Chypre : faux-pas du chef de l'Eurogroupe

Chypre : faux-pas du chef de l'Eurogroupe
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Par Euronews
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Le feuilleton chypriote et sa dramaturgie ont-ils fini d’aller crescendo? Rien n’est moins sûr. Alors que la réouverture des banques est de nouveau retardée sur l‘île, le plan validé à l’arraché par l’Eurogroupe ne lève pas les inquiétudes. Une déclaration du chef de l’Eurogroupe, le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem, y a même contribué. Il laissait entendre que la solution consistant à ponctionner les dépôts pourrait servir de précédent.

“ Nous pensons que la bonne solution a été trouvée pour le cas spécifique chypriote. Cela ne veut pas dire que c’est un modèle parfait ou qu’il faudrait réutiliser à l’avenir “ , a dû rectifier une porte-parole de la Commission européenne.

Précision faite, Chypre est donc bien une exception, tout comme l’avait été la Grèce, ce qui justifierait les grosses pertes infligées aux épargnants au-delà de 100.000 euros. Pour l’analyste Daniel Gros, l’Eurogroupe ne doit pas pour autant servir de bouc émissaire :

“ L’Eurogroupe était le dernier maillon, les instructions venaient de plus haut. Et il a dû attendre longtemps ces instructions. Donc vu les conditions, je pense qu’un bon travail a été fait”, assure-t-il.

euronews a aussi interviewé un professeur de Finance chypriote, Alekos Michaelides, proche du président Anastasiades. En voici la retranscription :

Euronews : “ La décision a été prise en haut lieu, et l’Eurogroupe a servi de chambre d’enregistrement. Pensez-vous que l’Europe a échoué à gérer la crise chypriote avec un premier fiasco, puis cette solution ? “

Alekos Michaelides : “ Toute la crise a commencé avec l’effacement partiel de la dette grecque qui a mis les banques en grande difficulté, et la semaine dernière, la décision de faire participer le secteur bancaire a provoqué la fermeture des banques, mais hier nous avons eu un accord dont nous espérons qu’il nous conduira hors de la crise. “

euronews : “ Le ministre allemand des Finances estime qu’il y a encore un risque de faillite. S’agit-il de pressions pour obtenir davantage de concessions à l’avenir ? “

Alekos Michaelides : “ Je suis d’accord avec sa prévision. La situation est difficile parce que nous devons limiter la fuite des capitaux et qu’il y aura ensuite une réduction du PIB et donc une hausse de la dette par rapport au PIB. Nous devons donc voir comment le gouvernement gèrera cette situation économique durant les prochains mois. “

euronews : “Pensez-vous que l’Europe a sanctionné Chypre pour avoir dit non au premier plan ? “

Alekos Michaelides : “ D’un côté, oui, parce que cette solution est plus radicale que la précédente. La difficulté, ce sera le transfert des dettes la banque Laïki et notamment de ses dettes envers la banque centrale européenne vers la Bank of Cyprus, et c’est pour cela que beaucoup de gens se plaignent. “

euronews : “ Y aura-t-il des conséquences sociales, des pertes d’emplois ? “
Alekos Michaelides : “ Il y aura d’emblée une légère hausse du chômage en raison de la mise en faillite de Laïki, qui sera scindée entre une bonne et une mauvaise banque. “

euronews : “Est-ce que le niveau de ponction sur les dépôts dépassant 100.000 euros chez Bank of Cyprus a été décidé ? “

Alekos Michaelides : “ Non, ce n’est pas encore décidé. Cela fait partie de la négociation et des calculs en cours. Ce sera sans doute connu la semaine prochaine. “

euronews : “ Jeroen Dijsselbloem a laissé entendre que cette solution pourrait être utilisée pour d’autres pays. Pensez-vous que Chypre serve de cobaye ? “

Alekos Michaelides : “ C’est aller un peu loin. Il est logique que quand une banque perde de l’argent, certains doivent payer. D’abord les actionnaires, ensuite les créanciers de la banque et maintenant les déposants. mais il est important que les déposants sous la barre des 100.000 euros soient protégés. “

euronews : “ Les banques vont rouvrir jeudi. Que se passera-t-il ? Quel est le plan du gouvernement ? Comment éviter une fuite des capitaux ? “

Alekos Michaelides : “ C’est en discussion. Pour l’instant, il n’y a rien à annoncer. Mais je pense que chacun devra savoir ce qu’il pourra faire lorsque les banques rouvriront. “

Le plan de sauvetage du système bancaire chypriote

  • Ce plan de sauvetage se traduit par une importante restructuration du secteur bancaire de l‘île.

  • La deuxième banque du pays, la Laiki Bank (dite “Popular Bank” en anglais), sera mise en faillite. Elle sera scindée entre une “bad bank”, structure de défaisance amenée à disparaître progressivement, et une “good bank”, où seront regroupés les dépôts inférieurs à 100 000 euros, qui bénéficient d’une garantie publique dans l’Union européenne (UE).

  • La première banque du pays, la Bank of Cyprus, reprendra à terme les dépôts garantis de Popular Bank. Elle reprendra aussi les dettes de Popular Bank envers la Banque centrale européenne (BCE), qui s‘élèvent à 9 milliards d’euros. Cette dernière continuera d’apporter des liquidités à la Bank of Cyprus.

  • Une ponction d’environ 30% à 40% sera appliquée sur les dépôts auprès de la Bank of Cyprus à compter de 100 000 euros. Ces dépôts seront donc gelés, et serviront à régler les dettes de Laïki, et à recapitaliser la Bank of Cyprus.

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