Chine: au Xinjiang, jackpot pour les firmes au service de l'Etat policier

Chine: au Xinjiang, jackpot pour les firmes au service de l'Etat policier
Par AFP
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En Chine, dans le nord-ouest du pays frappé par les attentats, le renforcement de l'Etat policier ouvre un marché de plusieurs milliards d'euros pour les fournisseurs de caméras et les équipementiers des "centres de rééducation". La surveillance dans la vaste région semi-désertique du Xinjiang, peuplée de 20 millions d'habitants, s'est renforcée de façon exponentielle ces dernières années. Objectif affiché par le Parti communiste chinois (PCC) au pouvoir: prévenir tout séparatisme et extrémisme islamiste. Les caméras sont aujourd'hui omniprésentes. Elles pointent vers les imams prêchant dans les mosquées, les clients des restaurants ou encore les vendeurs dans les bazars. Des organisations internationales de défense des droits de l'homme dénoncent des intrusions dans la vie privée. Reconnaissance faciale, scans d'iris, prélèvements d'ADN et intelligence artificielle sont également utilisés par les autorités du Xinjiang pour veiller à ce "qu'aucun angle mort" ne subsiste pour les fauteurs de trouble potentiels. La région est déjà l'un des endroits les plus surveillés du globe. Mais les dépenses de sécurité y ont encore gonflé "de près de 100%" l'an dernier, à 58 milliards de yuans (7,6 milliards d'euros), estime Adrian Zenz, expert de la sécurité en Chine à l'European School of Culture and Theology (Allemagne). "En 2017, le Xinjiang a dépensé autant en matière de sécurité qu'en l'espace de six ans entre 2007 et 2012", calcule-t-il. - Caméras et marxisme - Les autorités justifient ce tour de vis sécuritaire par la menace terroriste. Des membres de la minorité ouïghoure, un peuple turcophone majoritairement musulman, ont commis des attaques à l'arme blanche et à l'explosif qui ont fait des centaines de morts ces dernières années en Chine. Pékin s'alarme des liens entre ces militants radicalisés, souvent présentés comme des "séparatistes", et des groupes jihadistes internationaux. Mais pour les entreprises chinoises comme Hikvision, le plus grand fournisseur mondial d'équipements de surveillance, ce boom de la sécurité au Xinjiang est une aubaine. En 2017, elle a remporté au moins cinq contrats dans la région, pour un total de 1,85 milliard de yuans (240 millions d'euros), selon Its114.com, un site internet chinois spécialisé. La firme fournira notamment un "système de prévention et de contrôle social" avec des dizaines de milliers de caméras. Les autorités régionales ont publié des milliers d'appels d'offres depuis début 2017. Outre les caméras, ils concernent les uniformes de police, les véhicules blindés ou encore la construction de "centres de rééducation". Ces camps, où les personnes considérées comme suspectes doivent notamment suivre des exercices de type militaire et des cours de marxisme, ont essaimé dans tout le Xinjiang. Après enquête, l'AFP a découvert qu'environ 20% des adultes d'un village de la région y avaient été envoyés. Certaines sources évoquent des centaines de milliers de personnes détenues. - 'Maintenir l'ordre' - Parmi les contrats décrochés par Hikvision figure un projet à 309 millions de yuans (40 millions d'euros) dans le comté rural de Moyu. L'appel d'offres consulté par l'AFP évoque un réseau d'environ 35.000 caméras qui surveilleront les écoles, les rues, les bureaux et les 967 mosquées locales. Les big data, la télédétection et le positionnement par satellite seront également mis à contribution pour "maintenir l'ordre social". Selon le document, Hikvision fournira six "systèmes de vidéosurveillance" pour les centres de rééducation -- dont Pékin nie pourtant l'existence. En juillet, une autre compagnie, Dahua Technology, a remporté un contrat colossal à 4,3 milliards de yuans (560 millions d'euros) pour construire un "programme de villes sûres" dans le comté de Yarkand. Mais si ce flot de dépenses a gonflé les bénéfices des entreprises, il a aussi creusé la dette publique des collectivités locales. Et certains projets ont été suspendus, à l'heure où Pékin impose des efforts de désendettement au pays. L'industrie conserve cependant un immense potentiel. Le cabinet chinois de conseil financier CHYXX estime à 16,2 milliards de yuans (2,1 milliards d'euros) les simples besoins en caméras sur les trois prochaines années. En avril 2017, une étude d'un organisme gouvernemental du Xinjiang prédisait que "la valeur totale des investissements en matière de sécurité atteindra au moins 40 à 50 milliards de yuans".

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