Dans une forêt classée au patrimoine de l'Unesco, des centaines de migrants survivent en espérant franchir les portes de l'Europe. 48 corps y ont été retrouvés depuis le début de la crise migratoire il y a deux ans.
Dans la plus ancienne et la plus dense forêt naturelle d'Europe, à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie, 48 corps ont été retrouvés depuis deux ans. Ce sont les chiffres de l'ONG polonaise Grupa Granica.
"On ne peut pas être vraiment préparé à survivre ici", déplore Anna Alboth, cette militante de l'ONG qui vient en aide aux réfugiés dans la forêt de Bialowieza, classée au patrimoine mondial de l'Unesco.
Les migrants tentent de survivre face aux multiples dangers présents dans cette "zone rouge". Et à chaque saison, ses difficultés. "L'est de la Pologne est très rude. Il y a des marécages, d'immenses forêts. En été, il fait très chaud et il n'y a rien à boire. En hiver, il peut faire jusqu'à moins 20 degrés", décrit la militante Anna Alboth.
. Autre danger, selon cette ONG, la présence des gardes-frontières polonais.
"Ils sont battus par les gardes-frontières polonais, mordus par des chiens, on leur prend leur argent, leur téléphone est détruit pour qu'ils ne puissent plus communiquer. Tout ça, dans le but de les décourager de venir", décrit-elle.
Si en Pologne, les refoulements de migrants sont légaux depuis 2021, les violences sont démentis par les gardes-frontières polonais. "Il n'y a aucune plainte contre les officiers polonais. Je ne comprends pas d'où viennent ces allégations. Si quelqu'un pense qu'un garde-frontière polonais a fait usage de violence, il devrait porter plainte devant les tribunaux", explique leur porte-parole, Anna Michalska.
Demandes d'asile refusées
L'ONG polonaise Grupa Granica accuse en outre les gardes-frontières polonais de ne pas accepter les demandes d'asile des migrants. "Ils ne les laissent pas candidater, même s'ils parlent anglais et montrent leurs papiers", dénonce la militante Anna Alboth.
La porte-parole des gardes-frontières polonais dément également ces accusations. Selon elle, les migrants n'ont pas pour projet de rester en Pologne, et souhaitent demander l'asile en Allemagne, en France ou au Royaume-Uni. "C'est pour ça qu'ils se cachent de nous", affirme celle qui a pour mission de protéger les frontières polonaises.
Pour empêcher les migrants de franchir la frontière longue de 416 km, la Pologne a construit un mur d'acier de 186 km en 2022. Mais son efficacité est mise en doute. "En deux ans, rien n'a changé, des personnes continuent d'essayer de franchir la frontière. La semaine dernière, nous avons aidé 250 personnes : des enfants, des femmes enceintes...", raconte Anna Alboth.
"_On rencontre beaucoup plus de blessés qui ont tenté de l'escalader._Avec une jambe ou un bras cassé,la traversée de la forêt est plus compliquée", poursuit-elle.
En Pologne, la question migratoire cristallise le débat politique en pleine campagne électorale. Varsovie s'est opposée à une réforme de la politique migratoire européenne lors du dernier sommet européen. Le gouvernement polonais souhaite organiser un référendum sur la question d'accueil des réfugiés en même temps que les élections législatives cet automne.