Fatwa vers la planète Mars

Fatwa vers la planète Mars
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Par François Chignac
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Une “fatwa” interdisant aux musulmans de voyager vers la planète Mars a été décrétée aux Emirats Arabes Unis. De quoi faire bondir les initiateurs du projet Mars One qui exhortent les autorités religieuses à lever l’interdit pour que des concurrents comme Khalid al-Jaaidi honorent une “riche tradition d’exploration islamique”

Le décret religieux a été émis il y a quelques jours et publié dans le quotidien émirati Khaleej Times. Aux yeux des autorités religieuses, voyager vers la planète rouge serait “aussi dangereux que suicidaire, et risquer sa vie pour des raisons non vertueuses serait passible de châtiment dans l’Au-delà”. Le professeur Farooq Hamada qui dirige l’Autorité Générale des Affaires Islamique et de Dotation à l’origine, d’après le Daily Mail, de 2 millions de décisions religieuses s’appuie sur des versets du Coran. De quoi prohiber le voyage et justifier son décret en ces mots : “Un tel voyage sans retour présente un risque réel pour la vie, qui ne peut se justifier dans l’Islam. Dans l‘éventualité où les astronautes ne survivraient pas à leur mission, ils subiraient alors la même peine infligée à ceux qui se suicident – à savoir, une éternité en enfer.”

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Riche tradition d’exploration islamique

== Les initiateurs du projet Mars One n’ont pas manqué de réagir. Leur voyage sans retour vers Mars dans l’espoir d’y créer la première colonie humaine a dépassé leurs espérances. 200.000 personnes ont postulé, depuis janvier seuls 1058 candidats peuvent garder les yeux au ciel, parmi eux des musulmans du Golfe aujourd’hui inquiets.

Dans une mise au point publiée sur le site de la fondation Mars One, la société réclame la levée du décret. On peut y lire qu’“une riche tradition d’exploration islamique existe à travers l’histoire” et que “le plus grand voyage de tous les temps doit être ouvert aux musulmans”. Des mesures de sécurités “limitant autant que possible les risques pour la vie humaine” seront mises en place avant même l’atterrissage du premier homme sur la planète rouge, c’est à dire en 2025.

Il peut sembler “extrêmement dangereux d’envoyer des humains sur Mars aujourd’hui, mais les humains seront précédés par au moins huit missions de fret” ajoutent les organisateurs. Puis citant un verset du Coran, la fondation fait valoir que les musulmans y sont encouragés à sortir et voir les signes de la création de Dieu “dans les Cieux et la terre”. “Tout progrès nécessite de prendre des risques, mais dans ce cas, la récompense est le prochain bond de géant pour l’humanité. C’est la récompense, et elle vaut certainement les risques inhérents à cette mission” peut-on lire en conclusion.

Khalid face à l'épreuve

Khalid Al-Jaaidi a 21 ans, il est émirati, a balayé le premier stade des sélections d’un revers de la main. Ils sont 1058 comme lui, notamment des Saoudiens, et la prochaine “épreuve-test-entretiens” est prévue pour avril. Khalid est enthousiaste, son père l’encourage non sans pointer l’aspect carcéral du voyage, sa mère n’y croit pas, ses frères pouffent de rire.

Pour ce jeune diplômé en communication visuelle pour qui “l’infini et l’au delà” ne se limite pas au seul gimmick de Buzz l’Eclair, on ne l’a pas choisi par hasard. Il est doué, a un grand sens de l’adaptation. Il vante l’ambitieux projet qu’il pare de vertus humanistes. Soit, “la plus importante mission pour l’humanité depuis l’alunissage de la mission Apollo”. Khalid préfère ignorer les critiques et affiche une réelle confiance dans l’organisation. “Regardez les, ils sont sérieux, ils embarquent un comité scientifique avec eux”.

Reste que l’aventure est pavée d’imprévus. La fatwa fait figure d‘écueil, Khalid se heurte à un choix cornélien et en musulman pratiquant, il ne dissimule pas son désarroi. “Les autorités religieuses de mon pays ont leurs raisons. Je les respecte. Et je peux les comprendre. Je n’ai donc pas encore pris de décision. C’est un moment délicat pour moi et je vais devoir me positionner même si la société à l’origine de Mars One a demandé aux autorités religieuses de réexaminer leur décision au regard des mesures de sécurité déployées et des ambitions pour l’humanité”.

Le voyage devrait coûter 6 milliards de dollars. Il sera en partie financé par une émission de télé-réalité. Le société néerlandaise aux commandes de Mars One prévoit de filmer en permanence les voyageurs, y compris durant leur installation. Gageons qu’elle comporte son lot d’inconnues, “mais il faut toujours se préparer aux moments difficiles” se défend Khalid.

Reste qu’avec cette fatwa, les épreuves semblent avoir devancé son programme d’entraînement.

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