Kassym-Jomart Tokaïev : " Il n'y aura pas de double pouvoir au Kazakhstan"

Kassym-Jomart Tokaïev : " Il n'y aura pas de double pouvoir au Kazakhstan"
Par Euronews
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Kassym-Jomart Tokaïev : " Il n'y aura pas de double pouvoir au Kazakhstan"

Pour The Global Conversation, Kassym-Jomart Tokaïev donne l'une de ses premières interviews depuis son élection le 9 juin dernier à la présidence du Kazakhstan. Le nouvel homme fort du pays évoque la lourde succession de Noursoultan Nazarbaïev** qui a passé trois décennies au pouvoir. Il envoie aussi un message de fermeté à ses nombreux opposants mais promet de relâcher rapidement les nombreux manifestants arrêtés ces dernières semaines.**

Galina Polonskaya (Euronews) :

"Un rapport de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) évoque des violations des libertés fondamentales lors des dernières élections avec le bourrage systématique des urnes et l'impossibilité de garantir que le dépouillement a été équitable. Quelles conclusions tirez-vous de ce rapport et comptez-vous lancer une enquête ? "

Kassym-Jomart Tokaïev, :

"Je tiens à dire tout d'abord que nous avons mis tous les moyens en oeuvre pour ces élections se passent dans les meilleures conditions. Je reconnais qu'il y a eu des violations dans certains bureaux de vote, et nous allons nous servir de ce rapport de l'OSCE pour effectuer une analyse très détaillée. Si des faits graves sont confirmés, nous prendrons alors des décisions fortes."

Galina Polonskaya (Euronews) :

" Le monde entier a vu les photos des manifestations le jour du vote. Il y a eu des centaines d'arrestations et beaucoup de gens pensent que ces élections étaient antidémocratiques. Quelle est votre position après les nombreuses arrestations de manifestants ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

"Les gens sont descendus avant tout dans la rue pour exprimer leurs attentes. Nous avons entendus ces revendications qui étaient surtout d'ordre sociale. Ma rôle est de prendre en compte les messages forts envoyés par notre peuple, d'écouter tous ces gens qui sont descendus dans la rue. Je veux qu'un dialogue s'établisse entre les autorités et la population. C'est pourquoi, j'ai créé un groupe de travail sur ce point précis."

Ma priorité est de ramener la jeunesse vers le pouvoir et qu'ils aident notre pays à trouver les bonnes solutions.

Galina Polonskaya (Euronews) :

"Que souhaitez vous dire à tout ceux qui ne sont pas satisfaits du gouvernement de transit qui dirige le pays depuis quelques mois ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

"Je ne pense qu' il y ait eu de plaintes sérieuses depuis mon arrivée à la présidence. Je n'aime d'ailleurs pas du tout ce mot "transit". Je ne me considère pas comme un passager en transit qui attend son avion dans un aéroport ou son train dans une gare. Je suis un président élu et j'ai l'intention de servir mon peuple sans aucune exception."

Galina Polonskaya (Euronews) :

" Je sais que vous avez un compte Twitter, savez-vous que les hashtags #WakeUpKazakhstan et # Kazakh Spring sont devenus très populaires. Quelle est votre stratégie pour rapport aux opposants alors que la vague de protestations ne semble pas faiblir après ces élections ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" Notre stratégie est simple : il s'agit d'établir un dialogue. Ce mouvement, que vous venez de mentionner, est principalement représenté par des jeunes qui veulent faire bouger les choses. Ma priorité est de ramener cette jeunesse vers le pouvoir, qu'ils participent en effet à trouver les solutions pour notre pays. Des représentants de différents mouvements seront d'ailleurs invités dans les prochaines semaines pour évoquer les grands sujets lors d'une table ronde. C'est comme ça que l'on peut avancer, pas dans la rue et dans le chaos ! "

Galina Polonskaya (Euronews) :

" Les prochaines manifestations seront-elles réprimées ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" Nous nous opposerons à tout ce qui est illégal. Le bureau du procureur général a déjà mis en garde à plusieurs reprises les opposants sur notre volonté de ne pas laisser faire ces manifestations non autorisées qui débouchent la plupart du temps sur des émeutes. Elles ont des effets contre-productifs et troublent le message de ceux qui ont de vrais revendications. Une loi va donc être élaborée rapidement : les personnes qui souhaiteront manifester devront désormais se signaler auprès de nos services. Et nous choisirons le lieu où elles peuvent se rassembler pour exprimer leur opinion. "

Galina Polonskaya (Euronews) :

" Revenons aux manifestants arrêtés, que va-t-il leur arriver ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" J'ai chargé le procureur général d'aborder cette question en détail : les détenus qui ont commis des méfaits qui ne portent pas gravement atteinte à la sécurité publique seront libérés rapidement. Ce sera le cas aussi de toutes les personnes qui se trouvaient là par hasard et n'auraient pas du être arrêtées. Je leur présente d'ailleurs mes excuses. "

Galina Polonskaya (Euronews) :

" Et pour ceux qui affirment que ces élections étaient jouées d'avance ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" Ils seront libérés aussi, même si je le répète, le résultat de cette élection est juste. "

Galina Polonskaya (Euronews) :

" Le 4 avril dernier, deux semaines après avoir été nommé président par intérim, vous vous êtes rendu en Russie pour rencontrer Vladimir Poutine. Êtes-vous allez en Russie pour demander des garanties ?

Kassym-Jomart Tokaïev :

"J'ai effectué cette première visite à l'étranger à l'invitation du président russe. C'est somme toute logique car nous sommes unis - pas divisés mais unis - par la plus longue frontière du monde. Nous avons avancé sur de nombreux dossiers et signer plusieurs déclarations communes. Pour répondre à votre question, nous n'avons pas besoin de garanties car nos deux pays sont conscients des besoins d'accroître leur coopération. La Russie est absolument nécessaire pour le Kazakhstan, en tant que grand État qui est à côté de nous et qui est un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Mais sans le Kazakhstan, la Russie n'est certainement plus la même..."

Galina Polonskaya (Euronews) :

" Comment voyez-vous l'avenir des relations stratégiques avec l'Europe et dans quelles domaines les voyez-vous évoluer ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" L'Union Européenne est notre principal partenaire commercial. Le volume des échanges a été de plus de 37 milliards de dollars. Cela représente plus de la moitié du chiffre d'affaires commercial de notre pays. La coopération avec l'UE est donc primordiale. Le président du Conseil européen, Donald Tusk, m'a rendu visite dernièrement et nous avons pu faire de grandes avancées en définissant des axes précis de collaboration. Il y a évidemment les échanges commerciaux et économiques mais aussi des accords d'investissements, des partenariats stratégiques sur la scène internationale et aussi l'apport de l'expérience des pays européens développés en matière de transformation politique de la société."

Mon conseil à Donald Trump ? De ne pas mettre la Chine de côté car ils ne supporteraient pas de perdre la face...

Galina Polonskaya (Euronews) :

" La Chine et les États-Unis sont en état de guerre commerciale. Quels sont les risques pour le Kazakhstan ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" Il sont nombreux d'autant que notre pays exporte de nombreuses ressources naturelles vers la Chine et nos prix peuvent du coup être impactées. Nous espérons donc que ces deux puissances vont finir par se rapprocher et trouver un accord. Je suis confiant car les dirigeants chinois savent où sont leurs intérêts. "

Galina Polonskaya (Euronews) :

" En tant que spécialiste de la Chine, quel conseil donneriez-vous à Donald Trump ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" De ne pas mettre les Chinois à l'écart parce qu'ils ne supportent pas de perdre la face."

Galina Polonskaya (Euronews) :

" Votre première décision après votre élection a été de renommer la capitale du pays Astana en "Noursoultan" en hommage à l'ancien président Nazarbayev. Comment comptez-vous gouverner alors qu'il va rester à vie à la tête du Conseil de sécurité et continuer à diriger le parti au pouvoir ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" Noursoultan Nazarbaïev est le fondateur de notre État et continue d'avoir un rôle politique dans notre pays. Il est donc logique que je le consulte sur les principales questions stratégiques. Mais, Nazarbaïev l'a dit lui-même : il n'y aura pas de double pouvoir au Kazakhstan. Il veut juste aider le nouveau président..."

Galina Polonskaya (Euronews) :

" A quel moment Nazarbaïev vous a-t-il annoncé son choix de vous confier l'intérim de la présidence ?"

Kassym-Jomart Tokaïev :

" Il y a trois ans et demi, il m'a dit : vous serez le prochain président. C'est juste une question de temps. Il faut juste attendre le bon moment. "

Galina Polonskaya (Euronews) :

"Avez-vous craint qu'il change d'avis ? "

Kassym-Jomart Tokaïev :

" On ne peut jamais être sûr de rien en politique mais je ne viens pas de nulle part non plus. J'ai été premier ministre, j'ai été à la tête de l'agence des affaires étrangères et président du Sénat pendant dix ans. J'ai dirigé aussi pendant trois ans le bureau des Nations Unies à Genève. Je suis connu et respecté au Kazakhstan et aussi à l'étranger. "

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