Comment la stratégie de dissuasion de l'Otan a-t-elle évolué ?

Un soldat de l'Otan en Roumanie (Février 2022)
Un soldat de l'Otan en Roumanie (Février 2022) Tous droits réservés Andreea Alexandru/Copyright 2022 The AP. All rights reserved.
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Par Euronews avec AFP
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Aux unités militaires limitées servant de "fil déclencheur" ont succédé des bataillons renforcés et des armes lourdes déployés sur le flanc Est de l'Europe. Face à l'invasion russe en Ukraine, l'Alliance atlantique a ainsi clairement choisi de bomber le torse.

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La stratégie de dissuasion de l'Otan a considérablement évolué. Aux unités militaires limitées déployées jadis, servant de "fil déclencheur", ont succédé des bataillons renforcés et des armes lourdes sur des territoires exposés aux risques extérieurs. Face à l'invasion russe en Ukraine et aux menaces pour la sécurité en Europe, l'Alliance atlantique a ainsi clairement choisi de bomber le torse.

La stratégie "du fil déclencheur"

Durant la Guerre froide et lors des décennies qui suivent, l'Alliance atlantique marque sa présence en déployant des forces armées limitées dans des zones de tensions géopolitiques.

Ces unités militaires, plutôt que de représenter une "menace offensive", compte tenu de leur taille, ont surtout pour but de dissuader tout potentiel agresseur. Autrement dit, l'Alliance avertit qu'elle répondra collectivement si l'un de ses soldats est attaqué sur le territoire de l'Otan. C'est la stratégie du "fil déclencheur" (ou tripwire).

Quelques exemples historiques : pendant la Guerre froide, l'armée américaine disposait d'une brigade à Berlin-ouest pour dissuader les troupes soviétiques de pénétrer sur ce territoire, même si les effectifs présents n'auraient pas été en mesure de défendre le territoire en cas d'offensive du Pacte de Varsovie. Dans les années 1980, dans les Malouines, l'armée britannique s'appuyait sur une force de défense restreinte qui n'empêcha toutefois pas le débarquement sur l'île de l'armée argentine et le déclenchement de la guerre. De même que les États-Unis ont déployé des militaires en Corée du Sud pour envoyer un message au régime de Pyongygang.

2014 : l'annexion russe de la Crimée provoque un sursaut de l'Otan

Après l'annexion russe de la Crimée en 2014, l'Otan mise sur cette stratégie de dissuasion lors du sommet de New Port en déployant sur son flanc Est, notamment dans les pays baltes, des bases logistiques avancées munies d'équipements et de munitions, capables d'accueillir des troupes en cas de besoin.

En parallèle, l'Alliance met en place un "fer de lance", une force de réaction "très rapide" pouvant mobiliser 800 hommes en deux jours et jusqu'à 7 000 hommes en une semaine. Moscou est averti. 

2016 : à Varsovie, l'Alliance franchit un pas supplémentaire

Dans la foulée du sommet de l'Otan de Varsovie en 2016, l'Alliance atlantique accélère le pas en établissant des "groupements tactiques multinationaux" dans plusieurs pays : Estonie, Lettonie, Lituanie, mais aussi Pologne, Roumanie, Slovaquie, Hongrie, Bulgarie.

Outre le déploiement d'hommes supplémentaires (4 000 soldats), ce renforcement militaire se traduit également par un plus grand nombre de navires et d’avions dans des zones vulnérables. "C'est le résultat direct du comportement agressif récurrent de la Russie envers ses voisins et envers la communauté transatlantique au sens large", se justifie l'Alliance. Moscou est furieux.

Le "fil déclencheur", une stratégie obsolète?

En 2022, la présence avancée des forces de l'Otan sur le flanc Est de l'Europe ne dissuade pas Vladimir Poutine d'envoyer ses troupes en Ukraine.

"La stratégie du fil-déclencheur n'est plus adaptée après ce que la Russie a fait en Ukraine. Cela signifie que le premier combat doit être le plus important", reconnaît alors un haut responsable de l'Alliance.

La cheffe de la diplomatie allemande Annalena Baerbock abonde : "L'ancienne logique du fil déclencheur, qui signale par des présences minimales dans les États baltes et en Pologne qu'une attaque contre un pays de l’Otan est une attaque contre nous tous, ne suffit plus dans sa forme actuelle."

En juillet 2022, le sommet de l'Otan à Madrid adopte un nouveau modèle qui élargit l’éventail des forces à "haut niveau de préparation" : davantage d'’équipements et de stocks d’armes prépositionnés, davantage de systèmes de défense aérienne et antimissile intégrée et davantage d'hommes. Les effectifs sont portés à 300 000 militaires.

Les effectifs de l'Otan sur le flanc Est de l'Europe en juin 2022 :

(Source : Otan)
Effectifs de l'Otan en Juin 2022(Source : Otan)

La nouvelle doctrine transatlantique qualifie la Russie "de menace la plus significative et directe pour la sécurité des alliés (...) "Nous ne pouvons pas écarter la possibilité d'une attaque contre la souveraineté ou l'intégrité territoriale des alliés."

Cette nouvelle feuille de route cible aussi pour la première fois la Chine qui représente, selon l'OTAN, un "défi" pour sa "sécurité".

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