Euro d'athlétisme: Mekhissi, l'écorché vif

Euro d'athlétisme: Mekhissi, l'écorché vif
Par AFP
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Ténébreux, solitaire et insaisissable, Mahiedine Mekhissi n'est jamais aussi à l'aise que sur la piste, vêtu du maillot de l'équipe de France avec lequel ce taiseux se métamorphose en guerrier lors des grands championnats.

Si vous voulez croiser la route du Rémois de 33 ans, il n'est nul besoin de courir les meetings. Mekhissi n'a que faire de ces courses d'un jour qui font l'ordinaire d'une saison. Lui ne vibre que pour les médailles et les rendez-vous internationaux où il sort soudainement de sa coquille pour imposer sa loi.

Son palmarès, unique pour un demi-fondeur tricolore, et l'exploit réussi jeudi aux Championnats d'Europe sont là pour le rappeler. Triple médaillé olympique sur sa distance fétiche du 3000 m steeple (2008, 2012, 2016), troisième à deux reprises aux Mondiaux (2011, 2013), il est désormais le premier athlète français à avoir glané 5 titres sur le plan continental.

A chaque fois, Mekhissi a surgi de nulle part, réduisant ses apparitions au strict minimum et préférant se préparer à Reims ou en altitude, en Afrique du Sud, à Albuquerque (Nouveau-Mexique/Etats-Unis) ou encore à Font-Romeu avant de faire parler sa science de la course. Ce besoin de vivre caché, loin des lumières, et cette méfiance qui transparaît dès que les micros se tendent, trouvent peut-être leurs origines dans l'accueil circonspect qui avait suivi son apparition fulgurante sur la scène internationale aux JO de Pékin en 2008.

- Dérapages -

Médaillé d'argent à la surprise générale, son podium inattendu avait suscité doutes et incompréhension, d'autant que son entraîneur de l'époque traînait une réputation sulfureuse.

"Mon dopage, c'est ma foi en moi, en ma force. J'ai commencé directement avec des problèmes, je ne comprenais pas pourquoi on disait tellement de choses sur moi... ça fait que je suis l'homme que je suis aujourd'hui", a-t-il expliqué par la suite.

Et puis il y a eu ses multiples dérapages, qui ont longtemps terni son image. En juillet 2011, il échange des coups de poings surréalistes et ridicules sur la piste de Monaco avec Mehdi Baala à l'issue du 1500 m de la Ligue de diamant. C'est ensuite un responsable du CREPS de Reims qui l'accuse de l'avoir agressé.

Deux mascottes, celles des Euros 2010 et 2012 violemment poussées, vont également faire connaissance avec le caractère impulsif de Mekhissi, 8e enfant d'une fratrie de dix d'origine algérienne élevée dans une cité HLM de Reims.

- Meilleur ennemi des Kényans -

Et comment expliquer son geste insensé en finale du 3000 m steeple de l'Euro-2014 à Zurich? Alors qu'il a course gagnée, il enlève son maillot à la manière d'un footballeur pour célébrer sa victoire. Une réclamation du camp espagnol précipitera sa disqualification. Il se vengera en s'imposant magistralement sur 1500 m. Du Mekhissi tout craché.

"Les gens ont une fausse image de moi, avait déclaré un jour à l'AFP le recordman d'Europe du 3000 m steeple (8 min 00 sec 09, le 6 juillet 2013 au Stade de France) de sa voix douce. Dans un stade, on va au combat, je ne suis pas le Mahiedine de tous les jours. Les gens n'arrivent pas à l'assimiler. Je trouve ça triste, parce qu'ils ont parfois peur de m'aborder. Mon caractère et mon tempérament c'est ma force: sans ça je n'aurais pas le même palmarès".

Son moteur, c'est aussi son "kif" pour l'athlétisme et son plaisir d'en découdre avec ses meilleurs ennemis kényans, avec qui le respect se double d'une rivalité féroce. Il lui manque toujours un succès sur les coureurs des hauts plateaux, qui dominent la spécialité depuis 30 ans, pour boucler définitivement la boucle mais le Français ne désespère pas et s'est donné jusqu'aux JO de Tokyo en 2020 pour y parvenir avant de tirer un trait sur la piste... s'il n'arrête pas avant, comme il l'a laissé entendre jeudi après son 5e sacre.

"Je ne dis pas que je veux prendre ma retraite mais parfois on y pense, a-t-il lâché. J'ai envie de souffler, faire un bon break à la fin de la saison. Je n'ai plus rien à prouver. Je dis ça parce que je me sens fatigué mentalement."

Son entraîneur Farouk Madaci en est lui persuadé: "C'est un champion à l'état brut, sa soif de breloques pour la France n'est pas assouvie. Il est obnubilé par ça".

Rien de plus logique pour celui qui dit être "un autre homme, déterminé" quand il porte le maillot bleu.

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