Rencontre avec les frères Dardenne, lauréats du Prix Lumière du festival 2020 du même nom à Lyon, mais aussi avec Thomas Vinterberg pour son film "Drunk" et Charlène Favier pour "Slalom", tous deux sélectionnés par le festival.
Le Festival Lumière a attribué son Prix 2020 aux frères Dardenne à Lyon, succédant ainsi à Francis Ford Coppola.
L'actrice Émilie Dequenne découverte par les "Frères" dans Rosetta, Palme d'or à Cannes, en témoigne :
Les frères, double Palme d'or à Cannes, sont les auteurs d'une œuvre immense qui marquera l'histoire du cinéma. Ils ont été accueillis sur la chanson intitulée "Vesoul" de leur compatriote Jacques Brel.
"Formidable !" s'exclame Luc Dardenne après avoir reçu le Prix. "Émouvant, bouleversant..." renchérit Jean-Pierre Dardenne. "On avait vu Vesoul, mais Lyon, on n'avait jamais vu !" ajoute Luc Dardenne dans un sourire.
"Une petite filiation entre les frères Lumière et nous"
Le Prix Lumière se veut un peu l'équivalent d'un Prix Nobel qui existe pour la littérature, mais pas pour le cinéma.
Les deux frères ont confié à Euronews, leur connexion avec les inventeurs du cinématographe et la légitimité de recevoir ce Prix Lumière.
Des cinéastes qui ont toujours été au plus près du réel et de leurs personnages, souvent aux marges... Leur dernier film primé à Cannes en 2019, Le Jeune Ahmed parlait avec prémonition d'un jeune radicalisé qui tente de poignarder son enseignante, en résonance douloureuse avec l'acte terroriste perpétré contre un professeur en France.
Le festival Lumière a accueilli 23 films de la Sélection officielle de Cannes 2020, qui n'a pas eu lieu physiquement, dont le film Drunk, récemment primé à San Sebastian et à Londres de Thomas Vinterberg, l'un des invités d'honneur aux côtés d'Oliver Stone notamment.
Des classiques restaurés aux avant-premières cannoises...
Retour aux sources même du cinéma, avec des projections Rue-du-Premier-Film, à l'Institut Lumière mais aussi dans plus de 40 salles de la Métropole de Lyon.
**Films classiques, copies restaurées, hommage, rétrospectives, il y en avait pour tous les goûts et le public s'est déplacé malgré les conditions sanitaires. Le regard était aussi tourné vers l'avenir. **
Parmi les autres films de la sélection officielle cannoise, le premier film d'une régionale de l'étape, Charlène Favier, qui présenta au Cinéma Comoedia Slalom, en présence de l'actrice principale, Noée Abita et d'une grande partie de l'équipe du film, tourné et co-produit en région par Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma. Le film sort sur les écrans français le 4 novembre.
Ce film semi-autobiographique qui aborde la question du harcèlement sexuel dans le sport a été écrit des années avant le mouvement #MeToo. Y figure Jérémie Renier, l'un des acteurs révélés par... les frères Dardenne.
Le Festival Lumière, du passé à l'avenir du cinéma...
Quand aux frères cinéastes, comme de tradition, ils ont aussi tourné leur remake du premier film de l'histoire du cinéma, "La Sortie des usines Lumière", à l'endroit même ou les autres frères, Louis et Auguste Lumière, inventeurs et cinéastes, actionnait pour la fois leur Cinématographe, qui donnera dans la foulée naissance à la salle de cinéma.
Dans leur remake cette année, les Dardenne ont ajouté des angles de prises de vues, mettant notamment au point le départ filmé caméra épaule de leur "Rosetta", Emilie Dequenne, sur le porte-bagage d'une bicyclette, dans cette Rue-du-Premier-Film, qui s'appelait en 1895, Chemin Saint-Victor. Devant la caméra, les acteurs du monde du cinéma, masqués, ont remplacé les ouvriers. Un signe des temps, forcément symbolique.
125 ans après, le cinéma était devenu une industrie extrêmement florissante avant la pandémie de la Covid-19. Le film est et restera toujours un produit phare de l'industrie culturelle, mais la salle de cinéma est gravement touchée, avec aussi l'habitude, notamment des nouvelles générations nées à l'ère du digital, de visionner directement sur les plateformes les nouvelles productions, y compris hollywoodiennes. La dernière production de Pixar, Soul, sélectionné à Cannes, a aussi été montrée pendant le festival, une réussite cinématographique qui, malheureusement, sortira directement sur les plateformes Disney.
Mais il n'y aura pas de mort du cinéma, comme l'a répété justement Thierry Frémaux tout au long du festival qu'il dirige. Le Festival Lumière, a d'ailleurs initié depuis 2013 un Marché International du Film Classique, dédié à la filière patrimoine du cinéma, dont les formes de diffusion se diversifient, intéressant notamment les plateformes.
Les films d'aujourd'hui seront les films de patrimoine de demain, et le Festival Lumière a plus que jamais réussi, en cette année, si particulière, à réunir le passé et l'avenir du cinéma.