Birmanie: la liberté de la presse toujours menacée malgré la libération des journalistes de Reuters

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La libération mardi de deux reporters de Reuters emprisonnés depuis seize mois est une bonne nouvelle pour la liberté de la presse, qui ne doit toutefois pas cacher la situation très critique des journalistes en Birmanie où des dizaines d'entre eux restent poursuivis.

Wa Lone et Kyaw Soe Oo ont bénéficié d'une amnistie présidentielle après avoir été condamnés à sept ans de prison à la suite d'une enquête sur un massacre de musulmans rohingyas par l'armée birmane.

Cette décision a été immédiatement saluée par la communauté internationale. Marque-t-elle pour autant une étape vers une amélioration de la liberté de la presse dans le pays?

"La situation pour la liberté d'expression est catastrophique", a commenté mardi le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'Homme, en déplorant "qu'aucun progrès positif n'ait été observé" malgré des recommandations faites l'an dernier.

De fait, pour l'instant, la réalité reste très sombre: "Des dizaines de journalistes et blogueurs font toujours l'objet de poursuites pénales sans fondement", note Phil Robertson, de l'ONG Human Rights Watch.

Avec l'arrivée au pouvoir en 2016 du prix Nobel de la Paix Aung San Suu Kyi, les médias avaient nourri l'espoir de ne plus avoir à craindre arrestations arbitraires et emprisonnements.

Les journaux ne sont certes plus obligés de soumettre leurs articles à un organisme gouvernemental de censure comme du temps de la junte.

Mais "la liberté de la presse ne fait clairement pas partie des priorités du gouvernement dirigé par la +Dame de Rangoun+ (Aung San Suu Kyi)", note Reporters sans frontières (RSF). Dans son rapport 2019, l'ONG a classé le pays comme un des plus mauvais élèves au niveau mondial, au 138e rang sur 180. Il a reculé de sept places en deux ans.

En juin 2017, deux reporters du journal birman The Voice Daily ont été incarcérés pour un article satirique critiquant les efforts du gouvernement pour tenter de mettre fin aux conflits avec les rébellions ethniques du pays. Incarcérés pendant plusieurs jours, la procédure à leur encontre est toujours en cours.

Ko Swe Win, un journaliste d'investigation, est poursuivi depuis deux ans, accusé d'avoir diffamé un moine ultra-nationaliste. Depuis, il a dû assister à des dizaines d'audiences loin de chez lui dans le cadre de cette procédure toujours en cours.

- Arsenal répressif -

La Birmanie a gardé un arsenal de textes répressifs utilisés contre les journalistes.

La loi sur les Télécommunications est très fréquemment utilisée. Elle prévoit des peines allant jusqu'à deux ans de prison pour "diffamation par le biais d'un réseau de télécommunications".

Les journalistes sont aussi poursuivis via des textes qui datent de l'époque coloniale britannique, comme la loi sur les secrets d'Etat. Ce fut le cas pour les deux journalistes de Reuters, accusés de s'être fait remettre des documents estampillés "secret-défense".

"Jusqu'à ce que ces lois soient abrogées, les journalistes et les militants sont toujours menacés de détention et d'arrestation", déplore Nicholas Bequelin, directeur d'Amnesty International pour l'Asie du Sud-Est, appelant à la libération de "tous les autres journalistes et prisonniers d’opinion détenus sur des accusations creuses".

S'ils ne sont pas mis derrière les barreaux, plusieurs journalistes ont récemment fait état de menaces dans le cadre de leur travail, d'après plusieurs ONG. Cette situation est particulièrement vraie pour ceux qui couvrent les conflits entre l'armée et les nombreuses guérillas ethniques qui ont éclaté depuis l'indépendance de la Birmanie en 1948.

Le silence d’Aung San Suu Kyi face à cette répression déconcerte.

D'autant que "la réforme des médias du pays et la garantie de la liberté de la presse faisaient partie de ses promesses de campagne", relève l'ONG SEAPA qui défend les journalistes en Asie du Sud-Est.

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Interrogée à plusieurs reprises sur le cas de Wa Lone et Kyaw Soe Oo, Aung San Suu Kyi a rarement répondu. Quand elle l'a fait, elle a affirmé qu'ils n'étaient pas emprisonnés en raison de leur profession, mais parce que le tribunal estimait qu'ils avaient "enfreint" la loi.

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