Violences faites aux femmes : le combat des "survivantes" espagnoles pour briser le silence

Violences faites aux femmes : le combat des "survivantes" espagnoles pour briser le silence
Tous droits réservés euronews
Tous droits réservés euronews
Par Julian GOMEZ
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button
Copier/coller le lien embed de la vidéo de l'article :Copy to clipboardLien copié

À l'occasion de la journée internationale des femmes le 8 mars, des "survivantes" de violences nous racontent leur combat en Espagne, pays doté de l'une des législations les plus protectrices en la matière, mais où les ressources manquent pour l'appliquer.

PUBLICITÉ

L'Espagne dispose de ce qui est largement considéré comme l'une des législations les plus complètes et les plus avancées de l'Union européenne en matière de lutte contre les violences sexistes. Pourtant, l'an dernier, encore 50 femmes ont été assassinées par leur compagnon dans le pays. Ce chiffre, bien qu'inférieur à la moyenne de l'UE par habitant, est resté constant ces dernières années. Pourquoi de telles tragédies se répètent-elles ? Quels sont les résultats et les limites du cadre législatif espagnol ? Pour le savoir, notre reporter Julián López a rencontré dans le sud du pays, des expertes du sujet et, surtout, des "survivantes" comme se font appeler les anciennes victimes espagnoles.

"La violence psychologique, c'est la pire"

Macarena García Pérez a enduré 23 ans de violences conjugales. "C'est de la violence physique, psychologique, économique, sexuelle, sociale, de tout type, mais la violence psychologique, c'est la pire," confie-t-elle. "D'abord parce qu'on ne peut pas la prouver et deuxièmement, parce que, pour surmonter tous ces traumatismes, cela demande beaucoup de travail sur soi," dit-elle.

Aujourd'hui, alors que son ex-mari est en prison après s'en être pris à d'autres femmes après elle, Macarena envisage d'ouvrir un refuge pour chiens. S'occuper d'animaux est pour elle, "très thérapeutique. Vous leur donnez quelque chose qui vous a été refusé," explique-t-elle. "S'ils m'ont aidée, ils peuvent aider d'autres femmes," assure-t-elle.

Euronews
Macarena García Pérez avec l'un de ses chiensEuronews

Organisation qui aide les femmes victimes de violences, la Fundación Ana Bella compte 30 000 bénévoles qui dans 82 pays, apportent une aide juridique et psychologique aux victimes des violences sexistes, mais organisent également des ateliers dédiés à la prévention de ce fléau.

"40% de ces femmes ne portent pas plainte parce qu'elles ne se rendent pas compte qu'elles sont maltraitées," fait remarquer la fondatrice de la fondation, Ana Bella Estévez qui a subi les coups de son compagnon pendant onze ans. "Mais qui peut s'en rendre compte ? Notre entourage, nos collègues de travail qui passent huit heures par jour avec nous," souligne-t-elle. "Nous formons les collaborateurs des entreprises pour qu'ils sachent quoi faire en tant qu'acteurs du changement face aux violences faites aux femmes, repérer les victimes invisibles et les aider à briser le silence," explique-t-elle.

Euronews
Ana Bella Estévez, fondatrice de la Fundación Ana Bella, et deux membres de la fondationEuronews

Des "ressources insuffisantes" pour appliquer la législation

Les avocats de la fondation estiment que la législation actuelle est satisfaisante, mais dénoncent le manque de ressources pour l'appliquer correctement. Par exemple, des ressources sont prévues pour 3500 dispositifs de surveillance électronique afin d'assurer une protection spéciale, or 75 000 femmes maltraitées auraient besoin d'un tel dispositif. Cette insuffisance de moyens conduit de nombreuses victimes à retirer leur plainte.

Même son de cloche du côté des responsables de l'Observatoire espagnol contre les violences familiales et sexistes qui affirment qu'il faut investir davantage dans l'aide sociale, financière et psychologique. 

"Masculinité responsable"

D'autres initiatives sont prises à travers le pays pour enrayer le fléau des violences faites aux femmes et le premier terrain pour agir, c'est l'éducation. 

À Cadiz, David Cerón, éducateur de la Fundación Iniciativa Social (FIS) organise ce jour-là, un atelier sur la "masculinité responsable" auprès de jeunes footballeurs âgés de 12 à 18 ans. 

Et voici les propos qu'il leur tient entre deux exercices physiques : "Il y a des garçons qui croient que, parce qu'ils sont des garçons, ils ont le droit de contrôler les filles et d'exercer cette violence sur les femmes. Agissez vous-mêmes contre ça, sinon personne ne le fera, quel que soit le nombre de lois qui existent," prévient-il.

Euronews
David Cerón et un groupe de jeunes footballeurs lors d'un atelier organisé par la Fundación Iniciativa SocialEuronews

"Dès leur plus jeune âge, ils façonnent leur masculinité et traditionnellement, cette masculinité est étroitement liée à l'exercice du pouvoir, à la violence," constate le jeune homme. "Donc, plus tôt ils commenceront à comprendre que ce n'est pas en étant violents ou en montrant davantage leur force, qu'ils seront plus masculins, plus ils pourront petit à petit créer des environnements beaucoup plus égalitaires et plus sains," estime l'éducateur.

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

Sénateur français mis en examen: l'accusatrice sort du silence, la pression monte sur Joël Guerriau

La liberté de montrer ses seins : pourquoi le geste de la chanteuse Amaral est-il important ?

Le parlement espagnol va examiner un projet de loi pour régulariser des sans-papiers