Cinq collaborateurs du quotidien Cumhuriyet maintenus en détention

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Par Euronews
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Un tribunal turc a prononcé tard lundi le maintien en détention de cinq collaborateurs du quotidien d'opposition Cumhuriyet jugés pour "activités terroristes" lors d'un procès emblématique de l'érosion de la liberté de la presse en Turquie.

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Un tribunal turc a prononcé tard lundi le maintien en détention de cinq collaborateurs du quotidien d’opposition Cumhuriyet jugés pour “activités terroristes” lors d’un procès emblématique de l‘érosion de la liberté de la presse en Turquie.

Cette décision est provisoire, dans l’attente d’une prochaine audience le 25 septembre au cours de laquelle une “décision plus ferme” sur le sujet sera prise, a indiqué le président du tribunal.

Il a motivé sa décision par le fait qu’il n’avait pas pu interroger trois témoins appelés à la barre lundi à Silivri, dans un tribunal adjacent à la prison de haute sécurité où sont écroués les journalistes, près d’Istanbul.

Parmi les cinq personnes maintenues en détention figurent le patron du journal Akin Atalay, son rédacteur en chef Murat Sabuncu et le chroniqueur Kadri Gürsel détenus depuis fin octobre, mais aussi le journaliste d’enquête Ahmet Sik arrêté fin décembre. Yusuf Emre Iper, un comptable du quotidien écroué en avril, reste lui aussi en prison.

Lors de l’ouverture du procès fin juillet, un tribunal d’Istanbul avait décidé de remettre en liberté provisoire sept collaborateurs de Cumhuriyet arrêtés en octobre, dont le caricaturiste Musa Kart, mais exclu les cinq autres de cette mesure.

Le traitement infligé à Kadri Gürsel, privé de sa liberté depuis 316 jours, est de la torture“, a dénoncé l’un de ses avocats. “Dans ce procès, plus on creuse le dossier, plus de l’injustice en jaillit“, a déclaré pour sa part le patron du journal. “Ce procès est une photographie de la situation politique, sociale et judiciaire dans laquelle se trouve le pays“. “Nous ne courberons jamais l‘échine face aux pressions“, a ajouté M. Atalay sur un ton de défi.

Comme lors de son audience en juillet, Ahmet Sik a dressé un réquisitoire contre le parquet, qu’il a accusé de “récolter ses éléments d’accusation dans la presse proche du pouvoir“.

Au total, 17 dirigeants, journalistes et autres employés actuels ou passés de Cumhuriyet, risquent jusqu‘à 43 ans de prison. Ils sont accusés d’avoir aidé trois “organisations terroristes armées“ : les séparatistes kurdes du PKK, un groupuscule d’extrême gauche appelé DHKP-C et le mouvement accusé d’avoir fomenté le coup d’Etat manqué du 15 juillet 2016.

Pour les défenseurs des droits de l’Homme, cette affaire traduit le déclin des libertés en Turquie depuis le putsch manqué, suivi de purges massives qui ont frappé les milieux critiques : élus prokurdes, médias et ONG.

Je suis jugé pour mes activités de journaliste, et la seule chose que je demande aujourd’hui, c’est un procès équitable“, a déclaré au juge M. Gürsel. “J’ai la conscience tranquille. Et s’il reste ne serait-ce qu’un tout petit peu de justice dans cette période où la justice est foulée aux pieds, je sais que je serai acquitté“.

Il a de nouveau catégoriquement rejeté les accusations de liens avec la mouvance du prédicateur exilé aux Etats-Unis Fethullah Gülen, désigné par Ankara comme le cerveau de la tentative de putsch. Ces accusations reposent sur la réception d’appels et de SMS de présumés gulénistes, laissés sans réponse.

Après l‘énoncé de la décision du tribunal, les cinq accusés sont repartis de la salle d’audience vêtus de chemises blanches identiques, encadrés de gendarmes.

Quelques dizaines de personnes se sont ensuite rassemblées devant le tribunal, criant “Nous n’abandonnerons pas“, “Vive Cumhuriyet, vive la liberté“.

Fondé en 1924, Cumhuriyet (“République”), l’un des doyens de la presse turque et auteur de plusieurs scoops qui ont irrité le président Erdogan, dénonce un procès visant à le réduire au silence.

Ils sont jugés simplement parce qu’ils incarnent le journalisme digne de ce nom en Turquie et qu’ils ne diffusent pas la propagande du régime d’Erdogan“, a affirmé à l’entrée du tribunal Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF).

Parmi les accusés figure aussi Can Dündar, ex-rédacteur en chef de Cumhuriyet qui s‘était attiré les foudres de M. Erdogan après avoir publié en 2015 un article affirmant qu’Ankara livrait des armes à des islamistes en Syrie. Exilé en Allemagne, il est jugé par contumace.

Selon le site P24, spécialisé dans la liberté de la presse, quelque 170 journalistes sont détenus en Turquie. Celle-ci occupe la 155e place sur 180 au classement 2017 de la liberté de la presse établi par RSF.

Avec agence (AFP)

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