Retentissante victoire de Javier Milei, le prochain président de l'Argentine

Le candidat à la présidence de la coalition Liberty Advances, Javier Milei, lors de son discours de victoire au second tour de la présidentielle à Buenos Aires, en Argentine.
Le candidat à la présidence de la coalition Liberty Advances, Javier Milei, lors de son discours de victoire au second tour de la présidentielle à Buenos Aires, en Argentine. Tous droits réservés 19/11/2023 / Natacha Pisarenko/Copyright 2023 The AP. All rights reserved
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Par Euronews
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Après sa victoire dimanche à la présidentielle, Javier Milei a de nombreux défis à relever. C'est une période d'incertitude qui s'ouvre pour la troisième économie d'Amérique latine, à laquelle il a promis une thérapie de choc.

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L’Argentine a choisi dimanche de changer radicalement de direction. L’économiste ultralibéral Javier Milei sera le prochain président du pays, après avoir largement remporté le second tour de la présidentielle, avec 55,95 % des voix contre 44,04 % à son rival, le ministre de l’Economie Sergio Massa.

Le président-élu de 53 ans, qui prendra ses fonctions le 10 décembre, a promis dans son discours de victoire "la fin de la décadence" et la "reconstruction de l'Argentine".__"C'est une nuit historique pour l'Argentine", a-t-il lancé à plusieurs milliers de partisans en liesse, à l'extérieur du QG de campagne à Buenos Aires.

"Nous sommes confrontés à des problèmes monumentaux : l'inflation (143% sur un an NDLR), la stagnation, l'absence de véritables emplois, l'insécurité, la pauvreté et la misère", a énuméré le président-élu."Il n'y a pas de place pour la tiédeur ou les demi-mesures", a prévenu celui qui depuis deux ans prône, notamment, des coupes "à la tronçonneuse" dans la dépense publique, pour une économie pathologiquement surendettée, avec 40% de la population sous le seuil de pauvreté.

Il a redit sa détermination "à remettre en ordre les comptes budgétaires, et régler les problèmes de la Banque centrale", une institution qu'il avait dit vouloir "dynamiter".

L'ampleur de la victoire a surpris. Des sondeurs avaient donné un léger avantage à Milei, mais nombre d'analystes prédisaient un résultat "au vote près", dans une élection crispée et indécise comme rarement en 40 ans depuis le retour de la démocratie, avec deux projets hautement antagoniques.

D'un côté, Massa, ministre de l'Economie depuis 16 mois, qui promettait un "gouvernement d'unité nationale", et un redressement économique graduel, préservant l'Etat-providence, crucial dans la culture argentine. Face à lui, l'outsider Milei, "anarcho-capitaliste" comme il se décrit, polémiste de plateaux TV surgi en politique il y a deux ans, résolu à "tronçonner" l'Etat-ennemi" et à dollariser l'économie.

S'il a tendu la main à "tous les Argentins et dirigeants politiques" voulant se joindre à lui, le président élu a aussi mis en garde contre d'éventuelles résistances sociales à ses réformes.

Des résultats rapides ?

"Milei a fait campagne en promettant des résultats rapides. On voit tous que ce n'est pas possible, mais c'est l'idée qui a pénétré son électorat: le changement rapide, la tronçonneuse. Aussi je crois qu'il n'y aura guère de temps pour une lune de miel", a prédit Lara Goyburu, politologue de l'Université de Buenos Aires.

Pour le politologue Gabriel Vommaro, de l'Université de San Martin, Javier Milei, par son discours belliqueux, notamment envers des secteurs mobilisés, comme la fonction publique apporte un risque "de confrontation politico-sociale".

A l'étranger, des dirigeants pour lesquels Milei avait exprimé une affinité l'ont chaleureusement félicité : l'ex-président américain Donald Trump a dit sa conviction qu'il va "faire à nouveau de l'Argentine un grand pays". Et l'ex-président brésilien Jair Bolsonaro a déclaré que "l'espoir brille à nouveau" dans la région.

Washington a "félicité" Javier Milei pour sa victoire, le secrétaire d'Etat Antony Blinken saluant "la forte participation et le déroulement pacifique du scrutin".

Quant au président brésilien Lula, que Milei avait qualifié de "communiste corrompu", il a souhaité "bonne chance et succès" au nouveau gouvernement argentin, dans un message sur le réseau social X dans lequel il n'a pas mentionné Javier Milei.

Les réactions de la rue

"Liberté ! Liberté !" ont exulté plusieurs milliers de sympathisants, dont de nombreux jeunes, devant le QG de campagne de Javier Milei, dans le centre de Buenos Aires, en voyant apparaître sur un écran géant le président argentin nouvellement élu.

"Je suis tellement excitée que je n'arrive pas à y croire. Je ressens tellement de joie. C'est incroyable ce qui se passe ici !" s'exalte Julia Gauto, 51 ans, au bras de son mari.

Un drapeau argentin dans une main, un foulard jaune à l'effigie de l'économiste ultralibéral autour du cou, elle s'époumone : "la caste a peur", reprenant un des slogans phare de la campagne de Milei contre les gouvernements péronistes ou libéraux depuis 20 ans ans au pouvoir.

"Je suis heureux, j'ai de l'espoir. Un changement était nécessaire", lance Nicolas Paez, un architecte de 34 ans, venu de La Matanza, une des municipalités de la grande banlieue de la capitale.

"Je ne pensais vraiment pas qu'il allait gagner, mais la jeunesse a fait la différence", ajoute-t-il. Sur ses épaules un drapeau argentin, comme beaucoup dans la foule massée devant l'hôtel, avenue Cordoba, où Milei a installé son QG de campagne.

Parmi les sympathisants, des militants font des selfies avec un homme portant un masque représentant Milei, costume noir et cravate imprimée de dollars. D'autres, lancent en l'air des bulletins déchirés du candidat vaincu, le ministre centriste de l'Economie Sergio Massa.

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Un homme fend lui la foule portant à bout de bras un cercueil en carton symbolisant la mort du péronisme, tandis qu'un autre déguisé en lion, évoquant le président élu à la dense chevelure, chauffe la foule monté sur le toit d'une voiture.

A ses côtés, un autre agite des lames de tronçonneuse en carton, évoquant les coupes dans les dépenses publiques promises par le président élu, arrivé en politique il y a tout juste deux ans.

"C'est le changement que nous voulions, nous les jeunes dans ce pays que nous aimons tant", lance Juan Ignacio Gomez, un lycéen de 17 ans venu seul fêter la victoire.

"Pas peur de Milei"

"Je n'ai pas peur de Milei, ce dont j'ai peur c'est que mon père ne puisse pas payer son loyer. Je crois fermement à la dollarisation de l'économie. Le peso argentin ne vaut plus rien", assène-t-il a propos de la volonté du nouveau président élu de remplacer la monnaie nationale par le billet vert.

"Le péronisme dans ce pays est un cancer. Nous en avons assez. Il est synonyme de pauvreté. Avec le péronisme, on vous coupe la jambe et on vous offre une béquille en cadeau", assène Nacho Larrañaga, un écrivain de 50 ans, avant de reprendre en choeur "Liberté ! Liberté".__"Milei est un inconnu, mais mieux vaut un fou qu'un voleur", ajoute-t-il tout sourire.

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Au même moment, dans le quartier Chacarita, devant le QG de campagne de Sergio Massa, les visages sont défaits. La rancœur cède cependant rapidement la place à des promesses de résistance.

"La haine a gagné. (Milei) ne va pas gouverner longtemps (...) les gens vont se rendre compte... Je lui donne six mois", pleure Gabriela Bermudez, 30 ans.

"L'Argentine est comme ça : au moment où on s'y attend le moins, elle se jette dans les bras d'un tyran. Et après elle pleure", abonde Diego Avellaneda, un métallurgiste de 55 ans.

"Choc, trop de douleur. Mais nous devons nous redresser et résister à l'assaut. Milei nous trouvera dans les rues pour défendre tous les droits qu'il cherchera à piétiner. La moitié de l'Argentine ne le soutient pas", dit Miguel Catalina, un enseignant de 42 ans.

Sources additionnelles • AFP

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