Qu'est-ce qui explique le problème du vieillissement de l'Italie ?

Une femme âgée se déplace à l'aide d'un déambulateur devant l'hôtel de ville du XIVe siècle, le Palazzo Vecchio (vieux palais), à Florence, en Italie, le jeudi 17 février 2022.
Une femme âgée se déplace à l'aide d'un déambulateur devant l'hôtel de ville du XIVe siècle, le Palazzo Vecchio (vieux palais), à Florence, en Italie, le jeudi 17 février 2022. Tous droits réservés AP Photo/Domenico Stinellis
Tous droits réservés AP Photo/Domenico Stinellis
Par Giulia Carbonaro
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Cet article a été initialement publié en anglais

La baisse du taux de natalité et l'augmentation des chances de survie des personnes âgées ont considérablement fait vieillir la population italienne, au point que les économistes s'inquiètent de l'avenir du pays.

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Le problème du vieillissement de la population italienne commence à peser sur la "dolce vita", célèbre dans le monde entier.

Le nombre croissant de retraités est loin d'être compensé par le nombre de nouveaux-nés.

Les efforts déployés par le gouvernement de droite de Giorgia Meloni pour stimuler les taux de natalité n'ont pas encore permis d'inverser la tendance au déclin démographique de l'Italie.

Selon les dernières données d'Eurostat, l'Italie est le pays le plus âgé de l'Union européenne, la moitié de la population ayant actuellement un âge médian moyen supérieur à 48 ans.

Avec le Portugal, l'Italie a le pourcentage le plus élevé de résidents âgés de plus de 65 ans, à savoir 24 %, soit environ un sur quatre.

Cette augmentation reflète une tendance européenne, l'Union européenne ayant connu une augmentation globale de son âge médian (44,5 ans). Le nombre de personnes âgées représente désormais plus d'un cinquième de la population de l'Union.

"Cependant, ce qui est encore plus significatif, c'est la tendance au vieillissement au sein de la population âgée italienne elle-même", explique; à Euronews, Cecilia Tomassini, professeur de démographie et de statistiques sociales à l'université de Molise.

"Plus précisément, la proportion d'individus âgés de 80 ans et plus a atteint 7,7 % de la population totale, une augmentation notable par rapport aux 3,3 % enregistrés en 1991", ajoute-t-elle.

Des personnes attendent d'être évacuées de Giampilieri près de Messine, dans le sud de l'Italie, samedi 3 octobre 2009
Des personnes attendent d'être évacuées de Giampilieri près de Messine, dans le sud de l'Italie, samedi 3 octobre 2009Carmelo Imbesi/AP2009

"En fait, alors que la population totale a augmenté de 3,4 % depuis 1991, le segment des personnes âgées de 80 ans et plus a plus que doublé au cours de la même période".

"Mais les "nonni" italiens - figures bien aimées dans le pays comme à l'étranger - ne sont pas le problème", affirme, à Euronews, Giovanni Lamura, de l'Institut national italien de la santé et des sciences sur le vieillissement.

"L'allongement de la durée de vie devrait être un objectif de l'agenda politique de tout gouvernement national", déclare-t-il. "Le problème est que les taux de fertilité en Italie sont bas. Nous avons de moins en moins d'enfants".

Comment l'Italie est-elle devenue si vieille ?

La raison du vieillissement de la population italienne est simple : le nombre de décès, dû au vieillissement de la population, dépasse de loin le nombre de naissances.

"Au cours des 40 dernières années, le nombre médian d'enfants par famille, en Italie, a été inférieur à 1,5", souligne, à Euronews, Alessandro Rosina, professeur de démographie et de statistiques sociales à l'Università Cattolica di Milano. "Les données les plus récentes sont inférieures à 1,24 par femme", ajoute-t-il.

Un taux de 2 naissances par femme est nécessaire pour maintenir une population stable.

Cette baisse des taux de fécondité a commencé dans les années 1980, selon Cecilia Tomassini, bien qu'avec des fluctuations occasionnelles.

Le drapeau italien flotte lors d'une réunion bilatérale entre l'Italie et la Russie, à Trieste, Italie, mardi 26 novembre 2013
Le drapeau italien flotte lors d'une réunion bilatérale entre l'Italie et la Russie, à Trieste, Italie, mardi 26 novembre 2013Luca Bruno/AP

"Les flux migratoires n'ont ralenti ce processus de vieillissement que de manière marginale", explique-t-elle. "Dans le cas contraire, son impact aurait été considérablement plus prononcé".

Si, pendant une période, ce solde négatif a été compensé par un taux plus élevé de migration positive, "ce n'est plus le cas", affirme Cecilia Tomassini. "Par conséquent, le déclin de la population en Italie s'accentue".

Le fait que les personnes âgées en Italie vivent plus longtemps est en fait une nouvelle positive, affirme Giovanni Lamura.

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"Les gens ont pu vivre plus longtemps grâce à des politiques bénéfiques, à des pensions généreuses et à un système de santé gratuit qui a permis à ceux qui n'en avaient pas les moyens de recevoir des soins", précise-t-il encore. 

Mais il y a un revers à la médaille.

Giovanni Lamura affirme que le pays n'a pas autant investi dans les jeunes générations qu'il ne l'a fait pour les précédentes.

"L'Italie devrait faire plus pour aider financièrement les jeunes familles, mais elle a une dette énorme [140,6 % de son PIB total en septembre 2023] qui fait l'objet d'une surveillance internationale, et elle ne peut donc pas se permettre de s'endetter davantage avec de nouvelles politiques généreuses en faveur de la famille", souligne-t-il.

"En Italie, les gens projettent et rêvent d'avoir des enfants et de fonder une famille, tout comme les autres Européens. Ce qui manque, ce sont des politiques adéquates pour soutenir la réalisation de ces projets et de ces rêves", affirme Alessandro Rosina.

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"En Italie, l'âge moyen auquel les parents ont leur premier enfant est l'un des plus élevés d'Europe, principalement parce que les jeunes ont du mal à entrer sur le marché du travail et à trouver des emplois stables, et parce qu'ils rencontrent des difficultés pour accéder à la propriété".

Ceux qui ont des enfants sont ensuite confrontés au défi de jongler entre vie familiale et vie professionnelle dans un pays qui manque à la fois de soutien économique et d'infrastructures adéquates pour les jeunes parents et leurs enfants.

"En Italie, la naissance d'un enfant est susceptible de représenter une détérioration des conditions économiques des parents, ainsi qu'une complication de leur vie d'un point de vue organisationnel, plus que dans d'autres pays", déclare Alessandro Rosina.

"Les politiques limitées du pays visant à soutenir les jeunes familles envoient le message négatif qu'avoir une famille n'apporte pas de valeur à la communauté et ne mérite pas d'être soutenu."

Quel avenir pour l'Italie ?

Pour Cecilia Tomassini, le vieillissement de la population italienne et la baisse des taux de natalité devraient se poursuivre à l'avenir.

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Et ce, "à moins d'interventions significatives, telles que des crises de mortalité ou un nouveau baby-boom", précise-t-elle. "À court terme, les migrations pourraient constituer une variable importante susceptible d'influencer la dynamique de la population, bien qu'elles soient politiquement difficiles à gérer".

Le gouvernement de Giorgia Meloni a fait de l'augmentation des taux de natalité l'une de ses priorités, mais n'a pas réussi à obtenir de résultats concrets jusqu'à présent.

La députée de droite a réduit de moitié la TVA sur les couches et le lait pour bébés, mais les services de garde d'enfants restent chers et difficilement abordables pour de nombreuses personnes.

La plus grande crainte pour le pays est que sa croissance économique, déjà faible, continue à décliner, et que l'Italie finisse par ne plus avoir les moyens de financer son système de retraite et de protection sociale.

"Si les taux de fécondité restent inchangés, l'Italie pourrait ne compter que 320 000 nouveaux-nés dans 25 ans, avec une structure démographique de plus en plus déséquilibrée", assure Alessandro Rosina.

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"Il ne s'agit pas d'un avenir dystopique, mais simplement du scénario le plus probable compte tenu de la dynamique actuelle. Si l'Italie ne suit pas l'exemple des meilleures politiques européennes dans ce domaine, le développement et la viabilité sociale du pays seront menacés au cours des prochaines décennies".

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