Pacte européen sur l'immigration : une "nouvelle ère de surveillance numérique" ?

Les groupes de défense des droits dénoncent le nouveau pacte de l'UE sur l'immigration
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Par Anna Desmarais
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La mise en garde d'une coalition de groupes européens de défense des droits numériques intervient après l'adoption d'une législation controversée sur le futur de l'immigration en Europe.

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Une coalition d'associations européennes de défense des droits numériques affirme que le nouveau pacte de l'Union européenne sur la migration et l'asile, d'une portée considérable, "ouvrira une nouvelle ère dangereuse de surveillance numérique".

La coalition Protect Not Surveil ("Protéger, Pas Surveiller"), qui comprend des groupes tels que Border Violence Project, Privacy International et Access Now, a déclaré dans un communiqué que le pacte "représente un nouvel ancrage des technologies de surveillance dans l'UE".

"Il représente une nouvelle érosion des droits fondamentaux et la normalisation de la surveillance numérique en Europe, justifiée par une approche de la politique migratoire basée sur la répression plutôt que sur les droits".

L'année dernière, l'UE a reçu 1,14 million de demandes d'asile et de protection et a enregistré 380 000 franchissements irréguliers des frontières.

L'adoption de ce pacte européen vient mettre un terme à une impasse de plusieurs années sur la nouvelle législation sur l'immigration. 

Il est décrit par la Commission européenne comme un "ensemble de nouvelles règles gérant les migrations et établissant un système d'asile commun", qui est "ferme, mais juste".

Euronews Next a contacté la Commission pour obtenir un commentaire, mais nous n'avons pas reçu de réponse à l'heure de cette publication.

"Dangereusement vague et imprécis"

La nouvelle législation prévoit ce que la Commission appelle un "examen approfondi" des personnes qui ne remplissent pas les conditions d'entrée dans l'UE, y compris des contrôles de santé et de sécurité.

Les demandeurs d'asile seront ensuite soumis à l'une des deux étapes suivantes : une demande d'asile traditionnelle ou une demande d'asile accélérée qui durera environ 12 semaines.

Les personnes identifiées comme présentant un risque [...] seront soumises à une procédure accélérée comportant moins de garanties.
Coalition "Protect Not Surveil"

La procédure accélérée est destinée aux personnes que la Commission identifie comme présentant un "risque pour la sécurité nationale", fournissant des "informations trompeuses" ou provenant de pays où le taux de reconnaissance des demandes d'asile est faible.

La coalition considère les concepts de sécurité énoncés dans le pacte comme "dangereusement vagues et imprécis", et affirme qu'ils pourraient laisser le champ libre aux fonctionnaires des frontières pour recourir à des "pratiques discriminatoires" en ce qui concerne les décisions sur la durée des demandes d'asile.

"Les personnes identifiées comme présentant un risque [...] seront soumises à une procédure accélérée comportant moins de garanties", peut-on lire dans la déclaration.

Les demandeurs d'asile soumis au programme accéléré seront détenus à la frontière pendant la durée de la procédure dans des "centres de détention", où ils pourront bénéficier des services d'interprètes et de conseils en attendant que leur demande soit traitée.

La coalition craint que ces centres de détention soient construits sur le même modèle que les trois centres actuels de réfugiés "modèles" en Grèce, qui s'appuient "sur une surveillance de haute technologie pour contrôler les personnes".

Ces centres utilisent des détecteurs de mouvement, des caméras et un système d'accès par empreintes digitales, poursuit la coalition.

"Loin d'être considéré comme un 'dernier recours', le pacte prévoit l'expansion de la détention à travers l'Europe", indique la déclaration.

Des pratiques numériques potentiellement invasives

Le Pacte élargit également la base de données Eurodac sur les migrants et les demandeurs d'asile. Il s'agit d'une collection de toutes les empreintes digitales des personnes ayant franchi les frontières de manière clandestine. L'Europe a modifié cette base de données à plusieurs reprises depuis sa création en 2003.

Le système Eurodac élargi collectera désormais des photos de visages, des copies de passeports ou d'autres documents d'identité, ainsi que d'autres types de "données d'identité".

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Certaines de ces données, non spécifiées, seront conservées pendant cinq ans, d'autres pendant dix ans.

Les données des enfants de six ans et plus seront également collectées, ce qui, selon la Commission, aidera la police à identifier les enfants "vulnérables à la traite et à l'exploitation des êtres humains".

Grâce à ces informations, Eurodac sera en mesure d'empêcher une personne de déposer plusieurs demandes d'asile.

La coalition affirme que la collecte de données pourrait accroître la "répression des défenseurs des droits de l'homme", car les données d'identité seront échangées avec les autorités compétentes à chaque étape de la procédure d'asile.

Le pacte prévoit également qu'à tout moment de cette procédure, les demandeurs pourront faire l'objet d'une fouille de leurs effets personnels "conformément à la législation nationale", si les autorités européennes le jugent nécessaire.

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La coalition affirme que ces fouilles pourraient ouvrir la voie à des "pratiques intrusives", telles que l'extraction de données de téléphones portables pour trouver des informations qui contredisent une demande d'asile. Selon la coalition, ces procédés sont déjà utilisés dans plusieurs pays européens, comme l'Allemagne et le Danemark.

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