"Polluants éternels" : en France, le difficile combat des riverains de l'usine Arkema

L'usine du groupe chimique Arkema, à Pierre-Bénite, 19/06/2023
L'usine du groupe chimique Arkema, à Pierre-Bénite, 19/06/2023 Tous droits réservés euronews
Tous droits réservés euronews
Par Anne DevineauxNathalie Texier (montage)
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button
Copier/coller le lien embed de la vidéo de l'article :Copy to clipboardLien copié

Le géant français de la chimie est visé par une action en justice d'associations et d'habitants de Pierre-Bénite, au sud de Lyon, un des sites les plus touchés en France par la pollution aux PFAS, des perfluorés très toxiques et persistants dans l'environnement.

PUBLICITÉ

Aux portes de Lyon, à Pierre-Bénite, l’usine du géant français de la chimie Arkema est au cœur des accusations. Pendant des décennies, des tonnes de PFAS, connus sous le nom de polluants éternels, ont été rejetés dans l’environnement et notamment dans le Rhône.

Les riverains du site industriel ont découvert le scandale après une vaste enquête journalistique publiée il y a plus d’un an. Depuis, l'inquiétude grandit. Comment savoir si les cas de cancers déclarés sont liés ou non aux rejets de PFAS ? 

Thierry Mounib, président de l’association "Bien vivre à Pierre-Bénite", se bat pour obtenir des réponses. "Tous les jours, j’ai des parents qui viennent me voir et qui me disent voilà ce qui se passe dans ma famille. (...) Certains m'ont expliqué être "parti de Pierre-Bénite quand leur enfant est mort, il avait 9 ans, un cancer des testicules. Est-ce que ça peut avoir quelquechose à faire avec les PFAS ? Peut-être, parce ce que c’est un cancer qui peut être lié aux PFAS", explique-t-il.

Une nouvelle enquête de médias locaux a dévoilé des taux alarmants de contamination dans le sang des riverains. Thierry Mounib dénonce aussi l’inaction des politiques.

Un enfant est mort. Il avait 9 ans, un cancer des testicules. Est-ce que ça peut avoir quelquechose à voir avec les PFAS ? Peut-être...
Thierry Mounib, président de l'association "Bien vivre à Pierre-Bénite"

Sol, air, eau, ces composés perfluorés ultratoxiques et persistants se retrouvent partout. Dans le jardin ouvrier à proximité de l’usine, les conversations oscillent entre inquiétude et colère.

Des riverains et des associations ont lancé le 25 mai dernier une action en justice, un référé pénal environnemental, à l’encontre d’Arkema. Objectif : faire payer au groupe une étude sanitaire sur le long terme, mais aussi réclamer une limitation immédiate des rejets toxiques.

Anne Devineaux, euronews
Jardin ouvrier situé près de l'usine chimique Arkema, à Pierre-Bénite, 19/06/2023Anne Devineaux, euronews

Camille Panisset, est la responsable locale de l'association spécialisée dans la justice climatique "Notre Affaire à Tous". "Arkema produit des PFAS depuis 1957", rappelle-t-elle. "Et il y a eu selon le rapport de l’IGEDD (Inspection générale de l’environnement et du développement durable), 3,5 tonnes de PFAS rejeté dans le Rhône par an. Depuis octobre dernier suite à un arrêté préfectoral, ils ont commencé à filtrer. Aujourd’hui on est encore à une dizaine de kilos par mois. Dans le référé on demande à ce que ce soit en dessous d’un kilo".

Sollicité Arkema n’a pas souhaité commenter la procédure judiciaire. Le groupe souligne dans une réponse écrite que : "le secteur de la chimie est parmi les plus réglementés de l’industrie en France et les réglementations environnementales françaises et européennes sont parmi les plus strictes dans le monde".

Vers une interdiction des PFAS dans l'UE ?

Dans l’UE, le règlement REACH qui encadre l’utilisation des substances chimiques,  doit être prochainement révisé. Parmi les avancées envisagées : évaluer les produits chimiques non pas, substance par substance, mais par famille de produits, une approche particluièrement adaptée aux PFAS, qui compte plus de 10 000 substances.

"Une partie des perfluorés ont été interdits par la législation européenne, mais une grande partie, plus de 10 000 substances de la famille sont aujourd’hui encore autorisés en Europe", précise_Marie Toussaint, eurodéputée française EELV, "et on a très peu de contrôle en réalité sur l'état des eaux, des sols et sur les riverains qui peuvent être aujourd'hui intoxiqués".

Arkema est l’une des firmes qui se bat pour ne pas réviser le règlement REACH sur les produits chimiques au niveau européen
Marie Toussaint
Eurodéputée française, EELV

Ces derniers mois, cinq Etats européens (Pays-Bas, Allemagne, Danemark, Norvège, et Suède) ont demandé l’interdiction des PFAS, une requête en cours d’évaluation. A Bruxelles, la bataille avec les industriels fait rage.

"Arkema est l’une des firmes qui se bat à la fois pour ne pas réviser le règlement REACH sur les produits chimiques au niveau européen mais aussi pour que les dérogations soient accordées par centaines dans le cadre de l’interdiction à venir et qu’on espère des PFAS sur le territoire européen", explique la députée européenne.

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

Le vin européen menacé par des conditions météorologiques extrêmes

Élections européennes : quelles sont les ambitions vertes des différents partis ?

Deux pays d'Europe sont alimentés à 100 % par des énergies renouvelables grâce à la montée en flèche de la capacité éolienne