Drone américain détruit : quelles sont les règles de survol en mer Noire ?

Un drone américain Reaper faisant partie du détachement aérien de l'opération Barkhane survole l'aéroport militaire nigérian Diori Hamani en 2015
Un drone américain Reaper faisant partie du détachement aérien de l'opération Barkhane survole l'aéroport militaire nigérian Diori Hamani en 2015 Tous droits réservés AFP
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Par Kal Berjikian
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Mi-mars, des avions de chasse russes auraient abattu un drone américain au-dessus de la mer Noire. Pourquoi les États-Unis ont-ils qualifié cet acte de "non professionnel" et quelles sont les règles de survol de la région ? Nous avons interrogé des experts.

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La nouvelle du crash a fait le tour du monde : deux avions de chasse russes auraient détruit un drone américain mi-mars au-dessus de la mer Noire. Si Moscou a démenti être à l'origine de l'incident, Washington a, de son côté, qualifié cette interception de "non professionnelle".

Cette affaire attise une nouvelle fois la rhétorique de confrontation entre la Russie et les États-Unis et interroge sur les règles de survol de la région. Euronews a questionné des experts sur le sujet.

Faire voler des drones au-dessus des eaux internationales

La mer Noire qui borde l'Ukraine, la Russie, la Turquie, la Géorgie, la Roumanie et la Bulgarie est un théâtre majeur de la guerre en Ukraine. Depuis l'invasion à grande échelle de ce pays par la Russie, Moscou a eu recours à sa flotte en mer pour frapper des villes ainsi que le réseau énergétique ukrainiens.

En réplique, Kyiv a également pris pour cible des infrastructures et la marine russes en Mer noire, coulant notamment le navire amiral de Moscou, le Moskva, en avril 2022.

Les pays sont autorisés à faire voler des drones et d'autres appareils au-dessus de la mer Noire, mais pas sur l'ensemble de sa superficie.

Benjamyn Scott, professeur assistant à l'Institut de droit aérien et spatial de l'Université de Leiden (Pays-Bas), a expliqué à Euronews que la mer Noire était divisée en deux : les eaux territoriales qui appartiennent aux pays riverains et les eaux internationales. Selon l'article 87 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, les eaux internationales et leur espace aérien sont ouverts à tous les pays.

Alors que la Turquie a fermé le détroit du Bosphore qui relie la mer Noire à la mer Égée, aux navires de guerre en 2022, l'espace aérien de cette zone, elle, est restée ouverte. Ce qui signifie que les États-Unis peuvent toujours accéder à l'espace aérien international de la région par l'intermédiaire de leurs alliés.

"Les nations peuvent également passer par le territoire d'un pays," a indiqué Benjamyn Scott. "Pour entrer dans l'espace aérien international en mer Noire, il faudrait obtenir l'autorisation préalable [ndlr : de pays], que ce soit de manière ponctuelle ou par le biais d'accords préexistants," a-t-il précisé.

AP Photo
Un drone américain MQ-9 exposé lors d'un salon aéronautique à Kandahar en Afghanistan en 2018AP Photo

La présence de drones est "courante"

Depuis que la Russie a lancé son invasion de l'Ukraine, les drones sont "devenus monnaie courante dans l'espace aérien international de la mer Noire" selon James Patton Rogers, professeur associé au département de sciences politiques de l'Institut danois d'études avancées.

"L'inquiétude suscitée par la résurgence de la force offensive russe a conduit à une augmentation des patrouilles frontalières de drones par les États-Unis et l'OTAN dans les régions de la mer Baltique et de la mer Noire en vue de surveiller les mouvements russes," a-t-il précisé à Euronews.

Les incidents impliquant la Russie et les avions de l'OTAN ne sont pas rares. Avant 2022, les appareils de l'Alliance atlantique et de la Russie étaient impliqués dans 400 interceptions par an en moyenne selon l'agence de presse AP.

AP Photo
Un drone de l'OTAN exposé devant le stade national de Varsovie à l'occasion d'un sommet de l'Alliance Atlantique en 2016AP Photo

Mais la particularité de l'interception de la mi-mars réside dans l'accusation des États-Unis, affirmant que celle-ci était "délibérée" et "agressive".

"Nous savons que l'interception était délibérée, nous savons que le comportement agressif était délibéré, nous savons aussi que ce n'était pas professionnel et que c'était dangereux," a déclaré le général américain Mark Milley après l'écrasement du drone le 14 mars.

Selon Benjamyn Scott, il existe des moyens normalisés d'intercepter les appareils étrangers, comme le fait de "ne pas voler de manière dangereuse".

Pour James Patton Rogers, le coût du drone peut aussi expliquer en quoi cet incident représentait une forme d'"escalade".

"Un [drone de surveillance Reaper] peut coûter jusqu'à 30 millions de dollars [28 millions d'euros] et il est clair que la destruction d'un appareil militaire américain est une escalade," a-t-il souligné. "La réponse des États-Unis pourrait se traduire notamment par un renforcement des patrouilles de drones dans la région," a-t-il assuré.

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