La justice sud-coréenne se penche sur la loi interdisant l'avortement

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La plus haute juridiction sud-coréenne examine jeudi un recours contre la loi sur l'interdiction de l'avortement, accusée de maintenir les femmes dans une situation de grande précarité même si elle est rarement appliquée. La Corée du Sud est l'un des derniers pays industrialisés -- avec l'Irlande qui se prononce sur le sujet cette semaine -- où l'interruption volontaire de grossesse est illégale, sauf en cas de viol, d'inceste ou de menace pour la santé de la mère. Théoriquement, une femme qui avorte risque un an de prison, et le médecin réalisant l'opération en encourt deux. En réalité, la loi de 1953 interdisant l'IVG débouche rarement sur des poursuites. Pour autant, des voix de plus en plus nombreuses réclament la suppression d'un texte qui expose les femmes à des opérations chirurgicales mal encadrées, au chantage de leur conjoint ou aux caprices des autorités. "C'est anachronique", dénonce Kim Dong-sik, chercheur à l'Institut pour le développement des femmes coréennes, un organisme public. "Nous sommes toujours coincés en 1953". Le recours examiné jeudi par la Cour constitutionnelle a été déposé par un médecin poursuivi pour avoir réalisé près de 70 avortements. En 2017, plus de 230.000 personnes avaient signé une pétition exigeant la légalisation de l'IVG. Mais les opposants à l'IVG donnent également de la voix dans une société qui a un regard conservateur sur la sexualité des femmes et reste très influencée par les groupes chrétiens évangéliques. - Illégal mais courant - L'application de la loi a varié selon les époques, les femmes se retrouvant otages d'impératifs politiques, fait valoir Jay Kim, de l'ONG WomenLink. "La Corée du Sud a coutume d'encourager tacitement l'avortement et la contraception quand elle a besoin de réduire la population. Mais quand la faiblesse du taux de natalité est devenu un problème, elle a réprimé l'IVG", accuse-t-elle. Dans les années 1960, des bus d'information sur l'avortement parcouraient les rues à un moment où les autorités, redoutant la surpopulation, défendaient une version non officielle de la politique de l'enfant unique. Hasard du calendrier, cette audience survient à la veille d'un référendum sur l'interdiction de l'avortement en Irlande, où la loi est plus stricte encore, forçant les femmes à partir à l'étranger pour mettre un terme à des grossesses non désirées. En Corée du Sud au contraire, l'IVG bien qu'illégale est très répandue, comme en témoigne une récente enquête de l'Institut pour le développement des femmes, qui avait montré qu'une Sud-Coréenne sur cinq avait avorté. Seules 1% d'entre elles avaient une raison légale de le faire. Les Sud-Coréennes qui veulent avorter légalement en cas de risque pour leur santé doivent avoir la permission de leur conjoint, ou présenter la preuve d'un viol. L'avortement doit être réalisé dans les six premiers mois de la grossesse. Les femmes avortant clandestinement doivent, elles, subir des interventions onéreuses et non remboursées. "Elles doivent signer un contrat qui les engage à ne pas invoquer la responsabilité du médecin en cas de poursuites ou de complications", explique Yoon Jung-won, obstétricienne au Green Hospital de Séoul. La loi explique également que la très grande majorité des avortements est réalisée par voie chirurgicale pour un coût de l'ordre de six millions de wons (4.700 euros) alors qu'il existe des options moins lourdes. - Pas de pilule abortive - "Cela fait 30 ans que la pilule abortive existe mais elle n'est toujours pas disponible ici", déplore-t-elle. Les femmes, dit Mme Kim de Womenlink, vivent en outre dans la peur d'être dénoncées par leur partenaire en cas de rupture. Les Sud-Coréens restent profondément divisés, les groupes religieux menant la charge contre la levée de l'interdiction. "Il n'y a rien de plus précieux au monde que la vie d'un être humain", indiquait le mois dernier une pétition signée par des professeurs d'université, essentiellement catholiques. La Corée du Sud compte une myriade de méga-églises, pour la plupart évangéliques, profondément influencées par les campagnes anti-IVG aux Etats-Unis. En 2012, la Cour constitutionnelle, qui compte neuf membres, avait rejeté un autre recours. Les juges étaient partagés, or, pour passer, un recours doit recueillir la majorité des deux tiers. Cette fois, les militants pro-avortement pensent qu'il y a un coup à jouer, notamment parce que la haute juridiction a vu sa composition évoluer depuis l'arrivée d'un gouvernement de centre-gauche plus ouvert sur les questions sociétales. Plusieurs magistrats, y compris le président de la Cour Lee Jin-sung, se sont dits prêts à réexaminer la loi.

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