Le juge Marchena, équilibriste au procès des indépendantistes catalans

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Par AFP
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A la Cour suprême où sont jugés douze anciens dirigeants indépendantistes catalans, le président Manuel Marchena est devenu, par sa façon équilibrée de mener les débats, la vedette du procès le plus médiatique de la démocratie espagnole.

Les premiers accusés ont dénoncé sans surprise ce qu'ils considèrent comme un procès politique, pour des délits "inexistants".

Le juge Marchena - dont l'impartialité avait été mise en doute du fait de son profil conservateur - a lui étonné en se montrant d'emblée plein d'égards pour les prévenus, tout en alternant fermeté et souplesse.

Il fait preuve "d'une grande habileté, d'ironie subtile et de beaucoup de flexibilité", a estimé mercredi le directeur adjoint du quotidien El Pais, Xavier Vidal-Folch.

Il sait que sont "en jeu son prestige, celui de la Cour suprême et même l'image internationale de la magistrature espagnole, du fait de l'importance de ce procès et parce que s'ils sont condamnés, les accusés vont se tourner vers les instances européennes", a-t-il ajouté à l'antenne de la radio Cadena Ser.

Le 12 février, à l'ouverture du procès retransmis intégralement à la télévision et par internet, M. Marchena a donné à la défense "du temps et une absolue liberté pour développer tout type d'arguments", aussi bien techniques que politiques, souligne le juge Celso Rodríguez Padrón, de l'Association professionnelle de la magistrature, proche des conservateurs. "Une preuve de plus de sa souplesse et de son ouverture d'esprit", dit-il à l'AFP.

Depuis son fauteuil légèrement surélevé par rapport aux six autres juges, Marchena, front dégarni et collier de barbe, ne s'est pas opposé pas à ce que certains des accusés exhibent un ruban jaune, symbole controversé des indépendantistes pour réclamer la liberté de leurs dirigeants.

Il a cependant lancé un "soyons sérieux" à l'un des défenseurs, en rejetant une demande de comparution comme témoin de l'ancien président catalan Carles Puigdemont. Le principal protagoniste de la tentative de sécession d'octobre 2017 a fui en Belgique et un mandat d'arrêt l'attend en Espagne. "On ne peut pas être témoin le matin et accusé l'après-midi", a déclaré le juge.

L'ancien procureur de 59 ans, qui préside depuis 2014 la deuxième chambre de la Cour suprême, a aussi recadré les procureurs pour certaines de leurs questions. Et stoppé une intervention d'un avocat du parti d'extrême droite Vox - qui exerce un rôle très contesté d'accusateur au procès en raison d'une particularité du droit pénal espagnol - en avertissant qu'il ne permettrait pas de "débat idéologique".

- WhatsApp compromettant -

Pour motiver certaines de ses décisions, Manuel Marchena s'est référé à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme parce qu'il "est à prévoir que si la sentence n'est pas favorable aux accusés", l'affaire arrivera à Strasbourg, relève Ignacio González Vega, porte-parole du syndicat de magistrats Juges pour la démocratie (gauche).

Les prévenus, poursuivis pour avoir organisé un référendum d'autodétermination interdit par la justice suivi d'une vaine déclaration d'indépendance, et leurs défenseurs, dirigent déjà leurs interventions vers l'extérieur. "Il n'y a personne en Europe (...) qui comprenne que la réponse à ces faits (...) puisse être aussi sévère", a déclaré Andreu Van den Eynde, avocat de l'ancien vice-président catalan Oriol Junqueras, qui risque jusqu'à 25 ans de prison.

Avant même le début du procès, les indépendantistes avaient mis en doute l'impartialité de M. Marchena. Plusieurs ont même - vainement - tenté d'obtenir sa récusation, pour ses liens présumés avec le Parti populaire (PP, droite), au pouvoir au moment des faits.

Pressenti en novembre pour prendre la présidence de la Cour suprême, Manuel Marchena y avait renoncé après le scandale provoqué par la diffusion d'un message WhatsApp par un sénateur conservateur, Ignacio Cosido, qui se félicitait du choix de sa personne parce qu'il permettrait au PP de contrôler la chambre "en coulisse".

Mais M. Marchena compte de nombreux défenseurs, tel le professeur de droit Julio Perez Gil, qui le connait personnellement et le décrit comme "un magistrat très expérimenté et très qualifié, ne laissant aucun doute sur son indépendance".

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