Berlin a déjà distribué 1,7 milliard d'euros en soutien aux free-lances et PME

Berlin a déjà distribué 1,7 milliard d'euros en soutien aux free-lances et PME
Tous droits réservés Markus Schreiber/AP
Tous droits réservés Markus Schreiber/AP
Par Thomas Seymat avec AP, AFP
Partager cet articleDiscussion
Partager cet articleClose Button

Face au coronavirus, la capitale allemande n'a pas perdu son temps pour soutenir les travailleurs indépendants et PME qui y habitent.

PUBLICITÉ

En un mois, la ville-Etat de Berlin a distribué près de 1,7 milliard d'euros aux travailleurs indépendants et aux petites entreprises de la ville pour les aider à faire face à la crise économique causée par la pandémie de nouveau coronavirus. Plus de deux cent mille d'entre eux ont en effet pu bénéficier de versements via un programme d'aide lancé fin mars et disponible après une simple inscription en ligne.

"Dans l'ensemble, Berlin a très vite aidé les indépendants et les petites entreprises. Une approche non bureaucratique était essentielle," explique à Euronews Claudia Davies, porte-parole de Investitionsbank Berlin (IBB), la banque choisie par la ville comme partenaire par le gouvernement local de Berlin pour la mise en place du programme.

Dans le détail, depuis le lancement du programme et selon la porte-parole, les free-lances représentent environ 47 000 demandes, pour un montant total d'environ 340 millions d'euros, les petites entreprises comptant jusqu'à 5 employés environ 147 000 demandes, pour un montant d'environ 1,2 milliard d'euros, et celles comptant 6 à 10 employés, environ 12 000 demandes, pour un montant d'environ 181 millions d'euros.

Au total, "nous avons accordé des financements pour un montant d'environ 1,7 milliard d'euros" précise Mme Davies.

Ces chiffres témoignent de l'incertitude économique dans laquelle la capitale allemande et ses 3,8 millions d'habitants ont été plongés à cause de la pandémie de Covid-19. "Tout fonctionne bien maintenant. Nous avons eu quelques soucis techniques au début, car le programme était censé démarrer le plus rapidement possible et nous avions une énorme charge de serveur à gérer" détaille la porte-parole. Leur site avait été pris d'assaut les premiers jours par une horde d'indépendants et d'entrepreneurs : "lorsque nous avons lancé la procédure de candidature, nous avions environ 1 000 visites par seconde sur notre site web, contre 1 000 visites par jour d'habitude".

Si IBB ne souhaite pas rentrer dans le détail technique de comment la banque a pu traiter des dizaines de milliers de candidatures - 50 000 lors des 4 premiers jours - et faire autant de virements si rapidement, ils confirment avoir utilisé leur "infrastructure existante pour mettre en œuvre le processus de candidature" et "cinq programmeurs et sept autres employés" pour mettre en place le système.

Pour les indépendants, une respiration bienvenue

Une grande partie de ces aides a servi à soutenir les secteurs touristique, artistique et culturel de la ville, durement touchés notamment par la chute du tourisme. Katharina est une réalisatrice de publicité et de films commerciaux originaire de Berlin. Elle a postulé pour obtenir le versement réservé aux travailleurs indépendants, non sans difficulté au départ. "Le temps que je parvienne à atteindre le serveur, qui tombait sans cesse en panne à cause de la forte demande, j'étais en ligne avec environ 17 000 personnes avant moi, ce qui était comme des sièges au premier rang à la semaine de la mode".

"En tout, il m'a fallu trois jours pour postuler, ce qui a été très rapide et j'ai été très impressionné lorsque l'argent est arrivé sur mon compte bancaire littéralement après le week-end" raconte la réalisatrice. Dans ses cercles d'amis et professionnels, "tout le monde a postulé" [à ce programme d'aides]. "Nous sommes des Berlinois, nous n'économisons pas" ajoute-t-elle sur le ton de la blague. Plus sérieuse, elle explique que "même ceux que je connais qui ont des économies ont aussi fait une demande".

Ville multiculturelle et internationale, Berlin n'a pas limité ces aides aux seuls Allemands. Pour Jean-Baptiste, free-lance français installé à Berlin contacté par Euronews, le processus pour obtenir les 5 000 euros a été "sans friction". "Postuler n'a été qu'une question de remplir un formulaire d'une page, avec des éléments très basiques, nom, adresse, numéro fiscal, etc. J'ai fait la demande un vendredi et j'ai reçu l'argent le mardi." Et le tout sans avoir à présenter de justificatifs, contrairement aux petites entreprises. "Les 5 000 euros sont fournis à tous ceux dont le travail free-lance est affecté par l'épidémie, sans besoin de justification."

Interrogé par Euronews sur les possibilité de fraude de ce système, le gouvernement de Berlin ne se voile pas la face. "La fraude est ou sera probablement un problème. Son ampleur est difficile à appréhender à ce stade" admet Eva Henkel, porte-parole et chef du service de presse et de relations publiques du département des finances du Sénat de Berlin. "Mais heureusement, l'honnêteté est également un enjeu. Un nombre impressionnant de postulants ont rendu leur aide financière à IBB après avoir réalisé qu'ils n'avaient pas le droit de la recevoir".

Pour les free-lances affectés, ce versement unique de 5 000 euros offre une respiration bienvenue pour ces mois d'activité réduite. "Personnellement avec 5 000 euros, je tiens 4 mois vu le coût de la vie et le fait qu'il y a pas vraiment d'occasion de dépenser" explique Jean-Baptiste. Katharina, elle, pourra tenir "trois mois. Ou trois mois et demi, je suppose, parce que je dépense moins que d'habitude. J'en suis au deuxième mois maintenant, donc ce n'est pas génial, mais je suis reconnaissant d'avoir obtenu quelque chose, sinon ce serait bien pire".

Une économie d'aplomb à l'horizon 2022 ?

"Dans l'ensemble, nous sommes assez satisfaits du taux de participation à la procédure de candidature, compte tenu de la brièveté des délais et de l'urgence" affirme la porte-parole d'IBB. L'infrastructure économique de Berlin la rend en effet particulièrement sensible à la crise sanitaire et à la baisse du tourisme. "L'hôtellerie et la restauration ainsi que le secteur des arts et des spectacles représentent une part supérieure à la moyenne dans l'économie de Berlin, avec respectivement 2,5 % et 6,2 % contre 1,6 % et 3,8 % en Allemagne. C'est pourquoi cette crise est particulièrement difficile pour l'économie berlinoise et il était si important d'agir rapidement."

Au niveau fédéral, pour atténuer le choc du confinement forcé, le gouvernement allemand a décidé d'un plan géant de soutien économique de 1 100 milliards d'euros essentiellement pour protéger les grandes entreprises. Il a aussi réservé une enveloppe de 50 milliards d'euros d'aide immédiate pour les PME et travailleurs indépendants, dont les artistes.

Un plan nécessaire étant donné les perspectives économiques en Allemagne. Peter Altmaier, le ministre allemand de l'Economie a déclaré ce mercredi que le gouvernement prévoyait une baisse de 6,3 % de son PIB en 2020 en raison de la pandémie de nouveau coronavirus, mais qu'il prévoyait une forte reprise en 2021. "Nous supposons que l'économie de la République fédérale d'Allemagne se contractera de 6,3 % cette année, soit d'environ 6 %, et qu'elle se redressera l'année prochaine d'environ 5,2 %, soit d'environ 5 %. Cela signifie que nous reviendrons selon toute probabilité au début de l'année 2022 au niveau de performance économique d'avant la crise".

Partager cet articleDiscussion

À découvrir également

Des milliers de manifestants à Berlin venus manifester leur soutien à l'Ukraine

Allemagne : la pauvreté en hausse

Bruxelles, Berlin... Les marches contre l'antisémitisme se multiplient en Europe