La loi du bâillon révulse l'Espagne

La loi du bâillon révulse l'Espagne
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Par Euronews
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Une nouvelle loi créé la polémique en Espagne. Cette loi dite “de sécurité citoyenne”, qui entrera en vigueur le 1er juillet, acte contre les

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Une nouvelle loi créé la polémique en Espagne. Cette loi dite “de sécurité citoyenne”, qui entrera en vigueur le 1er juillet, acte contre les différentes formes de protestations citoyennes. Jugée répressive et liberticide par bon nombre d’Espagnols ainsi que par le corps judiciaire, le texte a reçu de nombreux surnoms aussi négatifs les uns que les autres, dont les plus utilisés, « loi gag » ou « ley mordaza”, “loi du baillon” en espagnol, car pour beaucoup, elle met en péril la démocratie du pays, affaiblie depuis l’investiture du gouvernement Rajoy il y a trois ans.

Cette loi prévoit une série de sanctions envers de nombreuses formes de protestations citoyennes. En tout, le texte définit 31 types d’infractions « graves », passibles de jusqu‘à 30 000 euros d’amende, et sept types d’infractions dites « très graves », risquant des amendes pouvant plafonner à 600 000 euros. Concernés, les troubles à l’ordre public au cours d’événements sportifs ou les manifestations lors de la “journée de réflexion”, cette période pré-électorale censée permettre aux citoyens de réfléchir sans aucune influence extérieure. Tout outrage contre les drapeaux ou autres symboles du pays sera passible d’amendes pouvant aller jusqu‘à 30 000 euros. Le texte prohibe en outre les manifestations autour d’institutions publiques comme le Sénat ou le Congrès des députés, équivalent à la Chambre basse du Parlement. Concrètement, ceux qui manquent de respect aux forces de l’ordre ou refusent de décliner leur identité pourront se voir infliger des amendes de plusieurs milliers d’euros, des amendes allant juqu‘à 600 000 euros pour des manifestants en cas de rassemblements non autorisés.

Un arsenal prohibitif qui courrouce les Espagnols, alors que de nombreuses protestations ont lieu à la veille de son entrée en vigueur dans le pays. Les réactions se sont multipliées pour la dénoncer. En mars, une centaine d’organisations espagnoles appelaient à manifester virtuellement, à l’aide d’hologrammes. “Le seul moyen de s’exprimer librement, c’est de devenir un hologramme», défendaient les organisateurs, réunis au sein de la plateforme No somos delito (« nous ne sommes pas un délit »), dans une vidéo diffusée en ligne .

Réactions critiques aussi à l‘étranger. La Ligue des droits de l’homme notamment a jugé la loi contraire à la convention européenne des droits de l’homme et aux recommandations de la Cour européenne des droits de l’homme .

Pour de nombreux spécialistes, cette législation a été une riposte du gouvernement aux mouvements indépendantistes, et plus particulièrement aux mouvements massifs prônant l’indépendance de l’une des 17 communautés autonomes du Royaume d’Espagne, la Catalogne. De fait, le ministre de l’Intérieur avait présenté cette loi le 29 novembre 2013, c’est-à-dire après plusieurs mois de grandes mobilisations en faveur de l’indépendantisme catalan.

Une loi qui ne peut être dissociée des difficultés du Parti populaire au pouvoir, face à la montée du parti de gauche Podemos, et de la vague citoyenne. Aux dernières élections municipales, ils ont mis à mal le bipartisme espagnol, que le PP et le PSOE (Parti Socialiste Ouvrier Espagnol) se partagent depuis la fin du franquisme.
Terreau du succès de Podemos, cette loi incarne aux yeux des citoyens un gouvernement jugé toujours plus conservateur et répressif. La “Ley Mordaza” en muselant les principes démocratiques d’un pays ébranlé par la crise et en pleine mutation sera-t-elle la loi de trop?

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