Loi immigration : Emmanuel Macron défend le "bouclier" qui manquait au pays

Emmanuel Macron sur le plateau de l'émission de France 5
Emmanuel Macron sur le plateau de l'émission de France 5 Tous droits réservés LUDOVIC MARIN/AFP or licensors
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Par euronews avec agences
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Alors que sa majorité s'est fracturée lors du vote de la loi immigration et qu'un de ses ministre a démissionné, le président français a défendu mercredi soir le texte controversé.

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Malgré les critiques et les vives divisions qui secouent son camp et rejetant également les accusations de compromission avec l'extrême droite, Emmanuel Macron a vigoureusement défendu mercredi soir la loi controversée sur l'immigration, comme "un bouclier qui nous manquait".

"Que ça heurte certains parlementaires, que ça heurte des ministres, que ça vous bouscule, c'est légitime", a estimé le chef de l'Etat, invité de l'émission "C à Vous" sur France 5 en direct de l'Elysée. Il a ainsi dit "respecter" la démission de son ministre de la Santé Aurélien Rousseau, en désaccord avec le texte adopté mardi soir dans la douleur à l'issue d'un compromis avec la droite adoubé à la dernière minute par le Rassemblement national.

Des dizaines de voix de députés macronistes ont manqué à l'appel, et le RN de Marine Le Pen a revendiqué "une victoire idéologique" sur une de ses antiennes historiques, la préférence nationale.

De leur côté, 32 départements de gauche ont annoncé qu'ils n'appliqueraient pas une mesure de la loi jugée "injuste" et "inefficace" qui vise à durcir les conditions de versement aux étrangers de l'Allocation personnalisée d'autonomie.

"La loi s'impose à tous, surtout quand on est élu par le peuple français",  leur a répondu le ministre de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire.

"Ce n'est pas vrai" que le texte comporte "des dispositions qui sont de nature Rassemblement national", a rétorqué Emmanuel Macron à la télévision, assurant qu'il constituait même "une défaite" pour le parti d'extrême droite car il prévoit des régularisations de sans-papiers.

S'il a reconnu que certaines mesures ne le faisaient pas "sauter au plafond", comme la caution demandée aux étudiants étrangers qui n'est "pas une bonne idée", il a assuré qu'elles ne "justifiaient pas de tout bloquer".

Il a ainsi expliqué que la loi visait "très clairement" à décourager l'immigration clandestine qui est selon lui un "problème" en France, même s'il a rejeté l'idée que le pays serait "dépassé par l'immigration".

Le président a semblé vouloir faire de son texte controversé une arme contre l'extrême droite, estimant que pour "mieux protéger le pays" il fallait parfois avoir recours à "des choses qui peuvent choquer des gens" mais "qui à mes yeux sont efficaces".

Pour éviter que le RN arrive au pouvoir, il "faut traiter les problèmes qui le nourrissent" et "montrer qu'il y a une réponse dans le champ républicain conforme à nos valeurs", a-t-il plaidé, ajoutant qu'il comptait continuer à agir dans les trois ans et demi de mandat qui lui restent.

Dès mercredi matin, l'exécutif était monté au créneau pour tenter de tourner la page de la journée cauchemardesque de la veille, épilogue de 18 mois de revirements et rebondissements.

"Il n'y a pas de crise dans la majorité", a assuré la Première ministre Élisabeth Borne sur France Inter. "Il n'y a pas de mouvement de fronde ministérielle", a aussi relativisé le porte-parole du gouvernement Olivier Véran après un Conseil des ministres marqué par l'absence d'Aurélien Rousseau, ancien directeur de cabinet d'Élisabeth Borne à Matignon.

Faire "bloc"

L'attitude de plusieurs ministres de l'aile gauche de la macronie, dont certains avaient mis leur démission dans la balance mardi, était particulièrement scrutée. Celui des Transports Clément Beaune s'est fait interpeller par la gauche dénonçant une "trahison" lors d'une séance du Conseil régional d'Ile-de-France. Il a simplement indiqué qu'il aurait "l'occasion de parler".

Pour éteindre l'incendie, Emmanuel Macron a immédiatement saisi, conformément à son engagement, le Conseil constitutionnel pour qu'il puisse "statuer sur la conformité de tout ou partie de cette loi".

Conformité que la Première ministre a elle-même reconnue fragile. Le texte "sera amené à évoluer", a-t-elle expliqué, n'excluant pas de "revenir" aussi sur certaines dispositions comme les aides personnalisées au logement, qui ont cristallisé les derniers débats.

Des déclarations qui jettent un doute sur la détermination du chef de l'État à appliquer le texte, estime le patron des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau, l'un des artisans de l'accord avec le gouvernement sur la loi.

Il a appelé le chef de l'Etat à "respecter le choix des parlementaires".

"Le Conseil constitutionnel n'est pas la lessiveuse des consciences", a réagi le patron du Parti socialiste Olivier Faure. Sur le même terrain, l'ex-président François Hollande a estimé qu'Emmanuel Macron et son gouvernement avaient "pris" les "idées" de l'extrême droite.

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Elisabeth Borne a aussi assuré que l'Aide médicale d'État (AME) pour les étrangers sans papiers ne serait "pas supprimée", même si elle s'est engagée auprès de la droite à la réformer début 2024.

Plusieurs figures de la majorité ne cachaient pas mercredi leur gêne, accentuée par le ralliement de Marine Le Pen à ce texte qui a pour but de faciliter les expulsions de migrants illégaux et de rendre moins attractif pour les étrangers le système de protection sociale français.

Le président de la commission des Lois Sacha Houlié, qui a voté contre, a dit avoir "un peu la gueule de bois". La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a admis qu'elle "n'aurait pas rédigé 100% du texte" et que "la majorité vivait un moment plutôt douloureux".

Au contraire, l'ex-Premier ministre Edouard Philippe, l'un des favoris pour la présidentielle de 2027 et tenant de l'aile droite de la macronie, a salué "un compromis entre la majorité et LR" qui "crée des instruments dont nous avons besoin".

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