Quelle est l'importance d'un salaire minimum européen adéquat ? Le cas de la Lettonie

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Par Fanny Gauret
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Le salaire minimum a récemment augmenté dans toute l'Europe. En Lettonie, cette hausse atteint 24 % en 2023, la plus importante de l'Union Européenne. Mais est-ce suffisant pour faire face au coût de la vie qui augmente ? Reportage à Rigga de Fanny Gauret, euronews.

Le salaire minimum a récemment augmenté dans toute l'Europe. En Lettonie, cette hausse atteint 24 % en 2023, la plus importante de l'Union Européenne. Mais est-ce suffisant pour faire face au coût de la vie qui augmente ?

Pour lutter contre la pauvreté au travail, une nouvelle directive européenne demande aux pays membres de s'assurer que leur salaire minimum est adéquat. Comment cela se décide-t-il, et qu'est-ce que cela veut dire pour les travailleurs ? Fanny Gauret d’euronews a rencontré ces derniers à Rigga en Lettonie.

Dans le pays, le salaire minimum est passé de 500 €, à 620 € par mois en 2023. Mais avec une inflation estimée à 20 % l’année dernière dans les pays Baltes, certains Lettons ne sentent pas vraiment la différence.

"Je ne ressens pas du tout la hausse de mon salaire. Les prix ont beaucoup augmenté pour tout, y compris ļa nourriture. Comme nous sommes deux avec mon mari pour l'instant nous pouvons payer les factures mais c'est difficile. Impossible de survivre si j'étais seule”, explique Vizbulite Horste, elle est factrice.

Après des discussions entre les syndicats, les employeurs, et le gouvernement, aucun compromis n’a été trouvé pour fixer un salaire minimum adéquat, laissant la décision au Parlement.

Nous sommes heureux qu'il ait été augmenté, car les négociations ont été très difficiles. Actuellement, le salaire moyen en Lettonie pour ces dernières années est de 1 400 euros. Notre objectif est d’atteindre un salaire minimum adéquat de 700 euros", analyse Martins Svirskis, économiste pour les syndicats de Lettonie.

La nouvelle directive propose aux États membres d'utiliser comme valeur de référence 60 % du salaire médian, ou 50 % du salaire moyen pour établir un salaire minimum plus équilibré.

Ce minimum reste l'un des plus bas en Europe, où il existe de grandes disparités entre les pays, à cause de marchés du travail et de revenus très différents.

En Europe, 60% des bénéficiaires du salaire minimum sont des femmes. Aija Laizāne est aide-soignante. Elle élève son fils de 17 ans et peine à joindre les deux bouts.

"Je dépense en gros 250 € pour le loyer de mon studio, le téléphone, le gaz, l'électricité. Oui, mon fils grandit, il faut l'habiller, le nourrir, les chaussures sont chères, les vêtements sont chers, il faut payer ses études et ses déplacements en train. Du coup je cherche du travail en plus”, dit-elle.

"J'ai dû repenser mon modèle d'entreprise"

Avec d'autres pays de l'est de l’Union, la Lettonie est le pays qui compte le plus de travailleurs avec de bas salaires, souvent peu qualifiés. Eduards Filippovs, entrepreneur et président d’une association de PMEs, voudrait un salaire minimum non imposable et des cotisations sociales plus justes et plus claires.

Personnellement, j'ai dû repenser mon modèle d'entreprise parce que je ne peux pas me permettre d'embaucher des travailleurs temporaires, ni recruter des jeunes parce que la charge de la sécurité sociale est trop élevée pour moi", explique-t-il.

Eduards Filippovs soutient la hausse du salaire minimum, mais estime que les employeurs n'ont pas été suffisamment consultés.

Du côté des syndicats, l’économiste Martins Svirskis souligne l’importance des négociations collectives.

"Nous demandons au gouvernement de mettre en place des sortes de dégrèvements d’impôt pour les différentes prestations négociées collectivement, pour les dépenses de santé, pour la restauration. Et cette année, les négociations portent également sur l'éducation", dit-il.

Le secteur de la construction par exemple a pu négocier un salaire minimum plus élevé, à 780 €. Il et espère obtenir 900 € l’année prochaine.

Entretien avec la ministre lettone des Affaires sociales, en charge du Travail

Comment réussir à trouver un compromis sur le montant du salaire minimum adéquat ? Fanny Gauret d’euronews s’est entretenue avec la ministre lettone des Affaires sociales, en charge du Travail.

Evika Silina, la Ministre lettone des Affaires sociales, en charge du Travail 

Il était absolument clair que nous devions faire quelque chose parce que notre salaire minimum était trop bas par rapport à celui des États baltes. Nous étions historiquement dépendants du gaz russe. Et oui, l'année dernière, nos prix ont été beaucoup plus élevés que dans les pays occidentaux."

Fanny Gauret, euronews : Alors, comment pourrait-on améliorer le dialogue avec les différents partenaires sociaux ?

Evika Silina, la Ministre lettone des Affaires sociales, en charge du Travail

"L'année dernière, l'intention des législateurs était d'atteindre plus ou moins 45 % du revenu moyen des Lettons et ce sera le cas, mais pas encore cette année. C'est pourquoi nous devons probablement discuter davantage avec nos partenaires commerciaux et nos syndicats. Avant l'année prochaine, nous devons être sûrs qu'il y aura un consensus mutuel afin que nous puissions aller beaucoup plus loin. Les chefs d'entreprise parlent d'un montant minimum de paiement non imposable. Auparavant, le montant non imposable était le même que le salaire minimum. Aujourd'hui, c'est un peu différent. Je pense que nous poursuivrons les discussions sur ce chiffre également."

Fanny Gauret, euronews : Quelle est l'importance d'aider les travailleurs qui gagnent le salaire minimum et ceux qui ont des bas salaires, pour l'économie ?

Evika Silina, la Ministre lettone des Affaires sociales, en charge du Travail.

"L'une des premières tâches que j'ai entreprises concerne les personnes à faible revenu, qui bénéficieront de prestations sociales plus importantes et pourront être aidées à payer leur logement entre autres. Le gouvernement est donc prêt à améliorer les compétences de nos travailleurs, car sans ces personnes capables de travailler, de gagner de l'argent et de vivre selon leurs besoins, la croissance économique de notre pays est compromise. Il y a donc de nombreuses directions dans lesquelles nous allons travailler, et l'une des plus importantes est de promouvoir et d'investir dans les personnes qui ne sont plus forcément très jeunes, mais qui peuvent changer de profession et essayer d'apprendre quelque chose de nouveau."

Les négociations collectives, l’étude de l'impact économique et des besoins des travailleurs sont trois outils mis en avant par l’agence Eurofound, pour que chaque pays membre puisse définir son salaire minimum, garantissant une vie décente à chaque travailleur européen, en toutes circonstances.

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