A l'ONU, Berlin, Londres et Paris rudoyés par leur vieil allié américain

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Au Conseil de sécurité, les Etats-Unis sont sans gants avec leurs vieux et plus proches alliés européens, Berlin, Londres ou Paris. Menaces de veto, projets de texte concurrents... Une posture sans précédent, selon certains à l'ONU.

"C'est hallucinant!", s'exclame un diplomate européen sous couvert d'anonymat, atterré de voir le peu d'appétence des Etats-Unis pour la négociation et leur indifférence à se retrouver isolés sur la scène internationale. "De mémoire, jamais vu une administration américaine aussi opposée à ses alliés traditionnels", ajoute un autre diplomate, également sous anonymat.

En cette fin de semaine, les 15 membres du Conseil de sécurité participent à une retraite annuelle dans les environs de New York, mais les espoirs sont minces de voir les Occidentaux retrouver leur entente d'antan.

Dans le passé, Washington a déjà eu maille à partir avec certains de ses alliés, notamment la France lors de l'invasion de l'Irak en 2003. "Mais les Américains et les Européens s'affrontent aujourd'hui de manière régulière", note Richard Gowan, du centre de réflexion International Crisis Group.

En décembre, la foudre américaine s'est abattue sur le Royaume-Uni. Dans un texte britannique sur le Yémen, Washington a voulu cibler l'Iran et supprimer des critiques visant l'Arabie saoudite, agitant la menace d'un veto. Humiliation supplémentaire, les Etats-Unis ont sorti à la surprise générale un texte concurrent pour imposer leurs idées. Choqués, les Européens sont encore marqués aujourd'hui par cet épisode.

"Les Américains et les Français se sont toujours disputés à l'ONU, mais il est rare que les États-Unis traitent les Britanniques aussi brutalement", reconnaît Richard Gowan.

A la mi-avril, nouvelle incompréhension. Après en avoir discuté en "P3" (un format réunissant Washington, Londres et Paris), les Britanniques distribuent au Conseil de sécurité un projet de cessez-le-feu pour la Libye. Le même jour, Donald Trump parle au téléphone de l'avenir de ce pays avec le maréchal Khalifa Haftar qui tente de s'emparer militairement de Tripoli... Londres était-il au courant de cet appel? Sans soutien américain, le Royaume-Uni a été contraint de remballer son texte.

Washington se défend de maltraiter ses alliés. "Nous avons dit que nous discutions avec les parties libyennes et qu'il fallait attendre la fin de ces discussions", assure un responsable sous anonymat.

- "Comme les Chinois" -

La semaine dernière, c'est au tour de Berlin de capituler devant la Maison Blanche. Auteure d'un texte sur les violences sexuelles dans les conflits, l'Allemagne, sous la menace d'un veto américain sans qu'une abstention ne soit une option, en a retiré toutes les mentions relatives à la justice internationale et aux droits sexuels reproductifs des victimes.

"Nous ne pouvons transiger avec les lois américaines", explique-t-on à Washington qui craint un encouragement à l'avortement, visé par des restrictions aux Etats-Unis. Et "les Allemands se sont obstinés jusqu'à la fin", regrette-t-on de même source.

Le Venezuela irrite aussi les Européens, jugeant "insupportable" que des responsables américains viennent à tour de rôle se servir de la tribune de l'ONU pour réclamer un changement de régime. Le Conseil a ainsi eu droit au secrétaire d'Etat Mike Pompeo, à l'envoyé spécial Elliott Abrams et au vice-président Mike Pence, qui voulait venir avec un pupitre à son nom, une idée finalement abandonnée devant les réticences de l'ONU.

"Cela en dit long" sur la manière dont l'administration américaine, unilatéraliste, considère l'ONU, soupire un diplomate.

En coulisses, les réactions européennes sont variables. "Ils nous traitent comme les Chinois", dit une source. "Je ne vois pas un P3 très uni", abonde un diplomate d'un pays n'en faisant pas partie. Mais "non, le P3 n'est pas en crise, il y a juste des différences de vues", affirme un de ses homologues, pour qui le partenariat transatlantique est "assez fort pour autoriser des perspectives opposées et continuer d'aller de l'avant".

Alors qu'il facilitait les consensus, "le P3 n'est plus aujourd'hui qu'une option, faute de mieux, parmi d'autres" ("P5", les cinq pays permanents du Conseil et "P10", les dix Etats non permanents), tranche un autre diplomate.

Pour Richard Gowan, "l'absence d'unité stratégique entre les Occidentaux au Conseil de sécurité crée un boulevard diplomatique à la Russie et la Chine pour faire avancer leurs intérêts à New York".

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