Pacte vert européen : des objectifs climatiques et économiques réalistes ?

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Par Efi KoutsokostaGuillaume Desjardins
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Dans son Pacte vert, la Commission européenne ambitionne de transformer l'économie pour mieux lutter contre le changement climatique. Sur quoi repose sa stratégie ? Et comment le Portugal sort-il déjà son épingle du jeu dans les énergies renouvelables ?

Le plan est présenté comme la plus vaste révision de la politique à l'échelle de l'Union européenne depuis sa fondation : il s'agit du "green deal" ou Pacte vert. Il prévoit que quasiment tous les grands aspects de l'économie du continent soient réévalués à la lumière de l'urgence climatique et environnementale et que par exemple, à partir de 2021, au moins 40% du budget de la Politique agricole commune soient dédiés à la lutte contre le changement climatique.

Le Pacte vert liste les objectifs suivants à atteindre d'ici 2030 : une réduction de 40% minimum des émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990, une part d'au moins 32% d'énergies renouvelables dans la consommation énergétique et des économies d'énergie d'au moins 32,5%.

Investissements massifs

L'Union européenne devra consacrer 1 à 2% de son PIB à l'économie verte pour financer de nouvelles infrastructures, des commandes publiques, la recherche et développement, la transformation dans les industries et d'autres besoins.

La Commission estime que les investissements supplémentaires nécessaires pour répondre à cette ambition, s'élèvent à 260 milliards d'euros par an. Elle propose de lui consacrer 45 milliards par an de 2021 à 2027.

Ce n'est effectivement qu'une partie de la somme : la majorité de ces investissements sera assumée par les entreprises et les ménages, le reste sera couvert par des dépenses publiques principalement portées par les gouvernements nationaux.

Le Portugal, modèle vert ?

Certains Etats membres sont des champions des énergies renouvelables. C'est le cas du Portugal. L'an dernier, de janvier à novembre, 53% de l'énergie produite dans le pays étaient issus de ces sources vertes.

Le Portugal offre environ 300 jours d'ensoleillement par an. Le soleil et le vent qui souffle fort de l'Atlantique offrent au pays, un avantage majeur en termes d'énergies renouvelables.

Nous nous rendons dans un parc éolien du pays qui a été construit l'an dernier, grâce à un prêt de la Banque européenne d'investissement, un équipement qui participe à la politique d'énergie verte du Portugal.

"Nous avons 13 turbines d'une puissance de 3,6 mégawatts chacune pour une capacité totale de 46,8 mégawatts," explique Hugo Costa, directeur-adjoint national de EDP Renováveis Portugal. "Nous devions faire appel à des fabricants locaux, une partie des éléments ont été produits à Aveiro et donc, c'est un résultat très intéresssant pour la production au Portugal," se félicite-t-il.

Avec 53,3% de l'électricité produite au Portugal émanant de sources renouvelables, le pays pense pouvoir atteindre la neutralité carbone en 2050 et inspirer certains programmes du futur Pacte vert. En mars 2018, la production portugaise d'énergie renouvelable a même dépassé, temporairement, la consommation totale du pays, couvrant plus de 103% de la demande nationale. Cette surproduction pourrait alléger la balance commerciale du Portugal s'il n'existait pas un goulot d'étranglement dans les Pyrénées sur le réseau haute tension.

"Le Qatar des énergies renouvelables"

"Cela dépendra de la manière dont le réseau est géré : on est déjà interconnectés avec l'Espagne et il existe deux interconnections sur lesquelles on travaille," indique Mais les choses pourraient évoluer selon Catarina Roseta Palma, économiste spécialiste de l'environnement et des ressources à l'institut ISCTE de Lisbonne. "Mais ce n'est pas tout," poursuit-elle, "on peut aussi agir sur la demande par le biais de stratégies de réponse à la demande dans lesquelles on paie des entreprises pour qu'elles éteignent leurs équipements quand on a besoin de couvrir un pic de consommation."

Les énergies renouvelables ont un intérêt environnemental et sanitaire, mais peuvent également présenter un intérêt économique, financier et social.

Pedro Amaral Jorge, président de l'Association portugaise des énergies renouvelables (APREN), voit loin : "Je crois que la péninsule ibérique dont fait partie le Portugal peut devenir le Qatar des énergies renouvelables," dit-il. "Quand on regarde l'éolien, l'hydroélectricité et le solaire, nous avons été capables grâce aux interconnections adaptées entre la péninsule ibérique et la France de fournir une quantité énorme d'électricité issue de ces sources d'énergie," fait-il remarquer.

Dans le cadre de la même démarche, le gouvernement portugais s'est engagé à fermer les deux seules centrales électriques à charbon du pays en 2021 et 2023.

Valdis Dombrovskis : "Il faut transformer l'économie de manière substantielle"

En même temps, tout le monde se demande qui paiera la facture de ce Pacte vert. La nouvelle présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a promis 100 milliards d'euros pour aider à financer la transition vers une économie bas carbone. Mais il faudra bien plus que cela.

À Berlin, nous rencontrons le vice-président exécutif de la Commission européenne Valdis Dombrovskis pour lui demander ce que cette vaste transition signifie pour les citoyens et les entreprises.

Efi Koutsokosta, euronews :

"Nous avons vu que le Portugal par exemple mène de nombreuses actions pour bâtir une économie plus verte, en particulier dans les énergies renouvelables. Si les Etats membres peuvent mener de nombreuses actions eux-mêmes, qu'est-ce que ce Pacte vert de la Commission apportera de plus ?"

Valdis Dombrovskis, vice-président exécutif de la Commission européenne :

"En effet, la démarche ne se résume pas à se fixer des objectifs de réduction d'émissions. Elle nécessite de transformer l'économie de manière substantielle. Et c'est justement ce dont il est question dans ce Pacte vert européen : il précise comment nous garantissons cette transformation de l'économie, comment nous allons vers une économie neutre en carbone d'une manière qui soit acceptable socialement et qui préserve notre modèle d'économie sociale de marché. Le "mécanisme pour une transition juste" est un élément de tout cela. Il fera partie du plan d'investissement pour une Europe durable qui a pour ambition de soutenir les investissements nécessaires à cette transition verte dans l'idée principalement de mobiliser au moins 1000 milliards d'euros d'investissements sur la prochaine décennie. Donc l'un des éléments, c'est ce "mécanisme pour une transition juste" qui est plus spécifiquement destiné à soutenir les régions et les secteurs les plus affectés par cette transition comme les régions dépendantes du charbon."

"Un surcoût, mais des économies"

Efi Koutsokosta :

"Qu'est-ce qu'un investissement vert pour la Commission européenne ?"

Valdis Dombrovskis :

"L'Union européenne est parvenue à un accord sur le système de classification, sur la liste des activités économiques vertes et durables. Elle regroupe six catégories environnementales en faveur desquelles elles agissent : l'atténuation des changements climatiques, l'adaptation à ces changements, la biodiversité, l'économie circulaire, la gestion des déchets, les écosystèmes marins, etc. Donc, on énumère ce que l'on peut considérer comme des activités vertes et quelles sont les activités de transition qui nous aideront à évoluer vers une économie neutre en carbone."

Efi Koutsokosta :

"Le coût sera-t-il plus lourd pour les citoyens si tous ces investissements doivent être réalisés ?"

Valdis Dombrovskis :

"D'un côté, la réponse est oui : une partie des emplois disparaîtra, certains combustibles fossiles seront plus chers. Mais de l'autre, l'économie verte créera de nombreux emplois et ces énergies renouvelables nous feront faire des économies à bien des égards, ce qui diminuera le coût de cette transition."

Sources additionnelles • Production : Fanny Gauret, Damien Girier ; cameramen : Renato Guerra, Fabian Welther ; montage : Sébastien Leroy, Nicolas Coquet ; motion design : NEWIC

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