Un report du Brexit aura "un coût", prévient Bruxelles

Michel Barnier lors d'une conférence de presse à Bruxelles le 19 mars 2019
Michel Barnier lors d'une conférence de presse à Bruxelles le 19 mars 2019 Tous droits réservés EMMANUEL DUNAND
Par AFP
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Un report du Brexit aura "un coût économique et politique" a averti Bruxelles, au moment où la Première ministre britannique Theresa May s'apprête à envoyer une lettre à l'Union européenne demandant de repousser la date du divorce.

Reconnaissant que l'impasse au parlement britannique pour faire adopter son accord de sortie de l'UE s'est muée en "crise", le porte-parole de Theresa May a indiqué que la dirigeante conservatrice "va écrire à Donald Tusk, le président du Conseil européen (...) au sujet d'une extension de l'article 50" du traité sur l'Union européenne, en vertu duquel la date du 29 mars a été fixée pour le Brexit.

Un changement de date devra être approuvé par les deux chambres du Parlement britannique, a-t-il ajouté, sans préciser la durée du report demandé à l'UE.

Pour le négociateur en chef de l'Union, Michel Barnier, "une extension, c'est une prolongation de l'incertitude, elle a un coût politique et économique". "C'est la raison, l'objectif de cette extension (...) qui conditionnera la durée" d'un report, a-t-il déclaré mardi devant la presse après une réunion à Bruxelles avec des représentants des 27.

A dix jours de la date théorique de sortie de l'UE, et près de trois ans après le référendum de juin 2016 qui a décidé le Brexit, le pays et le parlement restent tout aussi divisés sur les formes que doit prendre le divorce: coupure nette et sortie sans accord pour les Brexiters, ou sortie ordonnée avec un accord de retrait et maintien de liens étroits.

- "Crise" -

Theresa May comptait essayer de faire adopter l'accord de retrait qu'elle a négocié laborieusement avec Bruxelles avant le sommet européen de jeudi et vendredi, en vue de demander aux 27 un report limité du Brexit permettant la mise en place technique de l'accord. Mais sa stratégie a été sabordée par le coup d'éclat inattendu du président de la Chambre des Communes, le "Speaker" John Bercow.

Ce dernier a décidé lundi qu'un texte ne pouvait être soumis inchangé aux députés une deuxième fois au cours de la même session parlementaire, alors que la seconde version de l'accord de retrait a déjà été rejetée à une large majorité la semaine dernière.

Il a ainsi déclenché la colère de l'exécutif. "Nous traversons une crise constitutionnelle majeure", a estimé Robert Buckland, conseiller juridique du gouvernement.

La presse conservatrice a cloué au pilori M. Bercow, un conservateur qui, selon elle, prend un malin plaisir à mettre des bâtons dans les roues du gouvernement. "Acte de sabotage", a dénoncé le Daily Mail, "Destructeur de Brexit", a titré le Daily Express, "Bercow, on t'emmerde", a même osé le Sun.

"C'était le gouvernement qui devrait accomplir le Brexit... maintenant il ne l'est plus", titre mercredi le Daily Telegraph, tandis que le Financial Times note que "Bruxelles adopte une attitude dure quant au report du Brexit" tandis que les membres du gouvernement May sont "divisés".

Dans une tribune publiée par le Daily Telegraph, Donald Trump Jr., le fils aîné du président américain, critique la tactique adoptée par Mme May quant au Brexit.

"Mme May a ignoré le conseil de mon père, et finalement, un processus qui aurait du prendre juste quelques mois est devenu une impasse qui dure depuis un an avec le peuple britannique laissé à lui-même".

En juillet 2018, le président Trump avait ouvertement critiqué la stratégie de Mme May et déploré qu'elle n'ait pas choisi d'écouter ses conseils.

M. Trump a renouvelé ses critiques le 14 mars dernier. "Je suis surpris de voir à quel point tout se passe mal", a-t-il déclaré. "Franchement, je pense que cela aurait pu être négocié d'une autre façon".

- "Alternative crédible" -

Les Européens de leur côté montrent des signes d'impatience. Le porte-parole de la Commission Margaritis Schinas a appelé Londres "à décider des prochaines étapes" et à en "informer" l'UE "rapidement".

Paris a prévenu qu'une extension n'était "ni évidente ni automatique" et a exigé de Londres une "alternative crédible, dans les tout prochains jours ou prochaines heures", selon la présidence.

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Mais la chancelière allemande Angela Merkel a assuré vouloir "se battre jusqu'au bout avant la date butoir du 29 mars" pour éviter un Brexit sans accord, scénario particulièrement redouté par les milieux économiques.

Le ministre chargé du Brexit Stephen Barclay a estimé que le vote sur l'accord, qui doit mettre fin à 46 ans d'appartenance au bloc européen, pouvait encore avoir lieu la semaine prochaine. "La réalité, c'est que le meilleur moyen pour que le Brexit se réalise est de soutenir le plan de la Première ministre", a-t-il plaidé sur la BBC.

"Les gens veulent qu'on aille de l'avant. C'est très clair. Tout le monde devrait se concentrer pour trouver un moyen de quitter (l'UE) avec un accord", a aussi déclaré mardi un porte-parole de Mme May. Cette dernière répondra mercredi au Parlement aux questions des élus.

Le "Speaker" britannique a cependant averti qu'il n'accepterait pas un texte qui ne serait pas "fondamentalement différent", laissant entendre que des changements devaient résulter de nouvelles discussions avec les dirigeants européens.

Bruxelles, cependant, ne veut pas renégocier, répétant que la proposition sur la table est "la meilleure et la seule disponible".

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Toutefois, selon des experts du droit constitutionnel, si l'UE acceptait l'extension, cela pourrait constituer le changement suffisant réclamé par M. Bercow.

Avant même la décision du "Speaker", des doutes avaient commencé à apparaître sur l'organisation d'un nouveau vote cette semaine, en raison de l'incapacité de Mme May de rallier à son accord - déjà rejeté à une écrasante majorité le 15 janvier et le 12 mars - les députés les plus eurosceptiques.

Pour sa part, l'ancien Premier ministre Tony Blair, a estimé dans un entretien à la BBC citée par l'agence Press Association qu'en cas de report du Brexit, le délai de sortie devrait être de neuf à douze mois.

Durant la période à venir, "le +no deal+ n'est pas notre défi", a dit M. Blair. "Le défi est (...) d'avoir un plan qui permettra au Parlement de parvenir à une opinion définitive sur la question centrale du Brexit, +soft+ ou +dur+", a-t-il affirmé.

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