Comment le monde de l’enseignement s’adapte à ChatGPT

Pour les experts, le monde de l’enseignement doit revoir ses méthodes pédagogiques face aux performances de ChatGPT.
Pour les experts, le monde de l’enseignement doit revoir ses méthodes pédagogiques face aux performances de ChatGPT. Tous droits réservés Canva
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Par Oceane Duboust
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ChatGPT, cet outil qui peut générer un texte argumenté en quelques secondes n’a pas tardé à être utilisé par les élèves. Pour les experts, le monde de l’enseignement doit revoir ses méthodes pédagogiques.

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Est-ce la fin des devoirs à la maison ? La peur du plagiat indétectable force les enseignants à s’interroger sur les méthodes d’apprentissage et d’évaluation alors que fleurissent de nouveaux outils comme ChatGPT.

ChatGPT, ami des élèves et ennemi des profs ?

Pour l’expliquer de manière schématique, ChatGPT est un algorithme développé par l’entreprise OpenAI. Nourri à l’intelligence artificielle, il est capable de générer en quelques secondes un texte de la longueur désirée, dans le style voulu et ce, dans plusieurs langues.

Un texte d’une qualité suffisante pour impressionner les enseignants du secondaire, du supérieur et même les chercheurs. “Jeune ou pas jeune, on est tous bluffé. On est ainsi surpris de voir comment il répond de manière assez rapide et relativement pertinente,” décrit Cécile Cathelin, enseignante dans un lycée de Tours en France.

Cependant, l’admiration a rapidement débouché sur une levée de boucliers. Les écoles des villes américaines de New York et de Seattle ont ainsi pris la décision ces dernières semaines d’interdire son utilisation. De son côté, Cécile Cathelin assure que 80 à 90 % de ses collègues sont plutôt opposés à ces générateurs de texte et les considèrent comme un outil de triche.

Mais plusieurs spécialistes se posent la question de l’utilité d’une telle mesure. D’une part, l’accès aux outils sera toujours possible par des moyens personnels. D’autre part, se pose la question de la pertinence d’interdire l’accès un outil numérique alors que leur utilisation est appelée à se multiplier dans le monde professionnel.

Les élèves seront confrontés dans quelques années à des gens qui ont eu le droit de l'utiliser, qui ont appris à le faire et qui ont appris à quel point ils pouvaient avoir confiance ou non dans l’outil” explique Amélie Cordier, maîtresse de conférences en intelligence artificielle (IA) à l’université Lyon I.

Un avis auquel se range Alain Goudey, directeur général adjoint à la Neoma Business School. Au-delà d’utiliser ou non ChatGPT, l’enjeu est également de comprendre le fonctionnement et les limites de ces outils et de les exposer aux élèves et étudiants. Les qualités rédactionnelles du texte généré ne sont en effet pas synonymes de justesse.

Le fonctionnement de ChatGPT correspond à “un générateur de texte qui a été entraîné sur une version du monde qui se résume aux documents et aux pages web que les développeurs ont utilisé pour donner le modèle. Et la notion de fait vérifiable et très ténue”, détaille Amélie Cordier.

Un texte peut ainsi contenir des citations erronées, des fausses informations… OpenAI n’a pas rendu publiques les données qui ont été utilisées pour entraîner le modèle de ChatGPT.

ChatGPT, l’opportunité d’apprendre autrement

Pour Alain Goudey, “le domaine académique a été pris de court” et doit repenser maintenant ses méthodes pédagogiques. En charge du digital au sein de son établissement, il explique envisager différents scenarii avec les enseignants de son établissement : “si chatGPT réussit un examen, il faut changer l’examen”.

Une des solutions envisagées est de changer le mode d’évaluation en mettant en place des davantage d’examens en classe ou des présentations orales. Il est également possible de solliciter la réflexion “humaine” avec des exercices de comparaison ou des références de niche sur lesquelles il est plus difficile de s’appuyer sur des générateurs.

Il fait l’analogie avec un autre outil présent aujourd’hui dans chaque cartable : la calculatrice. Celle-ci n’a pas mis fin à l’enseignement des mathématiques et son utilisation est encadrée par les consignes des enseignants.

Cécile Cathelin, qui enseigne le français dans un établissement du secondaire à Tours, a décidé d’intégrer l’outil à ses cours depuis la rentrée de janvier. ChatGPT fournit un premier brouillon à une problématique donnée. Brouillon que les élèves viennent ensuite enrichir avec leur connaissances personnelles en petit groupe.

D’après elle, ChatGPT représente également une opportunité d’apprendre autrement pour les enfants allophones ou porteurs de handicap. Par exemple, il peut aussi produire un texte avec différents niveaux de langage. Il a également l’avantage de générer des structures syntaxiques récurrentes.

C’est d’ailleurs l’une des caractéristiques distinctives qui pourrait permettre de repérer un texte généré par ChatGPT.

Un défi annoncé pour le corps enseignant

Cécile Cathelin est une passionnée de technologies, un fait connu de ses élèves. Elle a commencé à utiliser ChatGPT sur son temps personnel et s’est par la suite “auto-formée” afin de pouvoir intégrer son utilisation à ses cours. Selon elle, le “pacte éducatif” discuté avec ses élèves sur la manière de travailler permet d’utiliser ces outils de manière constructive et de créer du lien avec eux.

Elle pointe la nécessité de dégager du temps et de former les enseignants à ces nouveaux outils qui évoluent rapidement. Alain Goudey le souligne également : “La transformation numérique n’a pas ralenti, au contraire, elle accélère et il est urgent de s’emparer de ces sujets là et de trouver des réponses adaptées dans les évolutions des pratiques”.

OpenAI a déjà annoncé une version encore plus évoluée de son algorithme mais sans donner de date de sortie.

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Cécile Cathelin et Amélie Cordier soulignent toutes les deux que les élèves n’ont pas attendu l’apparition de ChatGPT pour chercher à échapper à la corvée des devoirs. Photocopier l’encyclopédie de la bibliothèque, se rendre sur Wikipedia, faire appel à ses parents…

Ce qui est très important finalement dans l'apprentissage. Ce n'est pas le sujet sur lequel on apprend. C'est la méthodologie que l'on apprend à développer autour de ce sujet,” conclut Amélie Cordier.

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