Au Kosovo, les tensions entre Serbes et Albanais ravivent d'anciennes plaies

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Par Monica Pinna
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Au Kosovo, les divisions entre Serbes et Albanais refont surface et donnent lieu à de violents affrontements avec les forces de l'OTAN. Un nouveau conflit est-il à craindre ? Notre reporter Monica Pinna s'est rendue sur place.

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Depuis des décennies, dans la ville de Mitrovica, le pont qui enjambe l'Ibar est le symbole le plus frappant des divisions entre les groupes ethniques serbe et albanais au Kosovo. Au nord du pont, on parle serbe et la monnaie est le dinar serbe. Au sud, on parle albanais et on paie en euros.

Les divisions entre les deux communautés se sont aggravées après les élections municipales d'avril dernier. Quatre maires d'ethnie albanaise ont été nommés dans les régions du nord à majorité serbe, après le boycott des urnes par les Serbes.

Des élections municipales contestées

Les tensions s'intensifiaient depuis un certain temps, mais elles ont connu un pic en mai quand le gouvernement central du Kosovo a décidé d'installer les maires élus par la force. Dans la ville de Zvecan, des manifestants serbes ont tenté d'empêcher les fonctionnaires d'entrer dans les bâtiments municipaux et se sont heurtés aux troupes de maintien de la paix de la KFOR dirigées par l'OTAN. 40 soldats et plus de 50 manifestants serbes ont été blessés.

Cet épisode a fait craindre un nouveau conflit au Kosovo, dans le sillage de la guerre d'indépendance à laquelle l'intervention de l'OTAN a mis fin en 1999. Le Kosovo, province autonome de la Serbie dans l'ex-Yougoslavie, a déclaré son indépendance en 2008. Le nouvel État est reconnu par une centaine de pays, mais pas par Belgrade. La Serbie a clairement fait savoir qu'elle ne renoncerait jamais au Kosovo.

Monica Pinna
L'accès à la mairie de Zvecan bloqué, plusieurs semaines après les heurts entre manifestants serbes et forces de la KFORMonica Pinna

Des engagements non tenus

Militante serbe, Milica Andric Rakic étudie les effets des politiques du Kosovo sur la vie de la minorité serbe. Elle estime que les relations entre les deux communautés sont au plus mal depuis dix ans. Je lui ai demandé comment nous en sommes arrivés là. 

"C'est en partie lié au refus du Kosovo et de la Serbie de s'engager dans un dialogue constructif et de mettre en œuvre les accords envisagés pour la communauté serbe," me répond-elle. "L'un des aspects les plus importants," précise-t-elle, "c'est l'Association - ou la Communauté - des municipalités serbes : il s'agit d'un accord conclu il y a dix ans qui n'a jamais été mis en œuvre," fait-elle remarquer.

L'Association des municipalités serbes garantirait un certain niveau d'autogestion aux Serbes du Kosovo. Résultat de l'accord conclu à Bruxelles de 2013. Mais la Serbie et le Kosovo ne se sont pas encore mis d'accord sur la manière de la mettre en œuvre. C'est l'un des points de friction majeurs qui bloquent le processus de normalisation des relations entre les deux pays.

Des enjeux géopolitiques

Les experts s'accordent à dire que pour l'instant, il n'y a pas d'éléments qui puissent mener à un conflit réel au Kosovo. Cependant, la situation reste très instable et peut avoir des répercussions au-delà de la région.

L'Union européenne presse le Kosovo et la Serbie de trouver une solution. Bruxelles, mais aussi les États-Unis ont également exhorté le gouvernement central kosovar de mettre fin aux provocations et l'ont menacé de sanctions.

Avec la guerre en Ukraine, les Balkans occidentaux sont considérés comme la nouvelle ligne de confrontation entre Moscou et Bruxelles, comme me le confirme Lulzim Peci, chercheur et ancien diplomate kosovar.

"Les parties doivent retourner à la table des négociations, mais les Occidentaux devraient aussi adopter une attitude équilibrée en matière de sanctions à l'égard du Kosovo et de la Serbie," estime-t-il. "Je peux comprendre que les Occidentaux veuillent en quelque sorte rapprocher la Serbie de l'Occident et la détacher de la Russie, mais cela ne peut faire au détriment de la stabilité de la région," affirme-t-il.

Pour la Serbie et le Kosovo, l'impasse actuelle freine, en tout cas, non seulement le processus de normalisation de leurs relations, mais aussi la perspective d'une adhésion à l'UE, à laquelle ils aspirent tous deux.

Journaliste • Monica Pinna

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