La reprise économique incitera-t-elle les émigrés irlandais à rentrer au pays ?

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La crise a contraint des milliers d’Irlandais à l’exil. Le pire est-il désormais derrière eux ? Vont-ils rentrer des États-Unis, d’Asie ou

La crise a contraint des milliers d’Irlandais à l’exil. Le pire est-il désormais derrière eux ? Vont-ils rentrer des États-Unis, d’Asie ou d’Australie ? La réponse dans ce nouveau numéro de Reporter

Joe Gilligan est aux anges : il retrouve enfin sa grande sœur après 2 ans d’absence.

Comme de nombreux Irlandais, Mary Gilligan a fait le choix de l’expatriation au lendemain de la crise financière. Direction l’Australie qu’elle a sillonnée de long en large, tour à tour ouvrière agricole ou serveuse.

Une parenthèse enrichissante et dépaysante qu’elle vient de refermer. Les balbutiements de la reprise économique l’ont, en effet, incitée à plier bagage et à retourner en Irlande :

“On a fait des trucs cools comme de la plongée, du saut à l‘élastique, on est allé dans l’Outback australien tondre des moutons. On a appris à pêcher et à se servir d’un fusil.
Quand on a décidé de rentrer en Irlande, j‘étais très motivée, un peu préoccupée aussi. On s’inquiétait de savoir si on allait trouver du travail, même si on avait entendu parler de la reprise économique en Irlande.
Mais, c‘était vraiment chouette de pouvoir se dire :qu’on rentrait chez nous et qu’on allait retrouver nos proches et nos amis.”

Kieran, le frère ainé de Mary, a lui aussi émigré un temps en Australie. Leur mère, Shirley Gilligan, est ravie de les avoir retrouvés, forts d’une nouvelle expérience :

“Ils ont gardé espoir et continué d’aller de l’avant. Quand ils sont rentrés à la maison, ils avaient gagné en sagesse. C’est super d’avoir Kieran et Mary, ici, à nouveau.”

En Australie, Mary est tombée amoureuse d’un compatriote. Ensemble, ils ont décidé de donner une seconde chance au Vieux continent.

Situé sur la côte atlantique, dans l’Ouest de l’Irlande, Kilrush a toujours fait figure de terre d‘émigration. C’est ici que nous avions rencontré Mary pour la première fois, en 2012, peu de temps avant son départ.

Alors que le pays semble progressivement sortir la tête de l’eau, comme elle, certains membres de la diaspora irlandaise commencent à revenir. Évidemment, tout n’est pas rose. Si Mary a trouvé un emploi près de chez elle, son compagnon, lui, travaille pour le moment à Londres :

“Une fois rentrée en Irlande, j’ai mis un mois pour trouver un travail. J’ai eu de la chance, car c’est dans les environs. La conjoncture économique commence lentement à s’améliorer. Mais, il faut qu’il y ait plus d’emplois pour que tous ceux qui sont partis puissent revenir.”

Pour Seamus Coffey, économiste à l’University College de Cork, la situation tend à se stabiliser et se dit raisonnablement optimiste pour l’avenir :

“Le solde migratoire net pour 2015 sera proche de zéro. Le nombre des personnes qui partent sera équivalent à celui de celles qui reviennent. C’est un changement radical comparé à 4 ou 5 ans en arrière. Et cela devrait durer les 2 prochaines années. La tendance pourrait même s’inverser : les personnes qui rentrent pourraient être plus nombreuses que celles qui émigrent.”

Voici Aidan O’Brien, un musicien autodidacte. Aujourd’hui, il joue dans ce pub de Cork. Au cœur de son inspiration : l’Irlande, la crise et la lancinante question de l’exil :

“Bienvenue à tous ! Je suis Aidan et je vais vous chanter quelques-unes de mes chansons ; une en particulier qui s’appelle : ‘Quand reviendras-tu à la maison ?’ Ça parle d’un garçon qui se demande s’il doit ou non émigrer. Au final, il décide de rester en Irlande.
Il y a 4 ou 5 ans, des groupes très importants de personnes quittaient l’Irlande ensemble. À Noël, ils n‘étaient toujours pas rentrés parce qu’ils savaient très bien qu’ici, il n’y avait pas de travail. C’est différent aujourd’hui. J’ai un ami qui est parti en Australie juste avec un groupe d’une dizaine de personnes et tous ont prévu tôt ou tard de rentrer.”

Cathal McInerney, lui, doit son retour dans son village natal de Kinvara à un investisseur américain séduit, entre autres, par la fiscalité locale et le savoir-faire numérique à disposition. Originaire de Miami, ce dernier a choisi ce coin reculé d’Irlande pour y établir la branche Europe et Moyen-Orient de sa société ‘Flagship Management’. La preuve que les affaires reprennent, selon Cathal :

“Je suis parti en Chine en 2011. Mais, mon projet à long terme a toujours été de rentrer ici, chez moi. L‘économie irlandaise est en train de repartir, il y a davantage d’emplois, davantage d’offres. Les entreprises envisagent à nouveau d’embaucher et de faire revenir les gens ici. Donc oui, pour moi, la situation s’est inversée en Irlande : on va dans la bonne direction.”

C’est l’effondrement du marché du bâtiment qui a poussé Cathal à s’expatrier à Shanghai. C’est là qu’il a rencontré Darima, une enseignante née en Sibérie avec qui, il a eu deux enfants :

“Ma famille vit dans cette région depuis 400 ou 500 ans. Le bâtiment dans lequel on travaille aujourd’hui est un ancien magasin de bonbons qui appartenait à la tante de ma grand-mère dans les années 1930-1940.”

Frappées de plein fouet par la crise, plusieurs régions d’Irlande, à commencer par les plus excentrées, ont perdu 10 % de leur population. Pour contrer l’exode rural notamment, le gouvernement a lancé différentes initiatives – dont Connect Ireland – à l’intention de la communauté irlandaise dispersée aux quatre coins de la planète.

Le point avec Cathal McInerney :

“Connect Ireland travaille avec des PME que le programme aimerait relocaliser en Irlande, mais pas seulement dans les grandes villes, dans les zones rurales aussi, afin de lutter contre la désertification des campagnes.”

Après des débuts difficiles loin de sa famille, Darima McInerney a fini par s’habituer à son nouveau cadre de vie :

“C’est très facile aujourd’hui avec Skype et le téléphone de rester en contact avec ses proches. Je parle pratiquement tous les jours avec ma mère, c’est un peu comme si elle habitait ici, elle me donne même des conseils sur la façon d‘élever mes enfants !”

Grâce à internet, Aidan prend aussi régulièrement des nouvelles de son frère parti vivre en Australie il y a plusieurs années.

Comme d’autres expatriés irlandais, Michael O’Brien se pose la question d’un éventuel retour au pays dans les mois à venir. Encore faut-il qu’il trouve un emploi. Il a bon espoir, le secteur des nouvelles technologies est plutôt porteur en Irlande.

Aidan :
“Tu as le mal du pays parfois ?”

Michael :
“Si j’ai le mal du pays ? Oui, vous nous manquez. On ne sait jamais, on pourrait bien rentrer un de ces jours.”

Aidan :
“Ça serait bien ! Donc, tu penses sérieusement à revenir à la maison ?”

Michael :
“On dirait que l‘économie va mieux, le chômage est tombé à 10 %. Donc oui, l’Irlande est en train de se relever. Les gens commencent à quitter l’Australie pour rentrer en Irlande. Deux personnes qu’on connaît sont déjà parties. Tu sais, s’il y a de vraies opportunités en Irlande, il se peut qu’on revienne. Mais on doit prendre la bonne décision pour la famille.”

Si la reprise semble finalement au rendez-vous, elle reste extrêmement fragile. Avec sa musique, Aidan O’Brien s’efforce à sa façon d’insuffler l’espoir et rappelle au passage combien il fait bon vivre en Irlande :

“Cette chanson parle de moi. J’ai songé à quitter l’Irlande. J’ai réfléchi aux raisons de partir ou de rester. Et puis, j’ai réalisé que je ne voulais pas partir et que ce serait bien si tout le monde rentrait au pays.”

Seamus Coffey : ‘‘le solde migratoire pour 2015 sera proche de zéro’‘

Euronews a interview Seamus Coffey, économiste à l’University College de Cork (Irlande) sur les flux migratoires et la situation actuelle de l‘économie irlandaise. Pour visionner l’intégralité de son analyse (en anglais), utilisez ce lien

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