L'immigration, toile de fond des élections en Italie

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Par Euronews
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Reportage dans la région de Trévise où à l'approche des législatives, l'opinion semble partager entre racisme et solidarité envers les migrants.

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Le sujet de l’immigration divise les électeurs en Italie. À l’approche des législatives de ce dimanche 4 mars, nous sommes dans le nord-est du pays, une région riche où les uns tiennent ouvertement des propos racistes tandis que d’autres œuvrent à l’intégration des migrants.

Les questions d’immigration pèseront-elles dans les urnes ce dimanche lors des législatives en Italie ? Pour le savoir, nous nous rendons auprès des électeurs dans la région de la Vénétie. Sur place, d’un côté, les discours racistes se font de plus en plus entendre, de l’autre, on expérimente des programmes d’intégration. Les étrangers représentent près de 10% de la population régionale. On ne peut donc pas parler d’invasion, mais à Trévise, la perception est différente.

“Il y a tellement d‘étrangers, nous dit une passante. Mais on doit les aider, on ne peut pas les laisser dans de telles conditions,” reconnaît-elle. Un homme nous lance : “Ils sont totalement abandonnés, il n’y a pas de règles, pas de contrôles… Tout ça, ça fait peur.”

Trévise a fait parler d’elle dans le passé pour la décision de son maire d’alors, Giancarlo Gentilini, de retirer les bancs des rues de la ville pour éviter qu’ils ne soient occupés par les migrants.

Aujourd’hui, l’homme répond toujours présent pour faire entendre ses idées. “Ordre, discipline, respect de la loi… Nous, d’abord ; les autres, après !” crie-t-il au micro d’une journaliste locale. À notre micro, il renchérit : “Nos rues, nos maisons sont pleines de migrants. Vous le voyez bien : la criminalité est partout, les viols, les agressions sexuelles !”

"Pas de hausse de la criminalité dans les statistiques"

Les affirmations de l’ancien maire font encore mouche auprès de nombreux habitants. Or comme souvent avec les clichés, elles ne correspondent pas à la réalité. C’est ce que nous avons pu vérifier auprès d’un sociologue de l’université de Bologne, Marzio Barbagli. “Non, il n’y a pas de hausse de la criminalité dans les statistiques. Ce qui me frappe, c’est que le sujet de l’immigration occupe le devant de la scène de manière intermittente. Pendant plusieurs mois, personne n’en parle. Sous le gouvernement Renzi, pendant trois ans, personne ne s’en préoccupait jusqu‘à l’arrivée du ministre de l’Intérieur Marco Minniti.”

Ces questions sont parfois évoquées de manière alarmiste dans les médias. Vont-elles influencer le vote ? Voici ce que répond Marzio Barbagli : “Je dirais qu’elles l’influenceront moins que ce à quoi s’attendent les partis politiques. Les rares personnes qui ont déjà décidé qu’elles iraient voter ont déjà choisi qui elles soutiendront, assure-t-il avant d’ajouter : On a besoin de cette dramatisation pour créer une sorte d’exaltation au sein des partisans : un enthousiasme pour la politique qui en dehors de cela, n’existe pas en ce moment en Italie.”

Besoin de main-d'œuvre

Nous retournons à Trévise où malgré l’hostilité qui s’exprime à l‘égard des étrangers, de nombreux secteurs économiques ont bien besoin d’eux. D’après les données de l’association des artisans CGIA de la ville de Mestre, par exemple, les travailleurs immigrés sont indispensables dans la construction ou encore les services.

“L‘économie souffrirait sans eux, assure Nicola Filippini, restaurateur, non seulement parce que certains emplois ne sont de toutes façons plus assurés par des Italiens, mais aussi parce que le pays ne pourrait plus profiter des compétences qu’ils peuvent apporter. Ici, notre chef est originaire du Togo : elle contribue avec ce qu’elle sait à améliorer notre menu et notre concept de cuisine,” fait-il remarquer.

Trévise comme d’autres villes accueille de plus de plus de demandeurs d’asile et de nouvelles structures associatives ont vu le jour pour leur offrir une perspective d’intégration.

Souvent, ce n’est que par leur intermédiaire que ces milliers de personnes, pour la plupart d’origine africaine, amenées ici depuis l‘île de Lampedusa, entrent en contact avec la population locale. Au programme : formations, cours d’italien et ateliers d’art et de musique.

"Je rêve d'une Italie où mes enfants ne se sentiront pas différents"

“Pour permettre l’intégration, il faut que les gens modifient en quelque sorte, leur centre de gravité, acceptent d‘évoluer et c’est cela qui fait peur, estime Yannick Noah Cimbalanga, animateur. Quand j‘étais adolescent, l’Italie était différente ; aujourd’hui, maintenant que je suis adulte, je trouve qu’elle a beaucoup changé, regrette-t-il. Actuellement comme les gens pauvres ont beaucoup de mal à s’en sortir vu la situation économique du pays, les immigrés sont devenus un problème," constate-t-il.

Ce jeune diplômé d’origine congolaise, aujourd’hui naturalisé italien, travaille auprès des migrants. Mais il ne se sent pas encore pleinement intégré : “Pour mes enfants, je rêve d’une Italie où ils ne se sentiront pas différents,” dit-il.

Élections en Italie : la crise des migrants domine la campagne https://t.co/3t0XgrXn4rpic.twitter.com/hBJOE1yaAv

— euronews en français (@euronewsfr) 27 février 2018

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