfugiés dans leur recherche de travail ?

En Autriche, un peu plus de 40 000 réfugiés ukrainiens ont fait le choix de rester avec leurs enfants dans le pays. Un permis de résidence temporaire leur permet de vivre et de travailler sur le territoire.

Mais quelles sont les opportunités professionnelles pour ces personnes, dont la majorité sont des femmes avec enfants, qui doivent construire une nouvelle vie ? Et comment s’organise le pays pour les aider ? 

Dans le sud du pays, dans la région de Carinthia, nous rencontrons Natalia Voznyuk, dans son pays elle était esthéticienne. Arrivée dans un centre pour réfugies, les dirigeants de l’hôtel lui ont offert un hébergement, et un travail.

"J'aime vraiment travailler ici. Nous avons signé un contrat jusqu'en septembre, puis je verrai en fonction de la situation en Ukraine", dit Natalia. 

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Natalia Voznyuk, réfugiée ukrainienneeuronews

Les Ukrainiens travaillent dans des secteurs d'activités dynamiques

En Autriche, le secteur du tourisme est dynamique : depuis 2019, le nombre de postes vacants dans l’hôtellerie et la gastronomie a doublé, et beaucoup d'employeurs ne trouvent pas de personnel.

C'est aussi le cas pour cet hôtel dont Alexandra Tiefenbacher est chargée du recrutement. Pour elle, il était naturel de proposer les chambres et postes vacants à des réfugiés ukrainiens pour la saison d’été. 

"Il y a maintenant entre 60 et 70 personnes qui vivent ici, et 29 d'entre elles travaillent pour nous dans différents domaines : dans la cuisine, dans le restaurant, au service d'entretien du bâtiment, et à la garde des enfants. Cela se passe plutôt bien. Il y a bien sûr la barrière linguistique, mais nous sommes capables de la gérer", explique Alexandra. 

Natalia parle quelques mots d’anglais, ce qui lui permet de communiquer avec ses collègues. Cependant, travailler et s’occuper de sa fille de 5 ans n’est pas toujours facile : 

"C’est parfois difficile. Il y a une salle de jeux pour enfants ici, mais elle n'est ouverte que jusqu'à 16h30. Si je travaille jusqu'à 23 h, je dois demander à quelqu'un de la garder."

Le problème de la reconnaissance des diplômes

En Autriche, d’autres secteurs comme la santé ou l’informatique manquent de personnes qualifiées. Même si la moitié des réfugiés ukrainiens enregistrés ici ont un diplôme universitaire, il est difficile pour eux d’accéder immédiatement à ces postes.

Parmi ces réfugiés nous retrouvons Ganna Zhygun, mère de 3 enfants, et professeure d’allemand. Elle est accompagnée dans un centre pour l'emploi dédié aux personnes réfugiées.

Ma principale préoccupation était de scolariser mes trois enfants. Et maintenant que j'ai réussi, je suis à la recherche d'un emploi", fait savoir Ganna qui aimerait travailler comme professeur d’allemand, mais, ici son diplôme n'est pas reconnu.

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Ganna Zhygun, réfugiée ukrainienneeuronews

"Mes diplômes doivent être traduits, reconnus et validés. C'est un véritable problème pour moi. Cela prend beaucoup de temps",ajoute-t-elle.

Face à ce problème des conseillers d'Itworks aident Ganna dans ses démarches :

"Nous les accompagnons lors des entretiens, nous assurons la traduction, et nous les aidons lorsque cela est nécessaire. Le but est de construire un grand réseau, de travailler ensemble avec tous les partenaires, afin de pouvoir aider le plus rapidement possible", explique Marjana Celebi, conseillère d'Itworks. 

Le défi de l'intégration des Ukrainiens

En attendant, Ganna, comme les autres réfugiés enregistrés dans le pays, bénéficie d’un revenu minimum et d’une couverture santé.

Comment l’Europe peut-elle relever le défi d’une intégration réussie des réfugiés ukrainiens ? Nous posons la question à Sandra Leitner, spécialiste des mouvements migratoires à l'Institut de Vienne pour les études économiques internationales.

"S'il s'agit uniquement de l'intégration sur le marché du travail, et si l'on fait abstraction de l'aspect culturel et des conséquences politiques, je pense que les vagues d'immigration précédentes nous ont beaucoup appris sur ce qui est vraiment important pour l’accès au marché du travail. A savoir la langue, l'éducation, et la reconnaissance des qualifications, et avec tous ces éléments en place, je pense que tout le monde peut être le bienvenu", explique la spécialiste de l'immigration. 

Entretien avec le président du réseau européen des services publics de l'emploi

Pour en savoir plus sur l'intégration des réfugiés ukrainiens, Naomi Lloyd de Real Economy s'est entretenue avec Johannes Kopf, président du Réseau européen des services publics de l'emploi, basé à Vienne.

Naomi Lloyd, Euronews : Vous êtes actuellement le directeur général du service public de l'emploi autrichien, mais aussi en charge du réseau européen des services publics de l'emploi. Comment gérez-vous cet afflux de réfugiés ukrainiens au niveau européen ?

Johannes Kopf, Président du Réseau européen des services publics de l'emploi : Le sujet a été abordé quelques jours seulement après le début de cette terrible guerre, lorsque nos collègues polonais ont formé le réseau pour que les premiers Ukrainiens qui arrivaient puissent trouver de l’aide. Et cela a conduit à une grande vague de solidarité au sein des services publics de l'emploi dans toute l'Europe. Il y a quelques états comme la Suède, l'Allemagne et l'Autriche qui ont acquis beaucoup d'expérience depuis la crise des réfugiés de 2015 et après. Comme gérer le processus de reconnaissance des compétences ou la manière d'organiser le transfert des compétences individuelles dans leur langue maternelle.

Naomi Lloyd : "Étant donné que l'on ne sait pas combien de temps cette guerre va durer, et que certains Ukrainiens veulent rentrer chez eux. Dans ce contexte, comment les intégrer dans le marché du travail en Europe ?"

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Johannes Kopf, président du réseau européen des services publics de l'emploieuronews

Johannes Kopf :"Actuellement, la plupart des personnes qui arrivent sont des femmes avec des enfants en bas âge, et elles ont des besoins différents, bien sûr. Mais l’un des plus importants c’est la garde d’enfant. C’est pourquoi l'Autriche doit prévoir suffisamment de places dans les écoles, et garderies. Alors que l'étape suivante est l'entrée sur le marché du travail. Bien sûr, il y a des postes vacants et des entreprises qui cherchent vraiment du personnel qualifié et qui ont maintenant l'espoir de trouver, par exemple, des experts en informatique ukrainiens. Mais je n'aime pas vraiment mélanger les sujets liés à l'asile ou aux réfugiés avec les besoins du marché du travail. Il est bien évidemment préférable d'intégrer toutes ces personnes plutôt que de leur verser simplement des prestations sociales. Mais avant toute chose, il ne faut pas oublier que c'est une question humanitaire."

Journaliste • Fanny Gauret

Sources additionnelles • PRODUCTION : LOUISE LEHEC, VIDÉO : SILVIA LIZARDO PRODUCTION, ÉQUIPE DE TOURNAGE : MATHIEU ROCHER, DANIEL SCHERRER, DANIEL ZANETTI, HUMAM SAMAKEH, MOTION DESIGN : NEWIC

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